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29/03/2019 | FRANCE | N°419620

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 29 mars 2019, 419620


Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 29 septembre 2017 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile et a refusé de lui reconnaître la qualité de réfugié ou, à défaut, le bénéfice de la protection subsidiaire.

Par une décision n° 17047732 du 7 février 2018, la Cour nationale du droit d'asile a annulé la décision de l'OFPRA et lui a renvoyé la demande de M.B....

Par un pourvoi enregistré le 6 avril 2018 au secrétaria

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1°) d'annuler ce...

Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 29 septembre 2017 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile et a refusé de lui reconnaître la qualité de réfugié ou, à défaut, le bénéfice de la protection subsidiaire.

Par une décision n° 17047732 du 7 février 2018, la Cour nationale du droit d'asile a annulé la décision de l'OFPRA et lui a renvoyé la demande de M.B....

Par un pourvoi enregistré le 6 avril 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'OFPRA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) de renvoyer l'affaire devant la Cour nationale du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Richard Senghor, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Office Français De Protection Des Refugies Et Apatrides ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M.B..., ressortissant nigérien, a formé, le 1er mars 2016, une demande d'asile et a demandé à être entendu en langue zarma par l'agent de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA). Il a été avisé, par courrier en date du 27 juin 2017, que l'Office ne disposant pas d'interprète en zarma, il serait entendu, le 25 août 2017, en français, langue nationale du Niger. L'OFPRA se pourvoit en cassation contre la décision du 7 février 2018 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a annulé sa décision refusant de reconnaître à M. B...la qualité de réfugié ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire, et a renvoyé la demande de M.B... devant l'Office.

2. Aux termes de l'article L. 733-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Saisie d'un recours contre une décision du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, la Cour nationale du droit d'asile statue, en qualité de juge de plein contentieux, sur le droit du requérant à une protection au titre de l'asile au vu des circonstances de fait dont elle a connaissance au moment où elle se prononce. / La cour ne peut annuler une décision du directeur général de l'office et lui renvoyer l'examen de la demande d'asile que lorsqu'elle juge que l'office a pris cette décision sans procéder à un examen individuel de la demande ou en se dispensant, en dehors des cas prévus par la loi, d'un entretien personnel avec le demandeur et qu'elle n'est pas en mesure de prendre immédiatement une décision positive sur la demande de protection au vu des éléments établis devant elle ". En application de ces dispositions, le moyen tiré de ce que l'entretien personnel du demandeur d'asile à l'Office se serait déroulé dans de mauvaises conditions n'est pas de nature à justifier que la Cour nationale du droit d'asile annule une décision de l'Office et lui renvoie l'examen de la demande d'asile. En revanche, il revient à la Cour de procéder à cette annulation et à ce renvoi si elle juge que le demandeur a été dans l'impossibilité de se faire comprendre lors de cet entretien, faute d'avoir pu bénéficier du concours d'un interprète dans la langue qu'il a choisie dans sa demande d'asile ou dans une autre langue dont il a une connaissance suffisante, et que ce défaut d'interprétariat est imputable à l'Office.

3. Aux termes de l'article L. 723-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'office convoque le demandeur à un entretien personnel. (...) Le demandeur se présente à l'entretien et répond personnellement aux questions qui lui sont posées par l'agent de l'office. Il est entendu dans la langue de son choix, sauf s'il existe une autre langue dont il a une connaissance suffisante. ".

4. Il ressort des énonciations de la décision attaquée de la Cour nationale du droit d'asile que M. B...avait demandé à être entendu en langue zarma par l'OFPRA, langue utilisée par les membres de l'ethnie à laquelle il appartient. Si l'entretien a eu lieu en français, faute pour l'OFPRA de disposer d'interprètes en langue zarma, l'intéressé n'a pas pu répondre aux questions posées et l'entretien a été écourté. M. B...a expliqué, lors de l'audience à la Cour nationale du droit d'asile devant laquelle il a bénéficié d'un interprète en langue zarma, que si le français était la langue officielle du Niger, il n'en possédait qu'une connaissance sommaire faute d'avoir été scolarisé et ne s'exprimait qu'en langue zarma. En relevant, par une appréciation souveraine non entachée de dénaturation, que M. B...n'avait pas pu se faire comprendre lors de l'entretien qui s'est déroulé en français devant l'OFPRA faute d'avoir bénéficié d'un interprète en langue zarma et en en déduisant que ce défaut d'entretien était imputable à l'OFPRA, alors même que le français est la langue officielle du Niger, dès lors que M. B...n'en avait pas une connaissance suffisante, la cour, dont la décision est suffisamment motivée, n'a pas commis d'erreur de droit. Il s'ensuit que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en annulant, par voie de conséquence, la décision de l'OFPRA rejetant la demande d'asile du requérant et en renvoyant ce dernier devant l'Office.

5. Il résulte de tout ce qui précède que l'OFPRA n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision de la Cour nationale du droit d'asile qu'il attaque.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de l'OFPRA est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à M. A...B....


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 419620
Date de la décision : 29/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 29 mar. 2019, n° 419620
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Richard Senghor
Rapporteur public ?: Mme Aurélie Bretonneau
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:419620.20190329
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