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19/10/2018 | FRANCE | N°409004

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 19 octobre 2018, 409004


Vu la procédure suivante :

La communauté d'agglomération du Grand Dax a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l'Etat à lui payer la somme de 3 050 997 euros assortie des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice causé par la minoration des dotations de compensation au titre respectivement des années 2012, 2013 et 2014 du produit de la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM) et d'annuler les décisions des 4 juillet 2012, 19 juillet 2013 et 24 juillet 2014 par lesquelles le préfet des Landes a imputé le produit de la taxe sur les surfaces commer

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Vu la procédure suivante :

La communauté d'agglomération du Grand Dax a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l'Etat à lui payer la somme de 3 050 997 euros assortie des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice causé par la minoration des dotations de compensation au titre respectivement des années 2012, 2013 et 2014 du produit de la taxe sur les surfaces commerciales (TASCOM) et d'annuler les décisions des 4 juillet 2012, 19 juillet 2013 et 24 juillet 2014 par lesquelles le préfet des Landes a imputé le produit de la taxe sur les surfaces commerciales sur les dotations de compensation qui lui étaient dues au titre des années 2012, 2013 et 2014. Par un jugement nos 1500752,1500884 du 1er mars 2016, ce tribunal a fait droit à ses demandes.

Par un arrêt nos 16BX014516, 16BX02004 du 19 janvier 2017, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur appel du ministre de l'intérieur, annulé ce jugement, rejeté la demande d'indemnisation présentée par la communauté d'agglomération du Grand Dax et prononcé le non-lieu à statuer sur la requête tendant au sursis à exécution du jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 17 mars et 29 mai 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la communauté d'agglomération du Grand Dax demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 de cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel du ministre ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 ;

- la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 ;

- la décision n° 2017-644 QPC du 21 juillet 2017 du Conseil constitutionnel ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Pauline Berne, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de la communauté d'agglomération du Grand Dax ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la communauté d'agglomération du Grand Dax a saisi le tribunal administratif de Pau d'une demande tendant à ce que l'Etat soit condamné au paiement d'une indemnité de 3 050 997 euros en réparation des conséquences dommageables des décisions préfectorales ayant minoré ses dotations de compensation pour les années 2012, 2013 et 2014 du produit de la taxe sur les surfaces commerciales perçu par l'Etat sur son territoire en 2010. Par un jugement du 1er mars 2016, le tribunal administratif de Pau a condamné l'Etat à payer à la communauté d'agglomération du Grand Dax une indemnité de 3 050 997 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 19 décembre 2014. Sur appel du ministre de l'intérieur, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, par un arrêt du 19 janvier 2017, annulé ce jugement et rejeté la demande de première instance de la communauté d'agglomération du Grand Dax. Celle-ci se pourvoit contre l'arrêt de la cour.

2. En premier lieu, aux termes du paragraphe 1.2.4.2 de l'article 77 de la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 : " Le montant de la compensation prévue au D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) ou de la dotation de compensation prévue à l'article L. 5211-28-1 du code général des collectivités territoriales est diminué en 2011 d'un montant égal, pour chaque collectivité territoriale ou établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, au produit de la taxe sur les surfaces commerciales perçu par l'État en 2010 sur le territoire de la collectivité territoriale ou de l'établissement public de coopération intercommunale ". Aux termes du b) du 2° du paragraphe 1.2.4.3 de l'article 77 de la même loi, l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié : " Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé : "Pour les communes et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, lorsque le montant de la compensation prévue au D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) ou de la dotation de compensation prévue à l'article L. 5211-28-1 du présent code est, en 2011, inférieur au montant de la diminution à opérer en application du 1.2.4.2 de l'article 77 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, le solde est prélevé au profit du budget général de l'Etat, prioritairement sur le montant correspondant aux montants antérieurement perçus au titre du 2° bis du II de l'article 1648 B du code général des impôts dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004 et enfin sur le produit de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, de la taxe d'habitation et de la contribution économique territoriale perçu au profit de ces communes et établissements" ". Il résulte de ces dispositions que les mécanismes de diminution et de prélèvement portant sur les dotations et sur les recettes fiscales perçues par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, mis en place pour compenser le transfert du produit de la taxe sur les surfaces commerciales de l'Etat aux communes et à leurs groupements, ne sont applicables qu'au titre de la seule année 2011.

3. En second lieu, aux termes de l'article 114 de la loi du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 : " I.-Au dernier alinéa du II de l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales, les mots : ", en 2011, " sont supprimés. / II.-Au 1.2.4.2 de l'article 77 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, les mots : " en 2011 " sont supprimés ". Toutefois, en supprimant les termes " en 2011 " du dispositif décrit au point 2 ci-dessus, ces dispositions n'ont eu ni pour objet ni pour effet de lui conférer une portée rétroactive pour les années 2012 à 2014.

4. Dès lors, en jugeant que les dispositions précitées de l'article 114 de la loi du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 avaient seulement un caractère interprétatif ayant " pour objet de clarifier le fondement du régime de compensation du transfert aux collectivités territoriales et aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre du produit de la taxe sur les surfaces commerciales, dont il est précisé qu'il n'a pas eu vocation à être opéré uniquement en 2011, mais a bien été intégré en base dans le calcul des dotations aux collectivités concernées depuis lors ", et en en déduisant que, dans ces conditions, en procédant à la minoration de la dotation de compensation de la communauté d'agglomération du Grand Dax pour l'année 2014 d'un montant équivalent au produit de la taxe sur les surfaces commerciales perçu par l'Etat sur le territoire de cette communauté en 2010, le préfet des Landes n'avait pas commis d'illégalité fautive et n'avait ainsi pu causer de préjudice à la communauté d'agglomération du Grand Dax, la cour a entaché son arrêt d'erreur de droit. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi, la communauté d'agglomération du Grand Dax est fondée à demander l'annulation des articles 1er et 2 de cet arrêt.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler dans cette mesure l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

6. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été notifié au ministre le 2 mars 2016. Le délai d'appel étant un délai franc, le recours du ministre de l'intérieur enregistré au greffe de la cour le 3 mai 2016 n'est pas tardif.

7. L'article 133 de la loi du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016 dispose que : " Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée sont validés les arrêtés préfectoraux pris au titre des exercices2012, 2013 et 2014 constatant le prélèvement opéré sur le montant de la compensation prévue au D de l'article 44 de la loi de finances pour 1999 (n° 98-1266 du 30 décembre 1998) ou de la dotation de compensation prévue à l'article L. 5211-28-1 du code général des collectivités territoriales en tant que leur légalité serait contestée par le moyen tiré de ce qu'il aurait été fait application au-delà de 2011 des dispositions du paragraphe 1.2.4.2 de l'article 77 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 et de l'article L. 2334-7 du code général des collectivités territoriales, dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 ".

8. Compte tenu de l'intervention de ces dispositions, les décisions préfectorales prises au titre des années 2012 à 2014 sont désormais validées en tant qu'elles appliquent les mécanismes de diminution et de prélèvement portant sur les dotations et les recettes fiscales perçues par les communes et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, mis en place pour compenser le transfert du produit de la TASCOM de l'Etat à ces personnes publiques.

9. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du recours, le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a annulé les décisions du préfet des Landes des 4 juillet 2012, 19 juillet 2013 et 24 juillet 2014 et condamné l'Etat à payer à la communauté d'agglomération du Grand Dax une indemnité de 3 050 997 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 19 décembre 2014.

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 19 janvier 2017 de la cour administrative d'appel de Bordeaux et le jugement du tribunal administratif de Pau du 1er mars 2016 sont annulés.

Article 2 : Les demandes de la communauté d'agglomération du Grand Dax sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions présentées par la communauté d'agglomération du Grand Dax au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la communauté d'agglomération du Grand Dax et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 409004
Date de la décision : 19/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 19 oct. 2018, n° 409004
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Pauline Berne
Rapporteur public ?: M. Vincent Daumas
Avocat(s) : SCP GARREAU, BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:409004.20181019
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