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06/05/2019 | FRANCE | N°408531

France | France, Conseil d'État, 4ème - 1ère chambres réunies, 06 mai 2019, 408531


Vu la procédure suivante :

Par une requête, un mémoire complémentaire et deux nouveaux mémoires, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 28 février et 13 octobre 2017, le 14 mars 2018 et le 19 mars 2019, M. A...B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'avis défavorable émis le 28 juillet 2016 par la 32ème section du Conseil national des universités sur sa nomination comme professeur d'université ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de la présidente de la 32ème section et la déci

sion du 17 octobre 2016 de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement sup...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, un mémoire complémentaire et deux nouveaux mémoires, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 28 février et 13 octobre 2017, le 14 mars 2018 et le 19 mars 2019, M. A...B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'avis défavorable émis le 28 juillet 2016 par la 32ème section du Conseil national des universités sur sa nomination comme professeur d'université ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de la présidente de la 32ème section et la décision du 17 octobre 2016 de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche ayant rejeté ses recours contre l'avis du 28 juillet 2016 ;

3°) d'enjoindre à la 32ème section du Conseil national des universités de réexaminer sa candidature, dans un délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 ;

- le décret n° 92-70 du 16 janvier 1992 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Françoise Tomé, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 5 avril 2019, présentée par M. B....

Considérant ce qui suit :

1. L'article 43 du décret du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs d'université et du corps des maîtres de conférences dispose que, pour pouvoir se présenter aux concours de professeur d'université prévus aux 1°, 2° et 4° de l'article 46 de ce même décret, les candidats doivent avoir, au préalable, été inscrits sur une liste de qualification aux fonctions de professeur des universités établie par le Conseil national des universités. En revanche, pour le concours prévu au 3° de l'article 46 du décret, réservé aux maîtres de conférences qui sont titulaires de l'habilitation à diriger des recherches et qui justifient de dix années de service, les dispositions de l'article 49-3 prévoient que " les concours prévus au 3° de l'article 46 se déroulent conformément aux dispositions des articles 49 et 49-1. La section compétente du Conseil national des universités prend connaissance de la liste de classement établie par l'établissement et examine chacune des candidatures qui lui sont proposées. Après avoir entendu deux rapporteurs désignés par son bureau pour chaque candidature, elle émet un avis sur chacune d'elles. Lorsque, dans l'ordre de la liste de classement proposée par l'établissement, un candidat recevant un avis défavorable de la section compétente du Conseil national des universités est mieux classé qu'un candidat recevant un avis favorable de celle-ci, la section établit un rapport motivé. Dans l'ordre de la liste de classement proposée par l'établissement, le candidat le mieux classé qui a reçu un avis favorable de la section du conseil national des universités est nommé ".

2. Il ressort des pièces du dossier que M.B..., maître de conférences, a été candidat sur le poste ouvert par l'université de La Réunion au titre des dispositions du 3° de l'article 46 du décret du 6 juin 1984, en vue du recrutement d'un professeur des universités sur l'emploi n° 4144 en chimie organique. Alors que M. B...avait été le seul candidat retenu par l'établissement, la 32ème section du Conseil national des universités a, par une délibération du 18 juillet 2016, prise sur le fondement de l'article 49-3 du même décret, émis un avis défavorable à sa nomination. M. B...demande l'annulation pour excès de pouvoir de cet avis ainsi que, par voie de conséquence, de la décision implicite de la présidente de la 32ème section et de la décision du 17 octobre 2016 de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche rejetant ses recours contre cet avis.

3. En premier lieu, l'article 1er du décret du 16 janvier 1992 relatif au Conseil national des universités dispose : " Le Conseil national des universités se prononce, dans les conditions prévues par les dispositions des statuts particuliers et du présent décret, sur les mesures individuelles relatives à la qualification, au recrutement et à la carrière des professeurs des universités et des maîtres de conférences. Il procède au suivi de carrière des enseignants-chercheurs régis par le décret du 6 juin 1984 susvisé. Pour chaque section, les critères et les modalités d'appréciation des candidatures ainsi que les modalités de mise en oeuvre du suivi de carrière des enseignants-chercheurs sont rendus publics. Il en va de même des conditions dans lesquelles les sections formulent leur avis (...) ". Si, pour l'application de ces dispositions aux recrutements des professeurs d'université, il appartient à chaque section du Conseil national des universités de publier les critères et modalités d'appréciation des candidatures qu'elle entend appliquer, tant dans le cadre de la procédure de droit commun, pour les décisions relatives à l'inscription préalable sur une liste de qualification, que dans le cadre de la procédure particulière prévue au 3° de l'article 46 du décret du 6 juin 1984, pour les avis qu'elle doit rendre à ce titre, il ne résulte ni de ces dispositions, ni d'aucune autre disposition ou d'aucun principe que les sections seraient tenues d'établir et de publier des critères distincts pour ces deux procédures de recrutement.

4. Il ressort des pièces du dossier que la 32ème section du Conseil national des universités a, antérieurement au concours litigieux, procédé à la publication de ses critères et modalités d'appréciation des candidatures aux postes de professeurs d'université, sous l'intitulé " critères de qualification ". Cette publication, dont il ne ressort pas des pièces du dossier et dont il n'est d'ailleurs pas soutenu qu'elle était de nature à induire en erreur les candidats à ce concours, doit être regardée comme ayant régulièrement procédé, malgré l'emploi du mot " qualification " et l'absence de critères propres aux avis rendus au titre de la procédure particulière du 3° de l'article 46 du décret du 6 juin 1984, à la publicité requise par les dispositions citées au point 3.

5. Par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que la procédure suivie devant la 32ème section du Conseil national des universités serait irrégulière, faute pour celle-ci d'avoir préalablement publié les critères et modalités d'appréciation des candidatures présentées dans le cadre du concours de recrutement auquel il s'est présenté.

6. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, contrairement à ce que soutient M.B..., que la décision du 28 juin 2016 par laquelle le bureau de la 32ème section a désigné les rapporteurs chargés d'examiner sa candidature aurait fait référence à une procédure de recrutement inexacte et, pour ce motif, faussé leur examen.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 14 du décret du 16 janvier 1992 : " (...) Une formation du Conseil national des universités ne peut valablement délibérer que si la majorité absolue des membres appelés à se prononcer est réunie à l'ouverture de la séance. Si ce quorum n'est pas atteint, une deuxième convocation est envoyée dans le délai d'une semaine. La formation peut alors valablement siéger, quel que soit le nombre des présents. (...) ". Aux termes de l'article 15 du même décret : " L'examen des questions individuelles relatives au recrutement relève des seuls représentants des enseignants-chercheurs et personnels assimilés occupant un emploi d'un rang au moins égal à celui qui est postulé par l'intéressé. (...) ". Il ressort des pièces du dossier que la réunion au cours de laquelle la 32ème section du Conseil national des universités a adopté la délibération litigieuse rassemblait, à l'ouverture de la séance, la majorité absolue de ses membres occupant un emploi d'un rang au moins égal à celui de professeur des universités. Par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions citées ci-dessus auraient été méconnues manque en fait.

8. En quatrième lieu, il résulte des dispositions de l'article 49-3 du décret du 6 juin 1984 citées au point 1 que la section compétente du Conseil national des universités n'est tenue, lorsqu'elle émet un avis défavorable à une candidature, de rédiger un rapport motivé sur cet avis que dans l'hypothèse où une liste de classement comportant plusieurs candidats a été établie et où le candidat qui fait l'objet de son avis défavorable est mieux classé, sur cette liste, qu'un candidat pour lequel elle donne un avis favorable. Or il est constant que M. B...était le seul candidat inscrit sur la liste de classement proposée par l'université de La Réunion. Par suite, le moyen tiré de ce que l'avis attaqué n'est pas assorti d'un rapport motivé est inopérant.

9. En cinquième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la 32ème section du Conseil national des universités aurait omis d'entendre les rapporteurs de son dossier, n'aurait pas délibéré son avis de manière collégiale ou n'aurait pas procédé à l'examen particulier de sa candidature.

10. En sixième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, alors même que l'avis litigieux fait, à tort, état d'un refus d'inscription sur la " liste de qualification " et fait application de critères qui sont également applicables, ainsi qu'il a été dit au point 4, aux demandes d'inscription sur la liste de qualification, que la 32ème section du Conseil national des universités se serait méprise sur la procédure qui était applicable à la candidature de M. B.... Le requérant n'est, par suite, pas fondé à soutenir que l'avis attaqué a, pour ce motif, méconnu les dispositions citées ci-dessus de l'article 49-3 du décret du 18 juin 1984.

11. Enfin, il n'appartient pas au juge de l'excès de pouvoir de contrôler l'appréciation portée par la section compétente du Conseil national des universités sur les mérites d'un candidat dans le cadre d'une des procédures mentionnées au point 1. Dès lors, M. B... ne saurait utilement soutenir que l'avis défavorable émis sur sa candidature est entaché d'une erreur d'appréciation.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation de l'avis du 28 juillet 2016 qu'il attaque. Il n'est, par suite, pas fondé à demander l'annulation, par voie de conséquence, des décisions rejetant ses recours dirigés contre cet avis. Il n'est pas davantage fondé à demander l'annulation de la décision de rejet du 17 octobre 2016 de la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, dès lors qu'il résulte des termes mêmes du dernier alinéa de l'article 49-3 du décret du 6 juin 1984 cité au point 1 qu'un avis défavorable du Conseil national des universités fait obstacle à la nomination d'un candidat comme professeur des universités, y compris s'il est seul à figurer sur la liste présentée par l'établissement.

13. La requête doit, par suite, être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.


Synthèse
Formation : 4ème - 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 408531
Date de la décision : 06/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

30-02-05-01-06-01-02 ENSEIGNEMENT ET RECHERCHE. QUESTIONS PROPRES AUX DIFFÉRENTES CATÉGORIES D'ENSEIGNEMENT. ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET GRANDES ÉCOLES. UNIVERSITÉS. GESTION DES UNIVERSITÉS. GESTION DU PERSONNEL. RECRUTEMENT. - PROFESSEURS DES UNIVERSITÉS (ART. 1ER DU DÉCRET DU 16 JANVIER 1992) - OBLIGATION POUR LE CNU DE PUBLIER LES CRITÈRES ET MODALITÉS D'APPRÉCIATION DES CANDIDATURES - EXISTENCE, TANT DANS LE CADRE DE LA PROCÉDURE DE DROIT COMMUN QUE DANS LE CADRE DE LA PROCÉDURE PARTICULIÈRE PRÉVUE AU 3° DE L'ARTICLE 46 DU DÉCRET DU 6 JUIN 1984 - OBLIGATION D'ÉTABLIR DES CRITÈRES DISTINCTS POUR CES DEUX PROCÉDURES DE RECRUTEMENT - ABSENCE.

30-02-05-01-06-01-02 Si, pour l'application des dispositions de l'article 1er du décret n° 92-70 du 16 janvier 1992 aux recrutements des professeurs d'université, il appartient à chaque section du Conseil national des universités (CNU) de publier les critères et modalités d'appréciation des candidatures qu'elle entend appliquer, tant dans le cadre de la procédure de droit commun, pour les décisions relatives à l'inscription préalable sur une liste de qualification, que dans le cadre de la procédure particulière prévue au 3° de l'article 46 du décret n° 84-431 du 6 juin 1984, pour les avis qu'elle doit rendre à ce titre, il ne résulte ni de ces dispositions, ni d'aucune autre disposition ou d'aucun principe que les sections seraient tenues d'établir et de publier des critères distincts pour ces deux procédures de recrutement.


Publications
Proposition de citation : CE, 06 mai. 2019, n° 408531
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Françoise Tomé
Rapporteur public ?: M. Frédéric Dieu

Origine de la décision
Date de l'import : 03/08/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:408531.20190506
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