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24/10/2018 | FRANCE | N°397900

France | France, Conseil d'État, 4ème et 1ère chambres réunies, 24 octobre 2018, 397900


Vu la procédure suivante :

Par une décision n° 397900 du 7 février 2018, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, d'une part, annulé l'arrêt n° 15DA01822 du 11 février 2016 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté l'appel formé par les sociétés Tel and Com, L'enfant d'aujourd'hui et Squadra contre le jugement n° 1505942, 1506143 du 14 octobre 2015 du tribunal administratif de Lille annulant la décision du 18 mai 2015 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Nord-Pas-de-Ca

lais a homologué le document unilatéral fixant le plan de sauvegarde...

Vu la procédure suivante :

Par une décision n° 397900 du 7 février 2018, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, d'une part, annulé l'arrêt n° 15DA01822 du 11 février 2016 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté l'appel formé par les sociétés Tel and Com, L'enfant d'aujourd'hui et Squadra contre le jugement n° 1505942, 1506143 du 14 octobre 2015 du tribunal administratif de Lille annulant la décision du 18 mai 2015 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Nord-Pas-de-Calais a homologué le document unilatéral fixant le plan de sauvegarde de l'emploi de l'unité économique et sociale composée de ces sociétés et, d'autre part, sursis à statuer sur la requête présentée par la société Tel and Com et autres devant la cour administrative d'appel, afin de permettre un débat contradictoire en vue du règlement de l'affaire au fond.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-François de Montgolfier, maître des requêtes ;

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de la société Tel And Com et autres et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de Mme C...et autres ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 12 octobre 2018, présentée par les sociétés Tel and Com, L'Enfant d'Aujourd'hui et Squadra ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 16 octobre 2018, présentée par Mme C... et autres ;

1. Considérant que, par une décision du 18 mai 2015, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Nord-Pas-de-Calais a homologué le document unilatéral fixant le plan de sauvegarde de l'emploi des sociétés Tel and Com, L'enfant d'aujourd'hui et Squadra, réunies dans l'unité économique et sociale (UES) Tel and Com ; que par le jugement du 14 octobre 2015 dont les sociétés Tel and Com et autres relèvent appel, le tribunal administratif de Lille a, à la demande de Mme C...et autres, annulé cette décision en se fondant sur le caractère insuffisant du plan de reclassement ;

2. Considérant que, tant dans leur demande de première instance qu'en défense devant le Conseil d'Etat, Mme C...et autres soutiennent que, outre le motif retenu par le tribunal administratif, la décision d'homologation litigieuse est également entachée d'illégalité en raison, d'une part, de ce que les mesures de reclassement prévues par le plan ne sont pas suffisantes au regard des moyens de l'UES Tel and Com et du groupe auquel elle appartient et, d'autre part, de ce que l'administration ne pouvait légalement omettre, dans son appréciation des moyens du groupe auquel appartient l'UES Tel and Com, les moyens financiers dont disposait la société Sarto Finances ;

3. Considérant qu'il incombe notamment à l'administration, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document fixant, de manière unilatérale, un plan de sauvegarde de l'emploi en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, d'apprécier, conformément aux dispositions de l'article L. 1233-57-3 du même code " (...) le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions, les moyens du groupe s'entendent des moyens, notamment financiers, dont dispose l'ensemble des entreprises placées, ainsi qu'il est dit au I de l'article L. 2331-1 du code du travail, sous le contrôle d'une même entreprise dominante dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce, ainsi que de ceux dont dispose cette entreprise dominante, quel que soit le lieu d'implantation du siège de ces entreprises ;

4. Considérant que, pour l'application de cette règle, les sociétés requérantes soutiennent qu'il résulte des dispositions de l'article L. 2331-4 du code du travail que les sociétés dont l'objet unique est la prise de participation dans d'autres entreprises, sans immixtion dans leur gestion, n'ont pas le caractère de " sociétés dominantes ", au sens de l'article L. 2331-1 du code du travail, et ne font, par suite, pas partie du groupe à prendre en considération au titre de l'article L. 1233-57-3 du même code ; qu'il résulte toutefois de ce qui a été dit ci-dessus que le groupe de sociétés auquel fait référence ce dernier article n'est pas nécessairement identique à celui pour lequel l'article L. 2331-1 prévoit la constitution d'un comité de groupe ; que les dispositions de l'article L. 2331-4 ne sauraient, dès lors, être utilement invoquées pour la détermination du périmètre du groupe à prendre en compte dans l'évaluation du caractère suffisant d'un plan de sauvegarde de l'emploi ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 233-1 du code de commerce : " Lorsqu'une société possède plus de la moitié du capital d'une autre société, la seconde est considérée (...) comme filiale de la première " ; qu'il ressort des pièces du dossier et n'est d'ailleurs pas contesté que la société Squadra, qui fait partie de l'UES Tel and Com et qui contrôle les sociétés Tel and Com et L'enfant d'aujourd'hui, était, ainsi que le soutiennent les défendeurs, détenue à 100 % par la société Sarto Finances à la date de la décision litigieuse ; que les sociétés Squadra et Sarto Finances étaient d'ailleurs dirigées par la même personne ; que, par suite, les moyens financiers dont disposait la société Sarto Finances devaient, sans qu'y fassent obstacle ni, ainsi qu'il a été dit au point 4, les dispositions de l'article L. 2331-4 du code du travail, ni le régime fiscal auquel cette société était soumise, être pris en compte par l'administration pour apprécier, conformément aux dispositions de l'article L. 1233-57-3 du code du travail, la suffisance des mesures du plan de sauvegarde de l'emploi de l'UES Tel and Com ;

6. Considérant qu'il est constant que l'administration n'a pas tenu compte des moyens financiers dont disposait cette société Sarto Finances ; qu'une telle omission a, par suite, entaché d'illégalité la décision d'homologation litigieuse du 18 mai 2015 ;

7. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans une telle circonstance, de se prononcer sur le bien-fondé du moyen tiré du caractère insuffisant des mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Tel and Com et autres ne sont pas fondées à se plaindre de ce que le tribunal administratif a annulé la décision d'homologation litigieuse ;

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de Mme C..., de M. D... et de Mme B..., qui ne sont pas parties perdantes dans la présente instance ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre, au même titre, solidairement à la charge des sociétés Tel and Com, L'Enfant d'Aujourd'hui et Squadra, une somme de 1 670 euros chacun à verser à Mme C..., à M. D... et à Mme B... pour les frais exposés par eux, tant devant la cour administrative d'appel de Douai que devant le Conseil d'Etat ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête présentée par la société Tel and Com et autres devant la cour administrative d'appel de Douai est rejetée.

Article 2 : Les sociétés Tel and Com, L'Enfant d'Aujourd'hui et Squadra verseront solidairement à Mme C..., à M. D... et à Mme B... une somme de 1 670 euros chacun, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Tel and Com, première dénommée pour l'ensemble des requérantes et à Mme A...C..., première dénommée pour tous ses cosignataires.

Copie en sera adressée à la ministre du travail.


Synthèse
Formation : 4ème et 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 397900
Date de la décision : 24/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07 TRAVAIL ET EMPLOI. LICENCIEMENTS. - HOMOLOGATION D'UN DOCUMENT UNILATÉRAL FIXANT LE CONTENU D'UN PSE - CONTRÔLE DU CARACTÈRE SUFFISANT DU PSE AU REGARD DES MOYENS DU GROUPE - NOTION DE MOYENS DU GROUPE - 1) PRINCIPES [RJ1] - 2) CAS DU PSE D'UNE UES DONT FAIT PARTIE UNE SOCIÉTÉ DÉTENUE À 100 % PAR UNE AUTRE - PRISE EN COMPTE DES MOYENS DE LA SOCIÉTÉ DÉTENTRICE - EXISTENCE.

66-07 1) Il incombe notamment à l'administration, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document fixant, de manière unilatérale, un plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, d'apprécier, conformément aux dispositions de l'article L. 1233-57-3 du même code « (…) le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe (…) ». Pour l'application de ces dispositions, les moyens du groupe s'entendent des moyens, notamment financiers, dont dispose l'ensemble des entreprises placées, ainsi qu'il est dit au I de l'article L. 2331-1 du code du travail, sous le contrôle d'une même entreprise dominante dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce, ainsi que de ceux dont dispose cette entreprise dominante, quel que soit le lieu d'implantation du siège de ces entreprises.,,2) Société A contrôlant deux autres sociétés, avec lesquelles elle forme une unité économique et sociale (UES). Société A détenue à 100 % par une société B à la date de la décision litigieuse, les sociétés A et B étant d'ailleurs dirigées par la même personne. Les moyens dont disposait la société B devaient, sans qu'y fassent obstacle ni l'article L. 2331-4 du code du travail, ni le régime fiscal auquel cette société était soumise, être pris en compte par l'administration pour apprécier, conformément aux dispositions de l'article L. 1233-57-3 du code du travail, la suffisance des mesures du PSE de cette UES.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 7 février 2018, Société Tel and Com et autres, n° 397900, p. 21 ;

CE, 24 octobre 2018, M.,et autres, n° 406905, inédite au Recueil.


Publications
Proposition de citation : CE, 24 oct. 2018, n° 397900
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-François de Montgolfier
Rapporteur public ?: M. Frédéric Dieu
Avocat(s) : SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:397900.20181024
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