Vu la procédure suivante :
1° Sous le n° 414849, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 5 octobre 2017 et 21 novembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Ligue française pour la protection des oiseaux (LPO) demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 juillet 2017 du ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, relatif à l'emploi des gluaux pour la capture des grives et des merles noirs destinés à servir d'appelants dans le département de Vaucluse pour la campagne 2017-2018 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens.
2° Sous le n° 415593, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 10 novembre 2017 et 21 novembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Ligue française pour la protection des oiseaux (LPO) demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 juillet 2017 du ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, relatif à l'emploi des gluaux pour la capture des grives et des merles noirs destinés à servir d'appelants dans le département du Var pour la campagne 2017-2018 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens.
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3° Sous le n° 416344, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 6 décembre 2017 et 21 novembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Ligue française pour la protection des oiseaux (LPO) demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 juillet 2017 du ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, relatif à l'emploi des gluaux pour la capture des grives et des merles noirs destinés à servir d'appelants dans le département des Bouches-du-Rhône pour la campagne 2017-2018 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens.
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4° Sous le n° 416345, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 6 décembre 2017 et 21 novembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Ligue française pour la protection des oiseaux (LPO) demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 27 juillet 2017 du ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, relatif à l'emploi des gluaux pour la capture des grives et des merles noirs destinés à servir d'appelants dans le département des Alpes-Maritimes pour la campagne 2017-2018 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
3°) de condamner l'Etat aux entiers dépens.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule ;
- la directive 2009/147/CE du Parlement européen et du Conseil du 30 novembre 2009 ;
- le code de l'environnement, notamment son article L. 424-4 ;
- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;
- le décret n° 2008-680 du 9 juillet 2008 ;
- le décret n° 2017-1071 du 24 mai 2017 ;
- l'arrêté du 17 août 1989 relatif à l'emploi des gluaux pour la capture des grives et des merles destinés à servir d'appelants dans les départements des Alpes-de-Haute-Provence, des Alpes-Maritimes, des Bouches-du-Rhône, du Var et de Vaucluse ;
- l'arrêt de la Cour de Justice des Communautés européennes du 9 décembre 2004, Commission des Communautés européennes contre Royaume d'Espagne (C-79/03) ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Coralie Albumazard, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Julie Burguburu, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la Fédération nationale des chasseurs.
Considérant ce qui suit :
1. La ligue française de protection des oiseaux (LPO) demande sous les nos 414849, 415593, 416344 et 416345 l'annulation pour excès de pouvoir de quatre arrêtés du 27 juillet 2017 du ministre chargé de la chasse, relatifs à l'emploi des gluaux pour la capture de grives et de merles noirs destinés à servir d'appelants pendant la campagne de chasse 2017-2018, dans les départements de Vaucluse, du Var, des Bouches-du-Rhône et des Alpes-Maritimes. Ces requêtes présentant à juger les mêmes questions, il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.
2. La Fédération nationale des chasseurs justifie d'un intérêt suffisant au maintien des arrêtés attaqués. Ainsi, son intervention est recevable.
3. Aux termes de l'article L. 424-4 du code de l'environnement : " Dans le temps où la chasse est ouverte, le permis donne à celui qui l'a obtenu le droit de chasser de jour, soit à tir, soit à courre, à cor et à cri, soit au vol, suivant les distinctions établies par des arrêtés du ministre chargé de la chasse. (...) Pour permettre, dans des conditions strictement contrôlées et de manière sélective, la chasse de certains oiseaux de passage en petites quantités, le ministre chargé de la chasse autorise, dans les conditions qu'il détermine, l'utilisation des modes et moyens de chasse consacrés par les usages traditionnels, dérogatoires à ceux autorisés par le premier alinéa.(...) Les gluaux sont posés une heure avant le lever du soleil et enlevés avant onze heures. (...) ".
4. En application des dispositions citées au point précédent, le ministre chargé de la chasse a, par un arrêté du 17 août 1989, autorisé sous certaines conditions l'emploi des gluaux pour la capture des grives et des merles destinés à servir d'appelants dans les départements des Alpes-de-Haute-Provence, des Alpes-Maritimes, des Bouches-du-Rhône, du Var et de Vaucluse, l'article 6 de cet arrêté renvoyant à un arrêté pris chaque année par le ministre chargé de la chasse la fixation du nombre maximum d'oiseaux pouvant être ainsi capturés au cours d'une campagne de chasse. Par les arrêtés attaqués, le ministre a fixé à 30 000, 27 000, 15 000 et 1 000 le nombre maximum de grives et de merles noirs susceptibles d'être capturés par l'emploi de gluaux pour servir d'appelants pendant la campagne de chasse 2017-2018, respectivement dans les départements de Vaucluse, du Var, des Bouches-du-Rhône et des Alpes-Maritimes, ainsi que les conditions dans lesquelles cette capture est autorisée dans chacun de ces départements.
5. Aux termes de l'article 7 de la Charte de l'environnement : " Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ". L'article L. 123-19-1 du code de l'environnement définit les conditions et limites dans lesquelles le principe de participation du public est applicable aux décisions, autres que les décisions individuelles, des autorités publiques ayant une incidence sur l'environnement lorsque celles-ci ne sont pas soumises, par les dispositions législatives qui leur sont applicables, à une procédure particulière organisant la participation du public à leur élaboration. Il précise, en outre, que " ne sont pas regardées comme ayant une incidence sur l'environnement les décisions qui ont sur ce dernier un effet indirect ou non significatif ".
6. Il ressort des pièces des dossiers que les arrêtés attaqués ont, eu égard à leur objet, qui est de fixer pour la campagne de chasse 2017-2018 dans les départements qu'ils visent un nombre maximal d'oiseaux susceptibles d'être capturés par l'emploi de gluaux selon un mode de chasse traditionnel, une incidence directe et significative sur l'environnement au sens du I de l'article L. 123-19-1 du code de l'environnement. Or ils n'ont pas été soumis à une procédure organisant la participation du public à leur élaboration. Par suite, l'association requérante est fondée à soutenir qu'ils ont été adoptés au terme d'une procédure irrégulière.
7. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des requêtes, que les arrêtés du 27 juillet 2017 du ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, relatifs à l'emploi des gluaux pour la capture des grives et des merles noirs destinés à servir d'appelants dans les départements de Vaucluse, du Var, des Bouches-du-Rhône et des Alpes-Maritimes pour la campagne 2017-2018 doivent être annulés. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme globale de 4 000 euros à la Ligue française pour la protection des oiseaux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'intervention de la Fédération nationale des chasseurs est admise.
Article 2 : Les arrêtés du 27 juillet 2017 du ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, relatifs à l'emploi des gluaux pour la capture des grives et des merles noirs destinés à servir d'appelants dans les départements de Vaucluse, du Var, des Bouches-du-Rhône et des Alpes-Maritimes pour la campagne 2017-2018 sont annulés.
Article 3 : L'Etat versera à la Ligue française pour la protection des oiseaux la somme globale de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la Ligue française pour la protection des oiseaux, au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire, et à la Fédération nationale des chasseurs.