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25/02/2019 | FRANCE | N°412231

France | France, Conseil d'État, 6ème et 5ème chambres réunies, 25 février 2019, 412231


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 7 juillet 2017, 4 octobre 2017 et 11 octobre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le conseil régional de l'ordre des architectes de La Réunion et de Mayotte demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2017-495 du 6 avril 2017 portant diverses dispositions relatives à l'organisation de la profession d'architecte ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'a

rticle L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossie...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 7 juillet 2017, 4 octobre 2017 et 11 octobre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le conseil régional de l'ordre des architectes de La Réunion et de Mayotte demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2017-495 du 6 avril 2017 portant diverses dispositions relatives à l'organisation de la profession d'architecte ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 ;

- le décret n° 77-1481 du 28 décembre 1977 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Catherine Calothy, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Julie Burguburu, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat du conseil régional de l'ordre des architectes de La Réunion.

Considérant ce qui suit :

1. Le Conseil régional de l'ordre des architectes de La Réunion et de Mayotte doit, eu égard aux moyens soulevés, être regardé comme demandant l'annulation pour excès de pouvoir de l'article 68 du décret du 28 décembre 1977 sur l'organisation de la profession d'architecte, dans sa rédaction issue du II de l'article 26 du décret du 6 avril 2017 portant diverses dispositions relatives à l'organisation de la profession d'architecte.

2. Aux termes de l'article 68 du décret du 28 décembre 1977 précité, dans sa rédaction issue du décret attaqué : " Le conseil régional de l'ordre des architectes de La Réunion devient le conseil de l'ordre des architectes de La Réunion et de Mayotte. Son siège est fixé à Saint-Denis. / Dans le cadre des élections régionales, les listes électorales comportent au moins un architecte établi à titre principal à La Réunion et un architecte établi à titre principal dans le Département de Mayotte. / Les bulletins de vote comportent au moins un architecte établi à titre principal à La Réunion et un architecte établi à titre principal dans le Département de Mayotte. / Le président du conseil de l'ordre des architectes de La Réunion et de Mayotte nomme un représentant de l'ordre parmi les conseillers régionaux établis à titre principal dans le Département de Mayotte. Celui-ci représente l'ordre auprès des services de l'Etat, du Département de Mayotte et de tout organisme de droit public ou privé établi à Mayotte. En l'absence de représentant de l'ordre élu établi dans le Département de Mayotte, le conseil de l'ordre des architectes de La Réunion et de Mayotte désigne un architecte établi à titre principal dans le Département pour effectuer cette mission. ".

3. L'article 73 de la Constitution prévoit que : " Dans les départements et les régions d'outre-mer, les lois et règlements sont applicables de plein droit. Ils peuvent faire l'objet d'adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités ". Aux termes de l'article LO 3511-1 du code général des collectivités territoriales : " A compter de la première réunion suivant le renouvellement de son assemblée délibérante en 2011, la collectivité départementale de Mayotte est érigée en une collectivité régie par l'article 73 de la Constitution, qui prend le nom de "A..." et exerce les compétences dévolues aux départements d'outre-mer et aux régions d'outre-mer. ". L'article L. 4431-1 du même code dispose que la région de La Réunion exerce les compétences que les lois, dans leurs dispositions non contraires à celles du titre III du livre IV de la quatrième partie, attribuent à l'ensemble des régions et celles que définit le titre III du livre IV de la quatrième partie pour tenir compte des mesures d'adaptation rendues nécessaires par leur situation particulière.

4. En premier lieu, l'article 22 de la loi du 3 janvier 1977 sur l'architecture, dans sa rédaction issue de la loi du 7 juillet 2016, prévoit qu'il est institué, dans chaque région, un conseil régional de l'ordre des architectes. Cet article renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de préciser, notamment, les modalités des élections du conseil régional ainsi que le nombre des membres de chaque conseil régional, qui peut varier en fonction de l'effectif des architectes inscrits au tableau régional ainsi que les conditions de représentation des territoires à l'intérieur d'un conseil régional. En application de ces dispositions, le pouvoir réglementaire pouvait décider d'étendre la compétence d'un conseil régional de l'ordre des architectes à une collectivité régie par l'article 73 de la Constitution telle que Mayotte, qui n'est pas une région. En prévoyant, par les dispositions attaquées, que le conseil régional de l'ordre des architectes de La Réunion devient le conseil de l'ordre des architectes de La Réunion et de Mayotte et en en tirant les conséquences, notamment pour les modalités des élections ainsi que pour les conditions de représentation des architectes exerçant à Mayotte, le pouvoir réglementaire n'a méconnu ni les dispositions de l'article 22 de la loi du 3 janvier 1977 sur l'architecture ni l'étendue de sa compétence.

5. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que le Département de Mayotte présente des spécificités, eu égard notamment au nombre très faible d'architectes y exerçant leur activité, moins de vingt selon les pièces du dossier contre plus de 300 à La Réunion, qui y rendraient très difficile la mise en place d'une organisation propre de représentation de la profession. Dans ces conditions, compte tenu des caractéristiques et contraintes particulières des collectivités concernées, les dispositions attaquées ont pu légalement prévoir, sans être entachées d'erreur manifeste d'appréciation ni méconnaître le principe d'égalité, la création d'un conseil de l'ordre des architectes commun à La Réunion et à Mayotte.

6. En outre, si le requérant soutient qu'en prévoyant des règles électorales spécifiques pour les architectes exerçant à Mayotte, le pouvoir réglementaire a méconnu le principe d'égalité, les dispositions attaquées ont pour seul objet, non d'imposer une sur représentation des architectes exerçant à Mayotte, mais d'éviter que leur très faible effectif ne conduise nécessairement à les priver de toute représentation propre, en contradiction avec l'objectif poursuivi par le législateur. Le moyen tiré sur ce point d'une atteinte au principe d'égalité doit donc être écarté.

7. Il résulte de ce qui précède que le conseil régional de l'ordre des architectes de La Réunion et de Mayotte n'est pas fondé à demander l'annulation du décret attaqué.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête du conseil régional de l'ordre des architectes de La Réunion et de Mayotte est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au conseil régional de l'ordre des architectes de La Réunion et de Mayotte, au Premier ministre, au ministre de la culture et à la ministre des outre-mer.


Synthèse
Formation : 6ème et 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 412231
Date de la décision : 25/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 25 fév. 2019, n° 412231
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Catherine Calothy
Rapporteur public ?: Mme Julie Burguburu
Avocat(s) : SCP MONOD, COLIN, STOCLET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/03/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:412231.20190225
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