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30/01/2019 | FRANCE | N°421072

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 30 janvier 2019, 421072


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 30 mai 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 10 avril 2018 lui refusant l'acquisition de la nationalité française ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- le

code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Stéphanie Vera...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 30 mai 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 10 avril 2018 lui refusant l'acquisition de la nationalité française ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Stéphanie Vera, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Sophie Roussel, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. L'article 21-2 du code civil dispose que : " L'étranger ou apatride qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française peut, après un délai de quatre ans à compter du mariage, acquérir la nationalité française par déclaration à condition qu'à la date de cette déclaration la communauté de vie tant affective que matérielle n'ait pas cessé entre les époux depuis le mariage et que le conjoint français ait conservé sa nationalité ". L'article 21-4 du même code prévoit toutefois que : " Le Gouvernement peut s'opposer par décret en Conseil d'Etat, pour indignité ou défaut d'assimilation autre que linguistique, à l'acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger dans un délai de deux ans à compter de la date du récépissé prévu au deuxième alinéa de l'article 26 ou, si l'enregistrement a été refusé, à compter du jour où la décision judiciaire admettant la régularité de la déclaration est passée en force de chose jugée ".

2. M.B..., ressortissant marocain, a épousé une ressortissante française le 3 juillet 2010. Il a, le 11 mars 2016, souscrit une déclaration d'acquisition de la nationalité française à raison de ce mariage. Mais le Premier ministre s'est opposé à l'acquisition de la nationalité française par un décret du 10 avril 2018, au motif que M. B...ne pouvait être regardé comme digne d'acquérir la nationalité française. M. B...demande l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret.

3. En premier lieu, les deux premiers alinéas de l'article 32 du décret du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française disposent que : " Lorsque le Gouvernement veut s'opposer par décret en Conseil d'Etat, pour indignité ou défaut d'assimilation autre que linguistique, à l'acquisition de la nationalité française par une personne ayant souscrit une déclaration au titre de l'article 21-2, 21-13-1 ou 21-13-2 du code civil, le ministre chargé des naturalisations notifie les motifs de fait et de droit qui justifient l'intention de faire opposition à l'intéressé qui dispose d'un délai qui ne peut être inférieur à un mois pour produire un mémoire en défense. / La notification est faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. Elle peut également l'être en la forme administrative par l'autorité qui a reçu la déclaration ".

4. Il ressort des pièces du dossier que la lettre du 12 janvier 2018 par laquelle l'administration a informé l'intéressé de son intention de s'opposer à l'acquisition de la nationalité française a été adressée au domicile de M. B...par pli recommandé avec demande d'avis de réception. Ce pli a été présenté et n'a pas été réclamé durant le délai imparti puis a été retourné à l'administration avec la mention " pli avisé et non réclamé ". Dans ces conditions, M.B..., qui ne fait état d'aucun élément précis susceptible de mettre en cause l'acheminement de ce pli par les services postaux, n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas été mis en mesure de présenter ses observations dans les conditions prévues par les dispositions précédemment citées du décret du 30 décembre 1993. Le moyen tiré de ce que le décret attaqué aurait, de ce fait, été pris au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté.

5. En second lieu, il ressort des pièces du dossier qu'il a été constaté que M. B... avait conduit un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique le 14 septembre 2013, fait pour lequel il a été condamné à une peine d'amende et une suspension de son permis de conduire. Le 2 janvier 2016, il a été à nouveau constaté qu'il conduisait un véhicule sous l'empire d'un état alcoolique et qu'il avait commis une dégradation volontaire ayant conduit à un dommage léger. Pour ces derniers faits, il a été condamné par jugement du tribunal correctionnel de Nîmes du 23 mai 2016, notamment à une peine de trois mois d'emprisonnement avec sursis et de suspension du permis de conduire pour récidive de conduite en état d'ivresse manifeste. En se fondant sur ces circonstances pour estimer que M. B...devait être regardé comme indigne d'acquérir la nationalité française, le Premier ministre n'a pas, compte tenu des faits en cause et de leur caractère encore récent à la date du décret attaqué, fait une inexacte application de l'article 21-4 du code civil.

6. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 10 avril 2018 lui refusant l'acquisition de la nationalité française.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 421072
Date de la décision : 30/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 jan. 2019, n° 421072
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Stéphanie Vera
Rapporteur public ?: Mme Sophie Roussel

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:421072.20190130
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