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07/12/2018 | FRANCE | N°409229

France | France, Conseil d'État, 3ème - 8ème chambres réunies, 07 décembre 2018, 409229


Vu la procédure suivante :

La Société Générale a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles sa filiale, la société Orpavimob, a été assujettie au titre des exercices clos en 2006 et 2007 et, d'autre part, le rétablissement des déficits que celle-ci a déclarés au titre des exercices clos en 2008 et 2009. Par deux jugements n° 1202270 du 14 octobre 2014 et n° 1300881 du 9 février 2015, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses demandes.

Par un arrêt n°

14VE03453, 15VE01063 du 26 janvier 2017, la cour administrative d'appel de Versaill...

Vu la procédure suivante :

La Société Générale a demandé au tribunal administratif de Montreuil, d'une part, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles sa filiale, la société Orpavimob, a été assujettie au titre des exercices clos en 2006 et 2007 et, d'autre part, le rétablissement des déficits que celle-ci a déclarés au titre des exercices clos en 2008 et 2009. Par deux jugements n° 1202270 du 14 octobre 2014 et n° 1300881 du 9 février 2015, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté ses demandes.

Par un arrêt n° 14VE03453, 15VE01063 du 26 janvier 2017, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté les appels formés par la société contre ces jugements.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 24 mars, 23 juin et 13 novembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Société Générale demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses appels ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention entre la France et la Belgique, tendant à éviter les doubles impositions et à établir les règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur les revenus, signée à Bruxelles le 10 mars 1964 ;

- la convention entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume des Pays-Bas tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune, signée à Paris le 16 mars 1973 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Anne Egerszegi, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de la Société Générale ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 novembre 2018, présentée par la Société Générale ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite de vérifications de comptabilité de la société Orpavimob, qui a pour activité le rachat de créances immobilières et appartient au groupe fiscal intégré dont la Société Générale est la société tête de groupe, l'administration fiscale a procédé à la réintégration, dans les résultats de la société vérifiée, des revenus et plus-values qu'elle avait perçus à la suite d'opérations en rapport avec des immeubles situés en Belgique et aux Pays-Bas et qu'elle avait estimés non-imposables en France. La Société Générale a demandé au tribunal administratif de Montreuil la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la société Orpavimob a été assujettie au titre des exercices clos en 2006 et 2007 ainsi que le rétablissement des déficits déclarés au titre des exercices clos en 2008 et 2009 qui avaient été réduits à la suite de ces rectifications. Par jugements du 14 octobre 2014 et du 9 février 2015, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté les demandes de la Société Générale. Celle-ci demande l'annulation de l'arrêt du 26 janvier 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté les appels qu'elle a formés contre ces jugements.

Sur le bien-fondé de l'arrêt en tant qu'il porte sur l'application de la loi fiscale nationale :

2. En affirmant qu'en l'espèce, les droits et obligations attachés à une location, ordinaire ou emphytéotique, de bien immobilier relevaient des mêmes qualifications et présentaient les mêmes caractéristiques en droits civils belge, néerlandais et français et en retenant qu'il n'y avait pas lieu, dès lors, pour les premiers juges, de procéder une assimilation des opérations de droit belge et néerlandais à des opérations équivalentes en droit français, la cour, qui a suffisamment motivé son arrêt sur ce point, n'a, en tout état de cause, pas commis d'erreur de droit. La méconnaissance, également invoquée par la société requérante, de l'article 209 du code général des impôts n'est, quant à elle, pas assortie des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé.

Sur le bien-fondé de l'arrêt en tant qu'il porte sur l'application des conventions fiscales bilatérales :

En ce qui concerne la convention fiscale franco-belge :

3. Aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention fiscale signée le 10 mars 1964 entre la France et la Belgique : " 1. Les revenus provenant des biens immobiliers, y compris les accessoires (...) ne sont imposables que dans l'Etat contractant où ces biens sont situés. / 2. La notion de bien immobilier se détermine d'après les lois de l'Etat contractant où est situé le bien considéré. / 3. Les droits auxquels s'appliquent les dispositions du droit privé concernant la propriété foncière, les droits d'usufruit sur les biens immobiliers (...) sont considérés comme des biens immobiliers au sens du présent article. / 4. Les dispositions des paragraphes 1 à 3 s'appliquent aux revenus procurés par l'exploitation directe, par la location (...), ainsi que par toute autre forme d'exploitation de biens immobiliers (...). Elles s'appliquent également aux bénéfices résultant de l'aliénation de biens immobiliers ". Aux termes du 2 du B de l'article 19 de cette même convention : " Les revenus (...) sont exonérés des impôts français (...) lorsque l'imposition en est attribuée exclusivement à la Belgique ".

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Orpavimob a acquis les créances détenues par des sociétés immobilières de droit belge sur la Commission européenne à raison de baux emphytéotiques que cette dernière avait conclus avec ces sociétés pour des immeubles situés à Bruxelles. A ce titre, la société Orpavimob a perçu, en lieu et place des sociétés bailleresses, les canons annuels versés par la Commission européenne. La société Orpavimob a également procédé à la cession d'une partie de ces créances, dont elle a retiré des plus-values. Estimant que tant les revenus tirés des créances acquises, correspondant à la différence entre le montant des canons annuels perçus et l'amortissement annuel des créances acquises, que les plus-values de cession réalisées n'étaient imposables qu'en Belgique en vertu de l'article 3 de la convention fiscale franco-belge dès lors qu'ils se rattachaient à des immeubles situés dans cet Etat, la société a exclu de ses résultats imposables en France les montants correspondants. L'administration fiscale a remis en cause cette analyse et réintégré les sommes en litige dans les résultats imposables de la société au titre des exercices vérifiés.

5. Pour écarter le moyen tiré de ce que les stipulations de l'article 3 et du paragraphe 2 du B de l'article 19 de la convention fiscale franco-belge faisaient obstacle à l'imposition en France des revenus de créances et des plus-values perçus par la société Orpavimob, la cour a notamment relevé qu'alors même que les canons d'emphytéose étaient des revenus de biens immobiliers tant en droit civil belge qu'en droit civil français, l'acquisition du droit de les encaisser était sans effet sur les droits réels sur l'immeuble détenus par les sociétés bailleresses, alors même que celles-ci ne s'engageaient pas à garantir la société Orpavimob contre l'insolvabilité de la Commission européenne. Par suite, la cour a pu, sans commettre d'erreur de droit ni insuffisamment motiver son arrêt, en déduire que le gain dont avait bénéficié la société Orpavimob en rémunération du financement octroyé aux sociétés bailleresses ne pouvait être regardé comme un revenu provenant de l'exploitation de biens immobiliers entrant dans le champ de l'article 3 de la convention fiscale franco-belge.

En ce qui concerne la convention fiscale franco-néerlandaise :

6. Aux termes de l'article 6 de la convention fiscale signée le 16 mars 1973 entre la France et les Pays-Bas : " 1. Les revenus provenant de biens immobiliers y compris les revenus des exploitations agricoles ou forestières sont imposables dans l'Etat où ces biens sont situés. / 2. L'expression " biens immobiliers " est définie conformément au droit de l'Etat où les biens considérés sont situés. (...) / 3. La disposition du paragraphe 1 s'applique aux revenus provenant de l'exploitation directe, de la location ou de l'affermage, ainsi que de toute autre forme d'exploitation de biens immobiliers. / 4. Les dispositions des paragraphes 1 et 3 s'appliquent également aux revenus provenant des biens immobiliers d'une entreprise (...) ". Aux termes de l'article 24 de cette convention : " Il est entendu que la double imposition sera évitée de la façon suivante : (...) B. En ce qui concerne la France : a) Les revenus autres que ceux visés à l'alinéa b) ci-dessous sont exonérés des impôts français visés à l'article 2 paragraphe 3, alinéa b) lorsque ces revenus sont imposables aux Pays-Bas en vertu de la présente Convention (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Orpavimob a conclu avec des filiales du groupe ING établies aux Pays-Bas deux contrats le 14 février 2007 dans le cadre d'une opération dite de " lease and lease-back ". En vertu du premier contrat, elle a pris à bail des immeubles situés aux Pays-Bas dont les filiales du groupe ING étaient propriétaires, moyennant un versement initial, ou " prime initiale ", d'un montant de 403 978 432 euros, représentant la quasi-totalité des loyers, et l'engagement de verser un reliquat annuel de 100 euros par immeuble. En vertu du second contrat, elle a sous-loué ces immeubles à ces filiales du groupe ING, pour les mêmes durées, moyennant le versement d'un loyer annuel d'un montant de 24 414 046 euros. A la fin de l'année 2007, les filiales du groupe ING ont cédé certains des immeubles en cause. Elles ont alors remboursé à la société Orpavimob une partie de la prime initiale acquittée par celle-ci au titre du premier contrat de location et lui ont versé une indemnité de résiliation anticipée. Estimant que le produit net résultant de ces deux opérations et correspondant à la différence entre, d'une part, le montant des sous-loyers versés par les filiales du groupe ING et les sommes versées par ces mêmes filiales lors de la cession des immeubles et, d'autre part, le montant de la prime initiale, étalée sur la durée des contrats de location, et les loyers résiduels acquittés par la société Orpavimob, n'étaient imposables qu'aux Pays-Bas en vertu de l'article 6 et du a) du paragraphe B de l'article 24 de la convention fiscale franco-néerlandaise dès lors que les sommes en cause avaient un lien avec des immeubles situés dans cet Etat, la société a exclu de ses résultats imposables en France le montant correspondant. L'administration fiscale a remis en cause cette analyse et réintégré ce montant dans le résultat imposable de la société au titre de l'exercice clos en 2007.

8. Pour écarter le moyen tiré de ce qu'au regard des stipulations de l'article 6 de la convention fiscale franco-néerlandaise, les sommes litigieuses devaient être regardées comme des revenus provenant de biens immobiliers, la cour a relevé, en premier lieu, que la conclusion du contrat de location était subordonnée à celle du contrat de sous-location à des conditions prédéfinies, s'agissant de l'identité des preneurs, du prix et de la durée, en deuxième lieu, que ces contrats ne laissaient pas la possibilité de sous-louer l'immeuble à une entité autre qu'à des filiales du groupe ING tandis que ces dernières pouvaient demander à la société Orpavimob de leur transférer les droits et obligations nés des contrats de location, en troisième lieu, que les autorités fiscales néerlandaises, saisies dans le cadre d'une demande d'assistance administrative, avaient analysé l'opération litigieuse comme une transaction de financement, sans transfert d'immeubles ni de droits immobiliers, et qu'en quatrième lieu, il n'était pas contesté que les filiales du groupe ING avaient enregistré les sommes versées à la société Orpavimob dans leurs comptes comme des paiements d'intérêt et des remboursements.

9. En premier lieu, contrairement à ce que soutient la société requérante, la cour ne s'est pas fondée exclusivement, pour écarter la qualification de revenus provenant de biens immobiliers, sur les modalités de traitement des sommes en litige par les filiales du groupe ING au regard du droit comptable néerlandais. Le moyen tiré de l'erreur de droit qu'elle aurait commise, ce faisant, ne peut donc qu'être écarté.

10. En deuxième lieu, en relevant que les contrats de location et de sous-location étaient indissociablement liés et en en déduisant qu'alors même que des droits immobiliers avaient été transférés à la société Orpavimob par des filiales du groupe ING, la société Orpavimob n'était pas en situation de les exploiter de manière effective, la cour s'est livrée à une appréciation souveraine des pièces du dossier sans les dénaturer. La Société Générale ne peut, en tout état de cause, utilement invoquer, à cet égard, pour la première fois en cassation, la clause 6.4 du contrat dénommé " Participation Agreement ", également conclu le 14 février 2007 mais qui n'avait pas été produit devant les juges du fond.

11. En troisième lieu, après avoir estimé, au vu de l'ensemble des constatations exposées au point 8, que les opérations réalisées entre la société Orpavimob et les filiales du groupe ING devaient être analysées comme une opération unique de financement dépourvue de lien avec l'exploitation effective de biens immobiliers, la cour a pu en déduire, sans commettre d'erreur de droit, que les revenus retirés de ces opérations ne relevaient pas de ceux qui entrent dans le champ d'application de l'article 6 de la convention fiscale franco-néerlandaise.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la Société Générale n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi présenté par la Société Générale est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Société Générale et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 3ème - 8ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 409229
Date de la décision : 07/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - GÉNÉRALITÉS - TEXTES FISCAUX - CONVENTIONS INTERNATIONALES - 1) CONVENTION FISCALE FRANCO-BELGE DU 10 MARS 1964 - REVENUS IMMOBILIERS (ART - 3) - ACQUISITION DE CRÉANCES CORRESPONDANT À DES LOYERS (CANONS) À PERCEVOIR - REVENUS TIRÉS DE CES CRÉANCES ET PLUS-VALUES TIRÉES DE LA CESSION DE CERTAINES D'ENTRE ELLES - EXCLUSION - CONSÉQUENCE - OBSTACLE POSÉ PAR L'ARTICLE 3 DE LA CONVENTION À LEUR RÉINTÉGRATION DANS LES BÉNÉFICES IMPOSABLES EN FRANCE - ABSENCE - 2) CONVENTION FISCALE FRANCO-NÉERLANDAISE DU 16 MARS 1973 - REVENUS IMMOBILIERS (ART - 6) - REVENUS TIRÉS D'UNE OPÉRATION DITE DE LEASE AND LEASE-BACK - EXCLUSION - CONSÉQUENCE - OBSTACLE POSÉ PAR L'ARTICLE 6 DE LA CONVENTION À LEUR RÉINTÉGRATION DANS LES BÉNÉFICES IMPOSABLES EN FRANCE - ABSENCE [RJ1].

19-01-01-05 1) Pour écarter le moyen tiré de ce que les stipulations de l'article 3 et du paragraphe 2 du B de l'article 19 de la convention fiscale franco-belge du 10 mars 1964 faisaient obstacle à l'imposition en France des revenus de créances et des plus-values perçus par la société requérante, la cour a notamment relevé qu'alors même que les canons d'emphytéose étaient des revenus de biens immobiliers tant en droit civil belge qu'en droit civil français, l'acquisition du droit de les encaisser était sans effet sur les droits réels sur l'immeuble détenus par les sociétés bailleresses, alors même que celles-ci ne s'engageaient pas à garantir la société requérante contre l'insolvabilité de l'emphytéote. Par suite, la cour a pu, sans commettre d'erreur de droit ni insuffisamment motiver son arrêt, en déduire que le gain dont avait bénéficié la société requérante en rémunération du financement octroyé aux sociétés bailleresses ne pouvait être regardé comme un revenu provenant de l'exploitation de biens immobiliers entrant dans le champ de l'article 3 de la convention fiscale franco-belge.,,2) Société requérante ayant conclu deux contrats avec des sociétés établies aux Pays-Pas dans le cadre d'une opération dite de lease and lease-back. En vertu du premier contrat, société requérante prenant à bail des immeubles situés aux Pays-Bas dont les sociétés cocontractantes étaient propriétaires, moyennant un versement initial représentant la quasi-totalité des loyers et l'engagement de verser un reliquat annuel par immeuble. En vertu du second contrat, société requérante sous-louant ces immeubles à ces mêmes sociétés, pour les mêmes durées, moyennant le versement d'un loyer annuel. Sociétés cocontractantes cédant certains des immeubles en cause, et remboursant en conséquence à la société requérante une partie de la prime initiale acquittée par celle-ci au titre du premier contrat de location et lui versant une indemnité de résiliation anticipée. Produit net résultant de ces deux opérations correspondant à la différence entre, d'une part, le montant des sous-loyers perçus et des sommes versées lors de la cession des immeubles par les sociétés cocontractantes et, d'autre part, le montant de la prime initiale, étalée sur la durée des contrats de location, et les loyers résiduels acquittés par la société requérante,,La cour a relevé, en premier lieu, que la conclusion du contrat de location était subordonnée à celle du contrat de sous-location à des conditions prédéfinies, s'agissant de l'identité des preneurs, du prix et de la durée, en deuxième lieu, que ces contrats ne laissaient pas la possibilité de sous-louer l'immeuble à une entité autre qu'aux sociétés cocontractantes tandis que ces dernières pouvaient demander à la société requérante de leur transférer les droits et obligations nés des contrats de location, en troisième lieu, que les autorités fiscales néerlandaises, saisies dans le cadre d'une demande d'assistance administrative, avaient analysé l'opération litigieuse comme une transaction de financement, sans transfert d'immeubles ni de droits immobiliers, et qu'en quatrième lieu, il n'était pas contesté que les sociétés cocontractantes avaient enregistré les sommes versées à la société requérante dans leurs comptes comme des paiements d'intérêt et des remboursements. Par suite, absence d'erreur de droit à avoir écarté le moyen tiré de ce qu'au regard des stipulations de l'article 6 de la convention fiscale franco-néerlandaise du 16 mars 1973, les sommes litigieuses devaient être regardées comme des revenus provenant de biens immobiliers.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES - RÈGLES GÉNÉRALES - IMPÔT SUR LES BÉNÉFICES DES SOCIÉTÉS ET AUTRES PERSONNES MORALES - PERSONNES MORALES ET BÉNÉFICES IMPOSABLES - 1) ACQUISITION DE CRÉANCES CORRESPONDANT À DES LOYERS (CANONS) À PERCEVOIR - REVENUS TIRÉS DE CES CRÉANCES ET PLUS-VALUES TIRÉES DE LA CESSION DE CERTAINES D'ENTRE ELLES - REVENUS IMMOBILIERS AU SENS DE L'ARTICLE 3 DE LA CONVENTION FISCALE FRANCO-BELGE DU 10 MARS 1964 - EXCLUSION - CONSÉQUENCE - OBSTACLE POSÉ PAR L'ARTICLE 3 DE LA CONVENTION À LEUR RÉINTÉGRATION DANS LES BÉNÉFICES IMPOSABLES EN FRANCE - ABSENCE - 2) REVENUS TIRÉS D'UNE OPÉRATION DITE DE LEASE AND LEASE-BACK - REVENUS IMMOBILIERS AU SENS DE LA L'ARTICLE 6 DE LA CONVENTION FISCALE FRANCO-NÉERLANDAISE DU 16 MARS 1973 - EXCLUSION - CONSÉQUENCE - OBSTACLE POSÉ PAR L'ARTICLE 6 DE LA CONVENTION À LEUR RÉINTÉGRATION DANS LES BÉNÉFICES IMPOSABLES EN FRANCE - ABSENCE [RJ1].

19-04-01-04-01 1) Pour écarter le moyen tiré de ce que les stipulations de l'article 3 et du paragraphe 2 du B de l'article 19 de la convention fiscale franco-belge du 10 mars 1964 faisaient obstacle à l'imposition en France des revenus de créances et des plus-values perçus par la société requérante, la cour a notamment relevé qu'alors même que les canons d'emphytéose étaient des revenus de biens immobiliers tant en droit civil belge qu'en droit civil français, l'acquisition du droit de les encaisser était sans effet sur les droits réels sur l'immeuble détenus par les sociétés bailleresses, alors même que celles-ci ne s'engageaient pas à garantir la société requérante contre l'insolvabilité de l'emphytéote. Par suite, la cour a pu, sans commettre d'erreur de droit ni insuffisamment motiver son arrêt, en déduire que le gain dont avait bénéficié la société requérante en rémunération du financement octroyé aux sociétés bailleresses ne pouvait être regardé comme un revenu provenant de l'exploitation de biens immobiliers entrant dans le champ de l'article 3 de la convention fiscale franco-belge.,,2) Société requérante ayant conclu deux contrats avec des sociétés établies aux Pays-Pas dans le cadre d'une opération dite de lease and lease-back. En vertu du premier contrat, société requérante prenant à bail des immeubles situés aux Pays-Bas dont les sociétés cocontractantes étaient propriétaires, moyennant un versement initial représentant la quasi-totalité des loyers et l'engagement de verser un reliquat annuel par immeuble. En vertu du second contrat, société requérante sous-louant ces immeubles à ces mêmes sociétés, pour les mêmes durées, moyennant le versement d'un loyer annuel. Sociétés cocontractantes cédant certains des immeubles en cause, et remboursant en conséquence à la société requérante une partie de la prime initiale acquittée par celle-ci au titre du premier contrat de location et lui versant une indemnité de résiliation anticipée. Produit net résultant de ces deux opérations correspondant à la différence entre, d'une part, le montant des sous-loyers perçus et des sommes versées lors de la cession des immeubles par les sociétés cocontractantes et, d'autre part, le montant de la prime initiale, étalée sur la durée des contrats de location, et les loyers résiduels acquittés par la société requérante,,La cour a relevé, en premier lieu, que la conclusion du contrat de location était subordonnée à celle du contrat de sous-location à des conditions prédéfinies, s'agissant de l'identité des preneurs, du prix et de la durée, en deuxième lieu, que ces contrats ne laissaient pas la possibilité de sous-louer l'immeuble à une entité autre qu'aux sociétés cocontractantes tandis que ces dernières pouvaient demander à la société requérante de leur transférer les droits et obligations nés des contrats de location, en troisième lieu, que les autorités fiscales néerlandaises, saisies dans le cadre d'une demande d'assistance administrative, avaient analysé l'opération litigieuse comme une transaction de financement, sans transfert d'immeubles ni de droits immobiliers, et qu'en quatrième lieu, il n'était pas contesté que les sociétés cocontractantes avaient enregistré les sommes versées à la société requérante dans leurs comptes comme des paiements d'intérêt et des remboursements. Par suite, absence d'erreur de droit à avoir écarté le moyen tiré de ce qu'au regard des stipulations de l'article 6 de la convention fiscale franco-néerlandaise du 16 mars 1973, les sommes litigieuses devaient être regardées comme des revenus provenant de biens immobiliers.


Références :

[RJ1]

Rappr., sur la notion de revenus immobiliers au sens d'une telle convention, CE, 1er octobre 2013, Société BNP Paris, n° 351982, T. pp. 532-552. Comp. sur cette même notion, CE, 12 mars 2014, Société DGFP Zeta, n° 352212, T. pp. 598-633.


Publications
Proposition de citation : CE, 07 déc. 2018, n° 409229
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Anne Egerszegi
Rapporteur public ?: M. Vincent Daumas
Avocat(s) : SCP SPINOSI, SUREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 06/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:409229.20181207
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