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12/06/2019 | FRANCE | N°422441

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 12 juin 2019, 422441


Vu la procédure suivante :

La société en nom collectif (SNC) Hôtel 37 place René Clair a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations de taxe d'enlèvement des ordures ménagères auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 dans les rôles de la commune de Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), à raison d'un immeuble situé 37, place René Clair. Par un jugement nos 1507497, 1700111 du 23 mai 2018, ce tribunal a fait droit à ses demandes.

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les

20 juillet 2018 et 9 avril 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat,...

Vu la procédure suivante :

La société en nom collectif (SNC) Hôtel 37 place René Clair a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations de taxe d'enlèvement des ordures ménagères auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 dans les rôles de la commune de Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), à raison d'un immeuble situé 37, place René Clair. Par un jugement nos 1507497, 1700111 du 23 mai 2018, ce tribunal a fait droit à ses demandes.

Par un pourvoi et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 juillet 2018 et 9 avril 2019 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter les demandes de la société.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code général des impôts ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Domingo, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de la société hôtel 37 place René Clair ;

Considérant ce qui suit :

1. Le ministre de l'action et des comptes publics se pourvoit en cassation contre le jugement du 23 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a prononcé la décharge des cotisations de taxe d'enlèvement des ordures ménagères auxquelles la société Hôtel 37 place René Clair a été assujettie au titre des années 2013 et 2014 dans les rôles de la commune de Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), à raison d'un immeuble dont elle est propriétaire dans cette commune.

2. D'une part, aux termes du I de l'article 1520 du code général des impôts, applicable aux établissements publics de coopération intercommunale, dans sa rédaction applicable à l'imposition en cause : " Les communes qui assurent au moins la collecte des déchets des ménages peuvent instituer une taxe destinée à pourvoir aux dépenses du service dans la mesure où celles-ci ne sont pas couvertes par des recettes ordinaires n'ayant pas le caractère fiscal. (...) ". En vertu des articles 1521 et 1522 du même code, cette taxe a pour assiette celle de la taxe foncière sur les propriétés bâties. La taxe d'enlèvement des ordures ménagères n'a pas le caractère d'un prélèvement opéré sur les contribuables en vue de pourvoir à l'ensemble des dépenses budgétaires, mais a exclusivement pour objet de couvrir les dépenses exposées par la commune pour assurer l'enlèvement et le traitement des ordures ménagères et non couvertes par des recettes non fiscales. Ces dépenses sont constituées de la somme de toutes les dépenses de fonctionnement réelles exposées pour le service public de collecte et de traitement des déchets ménagers et des dotations aux amortissements des immobilisations qui lui sont affectées, telle qu'elle peut être estimée à la date du vote de la délibération fixant le taux de la taxe. Il en résulte que le produit de cette taxe et, par voie de conséquence, son taux, ne doivent pas être manifestement disproportionnés par rapport au montant de ces dépenses, tel qu'il peut être estimé à la date du vote de la délibération fixant ce taux.

3. D'autre part, aux termes de l'article 1639 A du code général des impôts : " I. - Sous réserve des dispositions de l'article 1639 A bis, les collectivités locales et organismes compétents font connaître aux services fiscaux, avant le 15 avril de chaque année, les décisions relatives soit aux taux, soit aux produits, selon le cas, des impositions directes perçues à leur profit (...). III. La notification a lieu par l'intermédiaire des services préfectoraux pour les collectivités locales et leurs groupements, par l'intermédiaire de l'autorité de l'Etat chargée de leur tutelle pour les chambres de commerce et d'industrie, et directement dans les autres cas. / A défaut, les impositions peuvent être recouvrées selon les décisions de l'année précédente ". Ces dispositions autorisent l'administration, au cas où la délibération d'une collectivité territoriale ou d'un établissement public de coopération intercommunale ne peut plus servir de fondement légal à l'imposition mise en recouvrement, à demander au juge de l'impôt, à tout moment de la procédure, que soit substitué, dans la limite du taux appliqué à cette imposition, le taux retenu lors du vote de l'année précédente.

4. Après avoir constaté, par la voie de l'exception, que les délibérations du conseil de la communauté d'agglomération Grand Paris Seine-Ouest des 28 mars 2013 et 13 février 2014 fixant le taux de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères pour les années 2013 et 2014 étaient entachées d'illégalité au motif que le produit attendu de la taxe, et par suite le taux qu'elles fixaient, étaient manifestement disproportionnés par rapport au montant des dépenses que cette taxe avait pour objet de couvrir, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a refusé de faire droit à la demande de substitution de base légale présentée par le directeur départemental des finances publiques des Hauts-de-Seine sur le fondement du III de l'article 1639 A du code général des impôts au motif que, la déclaration d'illégalité des délibérations en litige n'ayant pas pour effet de les faire disparaître rétroactivement de l'ordonnancement juridique ou de rendre sans objet la communication des taux à l'administration fiscale à laquelle il avait été procédé, ces dispositions n'étaient pas applicables. En statuant ainsi, alors qu'il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'il appartient au juge de l'impôt, saisi d'une demande en ce sens, de rechercher, lorsque la délibération fixant le taux de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères ne peut plus servir de fondement légal à l'imposition mise en recouvrement, notamment lorsque cette impossibilité résulte du constat, par la voie de l'exception, de l'illégalité de cette délibération, s'il y a lieu de substituer le taux résultant de la délibération applicable à l'année précédente, le tribunal a entaché son jugement d'une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que le ministre de l'action et des comptes publics est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 11 juillet 2018 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Article 3 : Les conclusions de la société Hôtel 37 place René Clair présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société en nom collectif Hôtel 37 place René Clair et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 422441
Date de la décision : 12/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 12 jui. 2019, n° 422441
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Laurent Domingo
Rapporteur public ?: Mme Karin Ciavaldini
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:422441.20190612
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