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24/10/2018 | FRANCE | N°419929

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 24 octobre 2018, 419929


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 17 avril et 3 juillet 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Tous pour l'inclusion et Mme A... B...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir les énonciations du paragraphe 147 des commentaires administratifs publiés le 3 février 2016 au Bulletin officiel des finances publiques - impôts sous la référence BOI-BNC-CHAMP-10-30-10 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les énonciations du paragraphe 60 des commentaires admini

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Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 17 avril et 3 juillet 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Tous pour l'inclusion et Mme A... B...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir les énonciations du paragraphe 147 des commentaires administratifs publiés le 3 février 2016 au Bulletin officiel des finances publiques - impôts sous la référence BOI-BNC-CHAMP-10-30-10 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les énonciations du paragraphe 60 des commentaires administratifs publiés le 6 mars 2014 au Bulletin officiel des finances publiques - impôts sous la référence BOI-RSA-CHAMP-10-10-20 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros, à leur verser solidairement, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Gariazzo, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction issue de l'article 12 de la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, applicable à la date de publication des commentaires attaqués : " I.- Toute personne handicapée résidant de façon stable et régulière en France métropolitaine (...), dont l'âge est inférieur à une limite fixée par décret et dont le handicap répond à des critères définis par décret (...), a droit à une prestation de compensation qui a le caractère d'une prestation en nature qui peut être versée, selon le choix du bénéficiaire, en nature ou en espèces (...) ". Aux termes de l'article L. 245-3 du même code : " La prestation de compensation peut être affectée, dans des conditions définies par décret, à des charges : / 1° Liées à un besoin d'aides humaines, y compris, le cas échéant, celles apportées par les aidants familiaux ". Aux termes de l'article L. 245-12 du même code : " L'élément mentionné au 1° de l'article L. 245-3 peut être employé, selon le choix de la personne handicapée, à rémunérer directement un ou plusieurs salariés, notamment un membre de la famille dans les conditions prévues au deuxième alinéa du présent article, ou à rémunérer un service prestataire d'aide à domicile, ainsi qu'à dédommager un aidant familial qui n'a pas de lien de subordination avec la personne handicapée au sens du chapitre Ier du titre II du livre Ier du code du travail. / La personne handicapée remplissant des conditions fixées par décret peut employer un ou plusieurs membres de sa famille, y compris son conjoint, son concubin ou la personne avec qui elle a conclu un pacte civil de solidarité dans des conditions fixées par décret. / Lorsqu'elle choisit de rémunérer directement un ou plusieurs salariés, la personne handicapée peut désigner un organisme mandataire agréé (...). La personne handicapée reste l'employeur légal. ". Aux termes de l'article R. 245-7 du même code : " Est considéré comme un aidant familial, pour l'application de l'article L. 245-12, le conjoint, le concubin, la personne avec laquelle la personne handicapée a conclu un pacte civil de solidarité, l'ascendant, le descendant ou le collatéral jusqu'au quatrième degré de la personne handicapée, ou l'ascendant, le descendant ou le collatéral jusqu'au quatrième degré de l'autre membre du couple qui apporte l'aide humaine définie en application des dispositions de l'article L. 245-3 du présent code et qui n'est pas salarié pour cette aide. / Lorsque la prestation est accordée au titre du 1° du III de l'article L. 245-1, est également considéré comme aidant familial, dès lors qu'il remplit les conditions mentionnées à l'alinéa précédent, le conjoint, le concubin ou la personne avec laquelle un parent de l'enfant handicapé a conclu un pacte civil de solidarité ainsi que toute personne qui réside avec la personne handicapée et qui entretient des liens étroits et stables avec elle ".

2. Aux termes de l'article 81 du code général des impôts dans sa rédaction issue du IV de l'article 12 de la loi du 11 février 2005 mentionnée ci-dessus : " Sont affranchis de l'impôt : / (...) 9° ter La prestation de compensation servie en vertu des dispositions de l'article L. 245-1 du code de l'action sociale et des familles ". Aux termes du 1 de l'article 92 du même code : " Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus ".

3. Le paragraphe n° 60 des commentaires administratifs publiés le 6 mars 2014 au Bulletin officiel des finances publiques - impôts sous la référence BOI-RSA-CHAMP-10-10-20 énonce que : " Les sommes perçues par les aidants familiaux salariés de la personne handicapée sont imposables selon les règles de droit commun des traitements et salaires. / En revanche, s'il s'agit d'un aidant familial, au sens de l'article R. 245-7 du code de l'action sociale et des familles, qui n'est pas salarié pour cette aide, les sommes perçues relèvent de la catégorie des bénéfices non commerciaux (BOI-BNC-CHAMP-10-30-10) ". Sous cette dernière référence et sous l'intitulé " b. Situation fiscale des aidants familiaux ", les commentaires administratifs publiés le 3 février 2016, qui distinguent entre les deux situations prévues au premier alinéa précité de l'article L. 245-12 du code de l'action sociale et des familles, selon que la personne handicapée emploie un membre de sa famille comme salarié ou lui verse un dédommagement en sa qualité d'aidant familial au sens de l'article R. 245-7 du même code, énoncent dans leur paragraphe n° 147 que : " Les sommes perçues, par hypothèse, ne sont pas imposables selon les règles des traitements et salaires mais dans la catégorie des bénéfices non commerciaux. / En contrepartie, l'aidant familial pourra déduire les dépenses nécessitées par l'exercice de cette activité (...) ".

4. Il résulte du 9° ter de l'article 81 du code général des impôts que si le législateur a entendu affranchir de l'impôt sur le revenu le versement de la prestation de compensation du handicap entre les mains de son bénéficiaire, cette disposition n'a ni pour objet ni pour effet d'affranchir les tiers de l'impôt sur le revenu à raison des sommes qu'ils perçoivent lors de l'emploi, par le bénéficiaire, de cette prestation. Celles-ci sont donc susceptibles d'être imposées entre les mains de la personne rémunérée ou dédommagée par le bénéficiaire de la prestation, y compris les aidants familiaux au sens de l'article R. 245-7 du code de l'action sociale et des familles. Dans ce dernier cas, ces revenus, qui constituent la contrepartie d'une occupation d'aidant familial et ne se rattachent à aucune autre catégorie de bénéfices ou de revenus, sont imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux en application du 1 précité de l'article 92 du code général des impôts.

5. La circonstance que, notamment en cas d'appartenance de l'aidant familial au foyer fiscal du bénéficiaire de la prestation de compensation du handicap et du fait des règles d'établissement de l'impôt sur le revenu en vertu desquelles le revenu global soumis au barème progressif est constitué de la somme des revenus imposables dont a disposé chacun des membres du foyer fiscal, les sommes versées en franchise d'impôt au bénéficiaire de la prestation puissent se trouver prises en compte dans le revenu global du foyer fiscal, est sans incidence sur la portée de l'exonération prévue par le 9° ter du code général des impôts, qui ne concerne que les seuls revenus propres du bénéficiaire de la prestation et non les revenus des autres membres de son foyer fiscal. Est également dépourvue d'incidence à cet égard la circonstance, à la supposer établie, que d'autres prestations d'aide sociale ou de sécurité sociale éventuellement cumulables avec la prestation de compensation du handicap feraient l'objet d'un traitement différent au regard de la loi fiscale.

6. Il suit de là que les requérantes ne sont pas fondées à soutenir qu'en indiquant que les sommes perçues par les aidants familiaux sont assujetties à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux de l'article 92 du code général des impôts, les commentaires attaqués méconnaîtraient la portée des dispositions de la loi fiscale qu'ils ont pour objet d'éclairer, ou méconnaîtraient les dispositions de la loi du 11 février 2005 mentionnée au point 1.

7. Il résulte de ce qui précède que la requête doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de l'association Tous pour l'inclusion et de Mme B... est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association Tous pour l'inclusion, à Mme A... B...et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 419929
Date de la décision : 24/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

19-04-02-05-01 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. REVENUS ET BÉNÉFICES IMPOSABLES - RÈGLES PARTICULIÈRES. BÉNÉFICES NON COMMERCIAUX. PERSONNES, PROFITS, ACTIVITÉS IMPOSABLES. - PRESTATION DE COMPENSATION DU HANDICAP (PCH) - DÉDOMMAGEMENTS PERÇUS PAR UN AIDANT FAMILIAL SANS LIEN DE SUBORDINATION AVEC LA PERSONNE HANDICAPÉE (ART. L. 245-3, L. 245-12 ET R. 245-7 DU CASF) - INCLUSION.

19-04-02-05-01 Le législateur n'a pas entendu affranchir de l'impôt sur le revenu les tiers à raison des sommes qu'ils perçoivent lors de l'emploi, par le bénéficiaire de la prestation de compensation du handicap, de cette prestation.... ...Ces sommes sont donc susceptibles d'être imposées entre les mains de la personne rémunérée ou dédommagée par le bénéficiaire de la prestation, y compris les aidants familiaux au sens de l'article R. 245-7 du code de l'action sociale et des familles (CASF). Dans ce dernier cas, ces revenus, qui constituent la contrepartie d'une occupation d'aidant familial et ne se rattachent à aucune autre catégorie de bénéfices ou de revenus, sont imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC).


Publications
Proposition de citation : CE, 24 oct. 2018, n° 419929
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Gariazzo
Rapporteur public ?: M. Romain Victor

Origine de la décision
Date de l'import : 06/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:419929.20181024
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