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18/02/2019 | FRANCE | N°414806

France | France, Conseil d'État, 1ère et 4ème chambres réunies, 18 février 2019, 414806


Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes :

- d'annuler la décision du 8 juillet 2015 par laquelle le président du conseil départemental de Vaucluse a confirmé la récupération d'un indu de 1 054,84 euros au titre du revenu de solidarité active pour la période du 1er septembre 2014 au 24 mars 2015 ainsi que la suspension de ses droits et sa radiation du revenu de solidarité active, de prononcer la décharge de l'indu et, à titre subsidiaire, un échelonnement du remboursement à hauteur de 256 euros par mois et de rétablir ses

droits au revenu de solidarité active à compter du 5 mars 2015 ;

- d'annu...

Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes :

- d'annuler la décision du 8 juillet 2015 par laquelle le président du conseil départemental de Vaucluse a confirmé la récupération d'un indu de 1 054,84 euros au titre du revenu de solidarité active pour la période du 1er septembre 2014 au 24 mars 2015 ainsi que la suspension de ses droits et sa radiation du revenu de solidarité active, de prononcer la décharge de l'indu et, à titre subsidiaire, un échelonnement du remboursement à hauteur de 256 euros par mois et de rétablir ses droits au revenu de solidarité active à compter du 5 mars 2015 ;

- d'annuler la décision du 3 août 2015 par laquelle la caisse d'allocations familiales de Vaucluse l'a mis en demeure de payer un indu de 1 054,84 euros au titre du revenu de solidarité active pour la période du 1er septembre 2014 au 24 mars 2015 et de le décharger des sommes à payer.

Par un jugement n°s 1504042, 1600690 du 23 juin 2017, le tribunal administratif de Nîmes a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du 8 juillet 2015 et a rejeté le surplus des conclusions de M.B....

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 3 octobre 2017 et 3 janvier 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses demandes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à son avocat, la SCP Delamarre, Jehannin, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Charles Touboul, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de M. A...B...et à la SCP Foussard, Froger, avocat de la Département de Vaucluse.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond qu'à la suite d'un contrôle effectué au domicile de M. B...le 26 janvier 2015, la caisse d'allocations familiales de Vaucluse a décidé le 24 mars 2015 de récupérer à son encontre un indu de 1 054,84 euros au titre du revenu de solidarité active pour la période du 1er septembre 2014 au 24 mars 2015, de suspendre ses droits et de le radier du revenu de solidarité active. Son recours administratif préalable ayant été rejeté par le président du conseil départemental de Vaucluse, qui a confirmé la récupération d'indu par une décision du 8 juillet 2015, M. B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler cette décision et la décision de la caisse d'allocations familiales de Vaucluse du 3 août 2015 le mettant en demeure de verser cette somme, de le décharger de cette somme et de rétablir ses droits au revenu de solidarité active à compter de mars 2015. Le président du conseil départemental de Vaucluse ayant rapporté, le 25 février 2016, sa décision du 8 juillet 2015, le tribunal administratif de Nîmes a prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions de M. B...tendant à l'annulation de cette décision, a rejeté comme irrecevables, car dépourvues d'objet, ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 3 août 2015 et a rejeté comme non fondées ses conclusions tendant au rétablissement de ses droits au revenu de solidarité active à compter du 31 mai 2015. Eu égard au moyen qu'il soulève, M. B...doit être regardé comme demandant l'annulation de ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions tendant au rétablissement de ses droits au revenu de solidarité active à compter de cette date.

2. Les articles R. 772-5 à R 772-10 du code de justice administrative comportent des dispositions particulières applicables à la présentation, à l'instruction et au jugement des requêtes relatives aux prestations, allocations ou droits attribués au titre de l'aide ou de l'action sociale, du logement ou en faveur des travailleurs privés d'emploi. A ce titre, d'une part, en vertu des articles R. 772-6 et R. 772-7, une requête de première instance, sauf si elle a été introduite par un avocat ou a été présentée sur un formulaire mis à la disposition des requérants par la juridiction administrative et contenant l'ensemble des informations requises, ne peut être rejetée pour défaut ou pour insuffisance de motivation qu'après que le requérant a été informé du rôle du juge administratif et de la nécessité de lui soumettre une argumentation propre à établir que la décision attaquée méconnaît ses droits et de lui transmettre, à cet effet, toutes les pièces justificatives utiles. D'autre part, aux termes de l'article R. 772-8 du même code : " Lorsque la requête lui est notifiée, le défendeur est tenu de communiquer au tribunal administratif l'ensemble du dossier constitué pour l'instruction de la demande tendant à l'attribution de la prestation ou de l'allocation ou à la reconnaissance du droit, objet de la requête ". Il résulte de ces dispositions que, lorsque le tribunal administratif lui notifie une requête relative à l'attribution du revenu de solidarité active ou à la récupération d'un indu de cette prestation, il appartient au département, si nécessaire à l'invitation du tribunal, de communiquer à celui-ci l'ensemble du dossier constitué pour l'instruction de la demande ou pour le calcul de l'indu. Sauf dans le cas où sa décision est fondée sur un motif sur lequel son contenu ne peut avoir d'incidence, le tribunal ne peut régulièrement rejeter les conclusions dont il est saisi sans disposer des éléments pertinents de ce dossier.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. B...sollicitait le rétablissement de ses droits au revenu de solidarité active à compter de mars 2015, en soutenant, notamment, que l'administration avait retenu à tort qu'il vivait en concubinage. Le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ces conclusions au motif que si M. B...était fondé à demander le réexamen de ses droits en fonction de sa situation personnelle au 31 mai 2015 - l'allocation de revenu de solidarité active lui ayant été versée, le 17 mai 2016, pour la période du 1er mars au 31 mai 2015 - il ne produisait aucun élément probant de nature à permettre au tribunal d'y procéder. Si le tribunal pouvait, le cas échéant, le renvoyer devant l'administration afin qu'elle procède à la fixation de ses droits sur la base des motifs de son jugement, il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'il ne pouvait régulièrement rejeter ses conclusions en se fondant ainsi sur l'insuffisance des justificatifs qu'il avait produits, alors que, en méconnaissance de l'article R. 772-8 du code de justice administrative, la caisse d'allocations familiales de Vaucluse n'avait pas communiqué les éléments sur la base desquels elle avait calculé ses droits pour le trimestre précédent, que le tribunal devait également prendre en considération après les avoir soumis au débat contradictoire et avoir, le cas échéant, invité le requérant à actualiser sa situation, pour apprécier ses droits au revenu de solidarité active.

4. Il résulte de ce qui précède que M. B...est fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal de Nîmes qu'il attaque, en tant qu'il statue sur sa demande de rétablissement dans ses droits au revenu de solidarité active à compter du 31 mai 2015.

5. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme que la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de M.B..., demande au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 23 juin 2017 est annulé en tant qu'il statue sur la demande de M. B...tendant à être rétabli dans ses droits au revenu de solidarité active à compter du 31 mai 2015.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Nîmes dans la mesure de la cassation prononcée.

Article 3 : Les conclusions de la SCP Delamarre, Jéhannin présentées au titre du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au département de Vaucluse.

Copie en sera adressée à la ministre des solidarités et de la santé et à la caisse d'allocations familiales de Vaucluse.


Synthèse
Formation : 1ère et 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 414806
Date de la décision : 18/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 18 fév. 2019, n° 414806
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Luc Nevache
Rapporteur public ?: M. Charles Touboul
Avocat(s) : SCP DELAMARRE, JEHANNIN ; SCP FOUSSARD, FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:414806.20190218
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