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28/12/2018 | FRANCE | N°410912

France | France, Conseil d'État, 28 décembre 2018, 410912


Vu la procédure suivante :

La société à responsabilité limitée (SARL) Immo-Lorrain et M. B...A...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 2 322 euros procédant d'une mise en demeure valant commandement de payer émise le 19 juillet 2012 à l'encontre de M.A.... La SARL Immo-Lorrain a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme 2 635 euros procédant de la mise en demeure tenant lieu de commandement de payer émise à son encontre le 29 mars 2

013, la somme 146 419,80 euros procédant de la mise en demeure tenant...

Vu la procédure suivante :

La société à responsabilité limitée (SARL) Immo-Lorrain et M. B...A...ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 2 322 euros procédant d'une mise en demeure valant commandement de payer émise le 19 juillet 2012 à l'encontre de M.A.... La SARL Immo-Lorrain a demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme 2 635 euros procédant de la mise en demeure tenant lieu de commandement de payer émise à son encontre le 29 mars 2013, la somme 146 419,80 euros procédant de la mise en demeure tenant lieu de commandement de payer émise à son encontre le 6 mars 2014, ainsi que la somme 918 euros procédant de la mise en demeure tenant lieu de commandement de payer émise à son encontre le 7 avril 2014. Par un jugement n° 1205321, 1303526, 1404643, 1405360 du 5 novembre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ces demandes.

Par un arrêt n° 16NC00004 du 23 mars 2017, la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté l'appel de la SARL Immo-Lorrain et de M. A...contre ce jugement.

Par un pourvoi, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 26 mai 2017, 28 août 2017 et 14 décembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SARL Immo-Lorrain et M. A...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pierre Ramain, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Anne Iljic, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, au Cabinet Briard, avocat de la SARL Immo-Lorrain et de M. B...A...;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, d'une part, par un commandement du 19 juillet 2012, le comptable public du centre des finances publiques de Metz Centre a mis en demeure M. B...A..., gérant de la société à responsabilité limitée (SARL) Immo-Lorrain, de payer, en tant que caution solidaire, la somme de 2 322 euros correspondant à des pénalités d'assiette sur la TVA. D'autre part, par des commandements du 29 mars 2013, du 6 mars 2014 et du 7 avril 2014, le même comptable a mis la SARL Immo-Lorrain en demeure de payer les sommes respectivement de 2 635 euros, de 146 419, 80 euros et de 918 euros. M. A...et la SARL Immo-Lorrain ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 2 322 euros. La SARL Immo-Lorrain a également demandé au même tribunal de prononcer la décharge de l'obligation de payer les sommes de 2 635 euros, 146 419,80 euros et 918 euros. Par jugement du 5 novembre 2015, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ces quatre demandes. M. A...et la SARL Immo-Lorrain se pourvoient en cassation contre l'arrêt du 23 mars 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Nancy a rejeté leur appel contre ce jugement.

2. En premier lieu, contrairement à ce qui est soutenu, la cour a suffisamment motivé son arrêt pour écarter les moyens dirigés contre la régularité du jugement dont il était fait appel.

3. En deuxième lieu, en estimant que l'administration avait tenu compte, dans la détermination de la dette de la société requérante, de la somme totale de 89 752, 36 euros versée par cette dernière entre le 14 septembre 1999 et le 14 décembre 2000, la cour n'a pas dénaturé les pièces qui lui étaient soumises.

4. En dernier lieu, l'article L. 281 du livre des procédures fiscales dispose que : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L. 252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. Les contestations ne peuvent porter que :/ 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ;/ 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt (...) ". Aux termes de l'article R. 281-3-1 du même livre, dans sa rédaction applicable au litige : " La demande prévue à l'article R. 281-1 doit, sous peine d'irrecevabilité, être présentée (...) au directeur départemental des finances publiques (...) dans un délai de deux mois à partir de la notification:/ a) De l'acte de poursuite dont la régularité en la forme est contestée ;/ b) De tout acte de poursuite si le motif invoqué porte sur l'obligation de payer ou le montant de la dette ;/ c) Du premier acte de poursuite permettant d'invoquer tout autre motif ". Aux termes de l'article R. 281-5 du même livre: " Le juge se prononce exclusivement au vu des justifications qui ont été présentées au chef de service. Les redevables qui l'ont saisi ne peuvent ni lui soumettre des pièces justificatives autres que celles qu'ils ont déjà produites à l'appui de leurs mémoires, ni invoquer des faits autres que ceux exposés dans ces mémoires ".

5. Les dispositions citées au point 4 des articles R. 281-3-1 et R. 281-5 du livre des procédures fiscales ne font pas obstacle à ce que le contribuable soulève devant le tribunal administratif ou devant la cour administrative d'appel, jusqu'à la clôture de l'instruction, des moyens de droit nouveaux, n'impliquant pas l'appréciation de pièces justificatives ou de circonstances de fait qu'il lui eût appartenu de produire ou d'exposer dans sa demande au trésorier-payeur général. Si le contribuable ne peut pas, en principe se prévaloir devant le juge d'éléments de fait qui ne figuraient pas dans sa réclamation, il demeure toutefois recevable à invoquer devant lui des éléments de fait nouveaux postérieurs à la décision de l'administration statuant sur sa réclamation et dont il ne pouvait, dès lors, faire état dans cette dernière.

6. Il suit de là qu'en écartant comme irrecevable, faute d'avoir été soulevé dans les mémoires de réclamation, le moyen tiré de ce que l'administration avait imputé, par voie de compensation, un excédent de TVA pour paiement d'une somme dont le recouvrement était recherché par les commandements de payer du 19 juillet 2012 et du 6 mars 2014, alors que les requérants se prévalaient des effets d'un avis de compensation du 25 septembre 2014, postérieur aux décisions de l'administration statuant sur les réclamations des requérants et dont ces derniers ne pouvaient, dès lors, faire état dans leurs réclamations, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Immo-Lorrain et M. A...sont seulement fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent en tant qu'il a statué sur les commandements de payer du 19 juillet 2012 et du 6 mars 2014. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme totale de 1 500 euros à verser à la société Immo-Lorrain et à M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nancy du 23 mars 2017 est annulé en tant qu'il statue sur les commandements de payer du 19 juillet 2012 et du 6 mars 2014.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Nancy.

Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi de la SARL Immo-Lorrain et de M. A...est rejeté.

Article 4 : L'Etat versera à la SARL Immo-Lorrain et à M. A...la somme totale de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la SARL Immo-Lorrain, à M. B...A...et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 410912
Date de la décision : 28/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RECOUVREMENT - CONTENTIEUX - 1) POSSIBILITÉ DE SOULEVER - JUSQU'À LA CLÔTURE DE L'INSTRUCTION - DES MOYENS DE DROIT NOUVEAUX - N'IMPLIQUANT PAS L'APPRÉCIATION DE PIÈCES JUSTIFICATIVES OU DE CIRCONSTANCES DE FAIT - EXISTENCE [RJ1] - 2) POSSIBILITÉ D'INVOQUER DES ÉLÉMENTS DE FAIT NOUVEAUX - POSTÉRIEURS À LA DÉCISION DE L'ADMINISTRATION STATUANT SUR LA RÉCLAMATION ET DONT LE CONTRIBUABLE NE POUVAIT FAIRE ÉTAT DANS CETTE DERNIÈRE - EXISTENCE.

19-01-05 1) Les articles R. 281-3-1 et R. 281-5 du livre des procédures fiscales (LPF) ne font pas obstacle à ce que le contribuable soulève devant le tribunal administratif ou devant la cour administrative d'appel, jusqu'à la clôture de l'instruction, des moyens de droit nouveaux, n'impliquant pas l'appréciation de pièces justificatives ou de circonstances de fait qu'il lui eût appartenu de produire ou d'exposer dans sa demande au trésorier-payeur général.... ...2) Si le contribuable ne peut pas, en principe, se prévaloir devant le juge d'éléments de fait qui ne figuraient pas dans sa réclamation, il demeure toutefois recevable à invoquer devant lui des éléments de fait nouveaux postérieurs à la décision de l'administration statuant sur sa réclamation et dont il ne pouvait, dès lors, faire état dans cette dernière.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - RÈGLES DE PROCÉDURE CONTENTIEUSE SPÉCIALES - QUESTIONS COMMUNES - CONTENTIEUX DU RECOUVREMENT - 1) POSSIBILITÉ DE SOULEVER - JUSQU'À LA CLÔTURE DE L'INSTRUCTION - DES MOYENS DE DROIT NOUVEAUX - N'IMPLIQUANT PAS L'APPRÉCIATION DE PIÈCES JUSTIFICATIVES OU DE CIRCONSTANCES DE FAIT - EXISTENCE [RJ1] - 2) POSSIBILITÉ D'INVOQUER DES ÉLÉMENTS DE FAIT NOUVEAUX - POSTÉRIEURS À LA DÉCISION DE L'ADMINISTRATION STATUANT SUR LA RÉCLAMATION ET DONT LE CONTRIBUABLE NE POUVAIT FAIRE ÉTAT DANS CETTE DERNIÈRE - EXISTENCE.

19-02-01 1) Les articles R. 281-3-1 et R. 281-5 du livre des procédures fiscales (LPF) ne font pas obstacle à ce que le contribuable soulève devant le tribunal administratif ou devant la cour administrative d'appel, jusqu'à la clôture de l'instruction, des moyens de droit nouveaux, n'impliquant pas l'appréciation de pièces justificatives ou de circonstances de fait qu'il lui eût appartenu de produire ou d'exposer dans sa demande au trésorier-payeur général.... ...2) Si le contribuable ne peut pas, en principe se prévaloir devant le juge d'éléments de fait qui ne figuraient pas dans sa réclamation, il demeure toutefois recevable à invoquer devant lui des éléments de fait nouveaux postérieurs à la décision de l'administration statuant sur sa réclamation et dont il ne pouvait, dès lors, faire état dans cette dernière.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 17 mars 1999,,, n° 163929, p. 71 ;

CE, 27 novembre 2000, Ministre de l'économie, des finances et de l'industrie c/ SARL Etablissements Viz, n° 197915, p. 564.

Rappr. Cass. com., 9 décembre 2014, Société Conception bureautique et organisation du travail (CBOT) c/ Service des impôts des particuliers de Paris 8e, n° 13-24.365, Bull. 2014, IV, n° 182.


Publications
Proposition de citation : CE, 28 déc. 2018, n° 410912
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur public ?: Mme Anne Iljic
Avocat(s) : CABINET BRIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:410912.20181228
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