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30/01/2019 | FRANCE | N°424823

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 30 janvier 2019, 424823


Vu la procédure suivante :

Par une lettre du 13 février 2018, en application de l'article R. 931-6 du code de justice administrative, le président de la section du rapport et des études du Conseil d'Etat a demandé au ministre des solidarités et de la santé de justifier de l'exécution de la décision n°s 397362, 397531 du 17 mars 2017 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'article 1er du décret n° 2015-1869 du 30 décembre 2015 en tant qu'il ne fait pas figurer les experts désignés par le juge judiciaire pour accomplir des expertises médicales, p

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Vu la procédure suivante :

Par une lettre du 13 février 2018, en application de l'article R. 931-6 du code de justice administrative, le président de la section du rapport et des études du Conseil d'Etat a demandé au ministre des solidarités et de la santé de justifier de l'exécution de la décision n°s 397362, 397531 du 17 mars 2017 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'article 1er du décret n° 2015-1869 du 30 décembre 2015 en tant qu'il ne fait pas figurer les experts désignés par le juge judiciaire pour accomplir des expertises médicales, psychiatriques ou psychologiques, autres que les médecins et psychologues exerçant des activités d'expertises médicales, psychiatriques ou psychologiques rémunérés en application des dispositions de l'article R. 91 du code de procédure pénale et qui ne sont pas affiliés à un régime de travailleurs non salariés, sur la liste, fixée à l'article D. 311-1 du code de la sécurité sociale, des collaborateurs occasionnels du service public au sens du 21° de l'article L. 311-3 du même code.

Au vu des éléments reçus en réponse à sa demande, le président de la section du rapport et des études a saisi le président de la section du contentieux d'une demande d'ouverture d'une procédure d'astreinte d'office, sur le fondement de l'article R. 931-6 du code de justice administrative.

Par une ordonnance du 17 octobre 2018, le président de la section du contentieux a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle d'astreinte d'office.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Marie Sirinelli, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Charles Touboul, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 911-5 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'une décision rendue par une juridiction administrative, le Conseil d'Etat peut, même d'office, prononcer une astreinte contre les personnes morales de droit public ou les organismes de droit privé chargés de la gestion d'un service public pour assurer l'exécution de cette décision ". L'article R. 931-6 du même code prévoit, en outre, que : " Le président de la section du rapport et des études peut, même s'il n'est pas saisi en application de l'article R. 931-2, demander aux personnes morales mentionnées à l'article L. 911-5 de justifier de l'exécution d'une décision du Conseil d'Etat. / (...) / Lorsqu'il estime que la décision du Conseil d'Etat n'a pas été exécutée, le président de la section du rapport et des études saisit le président de la section du contentieux aux fins d'ouverture d'une procédure d'astreinte d'office. (...) / Le président de la section du contentieux prononce par ordonnance l'ouverture de la procédure (...) ".

2. Par une décision du 17 mars 2017, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'article 1er du décret du 30 décembre 2015 relatif à l'affiliation au régime général de sécurité sociale des personnes participant de façon occasionnelle à des missions de service public en tant qu'il ne fait pas figurer, sur la liste, fixée à l'article D. 311-1 du code de la sécurité sociale, des collaborateurs occasionnels du service public au sens du 21° de l'article L. 311-3 du même code, les experts désignés par le juge judiciaire pour accomplir des expertises médicales, psychiatriques ou psychologiques, autres que les médecins et psychologues exerçant des activités d'expertises médicales, psychiatriques ou psychologiques rémunérés en application des dispositions de l'article R. 91 du code de procédure pénale qui ne sont pas affiliés à un régime de travailleurs non salariés, qui y figuraient déjà. Cette décision, à la date à laquelle elle a été prise, impliquait nécessairement que le gouvernement prenne les dispositions réglementaires nécessaires pour compléter en conséquence la liste fixée à l'article D. 311-1.

3. A la date de la présente décision, l'Etat n'a pas pris les mesures propres à assurer l'exécution de la décision du 17 mars 2017. Il est vrai que l'article 29 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 a complété le 21° de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale, pour excepter des collaborateurs occasionnels du service public affiliés obligatoirement aux assurances sociales du régime général les " experts requis, commis ou désignés par les juridictions de l'ordre judiciaire ou par les personnes agissant sous leur contrôle afin d'accomplir une mission d'expertise indépendante et qui sont affiliés à un régime de travailleurs non-salariés ". Toutefois, ces dispositions ont pour seul effet d'excepter des collaborateurs occasionnels du service public au sens du 21° de l'article L. 311-3 ceux des experts mentionnés par l'article 1er de la décision du 17 mars 2017 qui sont affiliés à un régime de travailleurs non salariés. Par suite, contrairement à ce que soutient le ministre des solidarités et de la santé, elles ne mettent pas fin à l'obligation de prendre les dispositions réglementaires nécessaires à l'exécution de la décision du 17 mars 2017 mais se bornent à en limiter la portée.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'affaire, d'enjoindre au Premier ministre de prendre, dans le délai de trois mois à compter de la présente décision, un décret modifiant l'article D. 311-1 du code de la sécurité sociale pour faire figurer sur la liste qu'il prévoit l'ensemble des experts désignés par le juge judiciaire pour accomplir des expertises médicales, psychiatriques ou psychologiques qui ne sont pas affiliés à un régime de travailleurs non salariés et d'assortir ces prescriptions d'une astreinte de 3 000 euros par jour de retard jusqu'à la date à laquelle la décision précitée aura reçu exécution dans cette mesure.

5. Enfin, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 100 euros à verser à chacun des requérants de la requête enregistrée sous le n° 397362, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il est enjoint au Premier ministre de prendre, dans le délai de trois mois à compter de la notification de la présente décision, un décret modifiant l'article D. 311-1 du code de la sécurité sociale pour faire figurer sur la liste qu'il prévoit l'ensemble des experts désignés par le juge judiciaire pour accomplir des expertises médicales, psychiatriques ou psychologiques qui ne sont pas affiliés à un régime de travailleurs non salariés.

Article 2 : Une astreinte est prononcée à l'encontre de l'Etat, s'il ne justifie pas avoir, dans les trois mois suivant la notification de la présente décision, exécuté la décision du Conseil d'Etat du 17 mars 2017, dans la mesure précisée à l'article 1er, et jusqu'à la date de cette exécution. Le taux de cette astreinte est fixé à 3 000 euros par jour, à compter de l'expiration du délai de trois mois suivant la notification de la présente décision.

Article 3 : La ministre des solidarités et de la santé communiquera à la section du rapport et des études du Conseil d'Etat copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter la décision n°s 397362, 397531 du 17 mars 2017.

Article 4 : L'Etat versera à M.N..., à M.A..., à MmeE..., à M.F..., à M. S..., à M.B..., à M.I..., à MmeQ..., à M.H..., à M.L..., à M. C..., à M.P..., à M.D..., à M.K..., à M.J..., à MmeO..., à M.M..., à M. G...et à M. R...une somme de 100 euros chacun au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée, pour l'ensemble des requérants de la requête enregistrée sous le n° 397362, à M. T...N..., ainsi qu'au Premier ministre, à la ministre des solidarités et de la santé et à la garde des sceaux, ministre de la justice.

Copie en sera adressée à M. U...et à la présidente de la section du rapport et des études.


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Action en astreinte

Références :

Publications
Proposition de citation: CE, 30 jan. 2019, n° 424823
Inédit au recueil Lebon
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Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Marie Sirinelli
Rapporteur public ?: M. Charles Touboul

Origine de la décision
Formation : 1ère chambre
Date de la décision : 30/01/2019
Date de l'import : 05/02/2019

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 424823
Numéro NOR : CETATEXT000038077363 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;conseil.etat;arret;2019-01-30;424823 ?
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