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26/12/2018 | FRANCE | N°421809

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 26 décembre 2018, 421809


Vu la procédure suivante :

La société civile immobilière Château de Fleurac en Périgord a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2009 au 30 septembre 2011. Par un jugement n° 1401702 du 17 décembre 2015, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 16BX00594 du 27 avril 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur appel de la SCI Château de Fleurac en Périgord, annulé ce jugement e

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Vu la procédure suivante :

La société civile immobilière Château de Fleurac en Périgord a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités correspondantes qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 2009 au 30 septembre 2011. Par un jugement n° 1401702 du 17 décembre 2015, le tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 16BX00594 du 27 avril 2018, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur appel de la SCI Château de Fleurac en Périgord, annulé ce jugement et accordé à la société la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige.

Par un pourvoi, enregistré le 27 juin 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'action et des comptes publics demande au Conseil d'Etat d'annuler cet arrêt.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Domingo, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SCI Château de Fleurac en Périgord.

Considérant ce qui suit :

1. Par une proposition de rectification du 26 juillet 2012, l'administration a notifié à la SCI Château de Fleurac en Périgord des rappels de taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2009 au 30 septembre 2011, assortis de pénalités pour manquement délibéré. Par un jugement du 17 décembre 2015, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de la société tendant à la décharge de ces impositions supplémentaires. La cour administrative d'appel de Bordeaux, par un arrêt du 27 avril 2018, a, sur appel de la SCI Château de Fleurac en Périgord, annulé ce jugement et accordé à la société la décharge des rappels en litige et des pénalités correspondantes.

2. Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales, dans sa version alors applicable : " Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration ".

3. La charte des droits et obligations du contribuable vérifié énonçait dans son ancienne rédaction que le contribuable pouvait " faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur ". Cette charte indique dorénavant, dans sa version remise à la société requérante, que le contribuable peut " faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur ". Elle assure ainsi au contribuable, dans ses deux versions successives qui ont la même portée, le respect de la même garantie substantielle, qui tient à ce qu'il puisse obtenir, avant la clôture de la procédure de redressement, un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur, puis, le cas échéant, dans un second temps, avec un fonctionnaire de l'administration fiscale de rang plus élevé que ce dernier, au regard de sa position dans la hiérarchie de cette administration et des fonctions qu'il y exerce, et indépendamment de leur grade respectif.

4. La cour a relevé qu'après avoir formé sans succès un recours hiérarchique auprès de l'inspecteur principal, chef de la brigade de contrôle à laquelle appartenait le vérificateur, la SCI Château de Fleurac en Périgord avait sollicité une rencontre avec l'interlocuteur départemental. Elle a également relevé que si l'avis de vérification de comptabilité reçu par la contribuable mentionnait que l'interlocuteur départemental était Mme A..., administratrice des finances publiques adjointe, le représentant de la société avait été reçu, à ce titre, par M. B...C..., inspecteur divisionnaire et chef de la division du contrôle fiscal et du contentieux de la direction départementale des finances publiques de la Dordogne, désigné comme interlocuteur départemental par décision du directeur départemental des finances publiques en cas d'absence ou d'empêchement de Mme A.... En se fondant, pour estimer que la SCI Château de Fleurac en Périgord avait été privée de la garantie prévue par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, sur ce que M. C...ne pouvait être regardé comme ayant eu un rang suffisant pour assurer les fonctions d'interlocuteur départemental, au sens des prescriptions citées au point 3, alors que les fonctions qu'il exerçait au sein de la direction départementale des finances publiques de la Dordogne, indépendamment de son grade, le plaçaient à un rang hiérarchique plus élevé que le chef de brigade et l'habilitaient à exercer l'interlocution départementale, la cour a entaché son arrêt d'une erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que le ministre de l'action et des comptes public est fondé à demander l'annulation de l'arrêt qu'il attaque.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt n° 16BX00594 du 27 avril 2018 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : Les conclusions présentées par la SCI Château de Fleurac en Périgord au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'action et des comptes publics et à la société civile immobilière Château de Fleurac en Périgord.


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 421809
Date de la décision : 26/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - CONTRÔLE FISCAL - VÉRIFICATION DE COMPTABILITÉ - GARANTIES ACCORDÉES AU CONTRIBUABLE - RECOURS À L'INTERLOCUTEUR DÉPARTEMENTAL (ART - L - 10 DU LPF ET CHARTE DES DROITS ET OBLIGATIONS DU CONTRIBUABLE VÉRIFIÉ) - 1) PORTÉE - POSSIBILITÉ D'OBTENIR UN DÉBAT AVEC UN FONCTIONNAIRE DE L'ADMINISTRATION FISCALE DE RANG PLUS ÉLEVÉ QUE LE SUPÉRIEUR HIÉRARCHIQUE DU VÉRIFICATEUR - CRITÈRES D'APPRÉCIATION DU RANG PLUS ÉLEVÉ - GRADE RESPECTIF DES DEUX AGENTS - ABSENCE - POSITION DE L'INTERLOCUTEUR DÉPARTEMENTAL DANS LA HIÉRARCHIE DE CETTE ADMINISTRATION - EXISTENCE - 2) ESPÈCE.

19-01-03-01-02-03 1) La charte des droits et obligations du contribuable vérifié énonçait dans son ancienne rédaction que le contribuable pouvait faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur. Cette charte indique dorénavant, dans sa version remise à la société requérante, que le contribuable peut faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur. Elle assure ainsi au contribuable, dans ses deux versions successives qui ont la même portée, le respect de la même garantie substantielle, qui tient à ce qu'il puisse obtenir, avant la clôture de la procédure de redressement, un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur, puis, le cas échéant, dans un second temps, avec un fonctionnaire de l'administration fiscale de rang plus élevé que ce dernier, au regard de sa position dans la hiérarchie de cette administration et des fonctions qu'il y exerce, et indépendamment de leur grade respectif.... ...2) Société requérante sollicitant une rencontre avec l'interlocuteur départemental. Représentant de la société reçu, à ce titre, par un inspecteur divisionnaire et chef de la division du contrôle fiscal et du contentieux d'une direction départementale des finances publiques. En se fondant, pour estimer que la société requérante a été privée de la garantie prévue par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, sur ce que cet agent ne peut être regardé comme ayant eu un rang suffisant pour assurer les fonctions d'interlocuteur départemental alors que les fonctions qu'il exerçait au sein de la direction départementale des finances publiques, indépendamment de son grade, le plaçaient à un rang hiérarchique plus élevé que le chef de brigade et l'habilitent à exercer l'interlocution départementale, la cour entache son arrêt d'une erreur de droit.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - RÈGLES GÉNÉRALES D'ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - CONTRÔLE FISCAL - RECOURS À L'INTERLOCUTEUR DÉPARTEMENTAL - 1) PORTÉE - POSSIBILITÉ D'OBTENIR UN DÉBAT AVEC UN FONCTIONNAIRE DE L'ADMINISTRATION FISCALE DE RANG PLUS ÉLEVÉ QUE LE SUPÉRIEUR HIÉRARCHIQUE DU VÉRIFICATEUR - CRITÈRES D'APPRÉCIATION DU RANG PLUS ÉLEVÉ - GRADE RESPECTIF DES DEUX AGENTS - ABSENCE - POSITION DE L'INTERLOCUTEUR DÉPARTEMENTAL DANS LA HIÉRARCHIE DE CETTE ADMINISTRATION - EXISTENCE - 2) ESPÈCE.

19-01-03-01-04 1) La charte des droits et obligations du contribuable vérifié énonçait dans son ancienne rédaction que le contribuable pouvait faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire de rang élevé spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur. Cette charte indique dorénavant, dans sa version remise à la société requérante, que le contribuable peut faire appel à l'interlocuteur départemental qui est un fonctionnaire spécialement désigné par le directeur dont dépend le vérificateur. Elle assure ainsi au contribuable, dans ses deux versions successives qui ont la même portée, le respect de la même garantie substantielle, qui tient à ce qu'il puisse obtenir, avant la clôture de la procédure de redressement, un débat avec le supérieur hiérarchique du vérificateur, puis, le cas échéant, dans un second temps, avec un fonctionnaire de l'administration fiscale de rang plus élevé que ce dernier, au regard de sa position dans la hiérarchie de cette administration et des fonctions qu'il y exerce, et indépendamment de leur grade respectif.... ...2) Société requérante sollicitant une rencontre avec l'interlocuteur départemental. Représentant de la société reçu, à ce titre, par un inspecteur divisionnaire et chef de la division du contrôle fiscal et du contentieux d'une direction départementale des finances publiques. En se fondant, pour estimer que la société requérante a été privée de la garantie prévue par la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, sur ce que cet agent ne peut être regardé comme ayant eu un rang suffisant pour assurer les fonctions d'interlocuteur départemental alors que les fonctions qu'il exerçait au sein de la direction départementale des finances publiques, indépendamment de son grade, le plaçaient à un rang hiérarchique plus élevé que le chef de brigade et l'habilitent à exercer l'interlocution départementale, la cour entache son arrêt d'une erreur de droit.


Publications
Proposition de citation : CE, 26 déc. 2018, n° 421809
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Laurent Domingo
Rapporteur public ?: Mme Karin Ciavaldini
Avocat(s) : SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:421809.20181226
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