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12/09/2018 | FRANCE | N°400453

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 12 septembre 2018, 400453


Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, les décisions implicites par lesquelles le président de l'université de Pau et des pays de l'Adour a rejeté ses demandes du 6 mai 2010 et du 26 juin 2012 tendant à bénéficier d'un contrat à durée indéterminée et, d'autre part, la décision révélée par la lettre du 25 juin 2012 par laquelle la directrice du département de langues étrangères appliquées de cette université l'a informée qu'aucun enseignement ne lui serait confié au cours de l

'année universitaire 2012/2013. Par un jugement n° 1201916 du 27 mars 2014, le...

Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, les décisions implicites par lesquelles le président de l'université de Pau et des pays de l'Adour a rejeté ses demandes du 6 mai 2010 et du 26 juin 2012 tendant à bénéficier d'un contrat à durée indéterminée et, d'autre part, la décision révélée par la lettre du 25 juin 2012 par laquelle la directrice du département de langues étrangères appliquées de cette université l'a informée qu'aucun enseignement ne lui serait confié au cours de l'année universitaire 2012/2013. Par un jugement n° 1201916 du 27 mars 2014, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14BX01569 du 7 avril 2016, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par Mme B... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 7 juin, le 8 septembre 2016 et le 15 mars 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'université de Pau et des pays de l'Adour la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 1999/70/CE du Conseil du 28 juin 1999 ;

- le code de l'éducation ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- le décret n° 87-889 du 29 octobre 1987 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Fuchs, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de Mme B...et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'université de Pau et des pays de l'Adour ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B...a, de l'année universitaire 1987-1988 jusqu'à l'année universitaire 2011-2012, dispensé des enseignements en expression française au sein du département de langues étrangères appliquées (LEA) de l'université de Pau et des Pays de l'Adour ; que, par deux courriers des 6 mai 2010 et 26 juin 2012, elle a demandé au président de l'université que lui soit reconnu le droit à un contrat à durée indéterminée ; que deux décisions implicites de rejet sont nées du silence gardé sur ses demandes ; que Mme B...a, par ailleurs, été informée par un courrier du 25 juin 2012 de la directrice du département LEA qu'aucun enseignement ne lui serait confié au cours de l'année universitaire 2012-2013 ; qu'elle se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 7 avril 2016 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté son appel dirigé contre le jugement du 27 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de ces trois décisions ;

Sur l'arrêt attaqué, en tant qu'il statue sur les refus de contrat à durée indéterminée :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 952-1 du code de l'éducation, relatif aux différentes catégories de personnel enseignant des universités : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 951-2, le personnel enseignant comprend des enseignants-chercheurs appartenant à l'enseignement supérieur, d'autres enseignants ayant également la qualité de fonctionnaires, des enseignants associés ou invités et des chargés d'enseignement. / Les enseignants associés ou invités assurent leur service à temps plein ou à temps partiel. Ils sont recrutés pour une durée limitée dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. / Les chargés d'enseignement apportent aux étudiants la contribution de leur expérience ; ils exercent une activité professionnelle principale en dehors de leur activité d'enseignement. Ils sont nommés pour une durée limitée par le président de l'université, sur proposition de l'unité intéressée, ou le directeur de l'établissement (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions ainsi que du décret du 29 octobre 1987 relatif aux conditions de recrutement et d'emploi de vacataires pour l'enseignement supérieur, pris pour son application que les contrats passés par les universités en vue de recruter des chargés d'enseignement sont conclus pour une durée déterminée, le cas échéant renouvelable ;

3. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient Mme B..., la cour ne s'est pas fondée, pour rejeter sa requête, sur la circonstance que son enseignement ne correspondait pas à un besoin permanent de l'université ; que, par suite, les moyens tirés de ce qu'un tel constat serait entaché de dénaturation des pièces du dossier et d'erreur de droit sont inopérants ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la cour a, par une appréciation souveraine qui n'est pas entachée de dénaturation, estimé que les contrats par lesquels Mme B... s'était vu confier chaque année, entre 1987 et 2012, par décision du président de l'université, un enseignement rémunéré sur vacation, l'étaient en qualité de chargée d'enseignement ; qu'elle a pu, sans erreur de droit, en déduire qu'en vertu des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 952-1 du code de l'éducation, ces contrats conclus avec l'université ne pouvaient l'être que pour une durée déterminée ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'il n'appartenait pas à la cour, dès lors que ce moyen n'était pas soulevé devant elle, de rechercher si l'activité professionnelle principale de Mme B...lui permettait d'apporter la contribution de son expérience aux étudiants ; que, par suite, les moyens tirés de ce qu'en omettant de le faire elle aurait entaché son arrêt d'insuffisance de motivation et d'erreur de droit doivent être écartés ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que la cour a pu, sans erreur de droit et par un arrêt suffisamment motivé sur ce point, juger que les dispositions de l'article L. 952-1 du code de l'éducation, qui prévoient la conclusion de contrats à durée déterminée pour une activité d'enseignement par laquelle les titulaires apportent aux étudiants la contribution de leur expérience professionnelle extérieure à l'université, ne sont pas incompatibles avec les objectifs de la directive du Conseil du 28 juin 1999 concernant l'accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée ; qu'elle n'a pas davantage entaché son arrêt de contradiction de motifs ;

Sur l'arrêt attaqué, en tant qu'il statue sur la décision de ne pas confier d'enseignements pour l'année 2012/2013 :

7. Considérant, en premier lieu, que la cour a pu, sans erreur de droit, juger que, dès lors que Mme B...n'était ni titulaire d'un contrat à durée indéterminée ni réputée titulaire d'un tel contrat, mais seulement bénéficiaire d'un contrat limité à l'année universitaire 2011/2012, la décision refusant de lui confier des enseignements pour l'année universitaire 2012/2013 ne constituait pas une mesure de licenciement ;

8. Considérant, en deuxième lieu, qu'un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie pas d'un droit au renouvellement de son contrat ; que, toutefois, le refus de renouvellement d'un tel contrat ne peut se fonder que sur un motif tiré de l'intérêt du service ;

9. Considérant toutefois qu'en estimant que, Mme B...faisant seulement état de la qualité de ses interventions durant vingt-cinq ans et de la circonstance que ses enseignements n'avaient été repris par aucun enseignant titulaire, aucun élément sérieux n'était de nature à établir l'existence d'un intérêt du service à maintenir son enseignement, la cour a porté sur les pièces du dossier une appréciation souveraine, exempte de dénaturation ; qu'elle n'a pas davantage entaché sur ce point son arrêt de contradiction de motifs ou d'erreur de droit ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le pourvoi de Mme B... doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par l'université de Pau et des pays de l'Adour au titre de ces mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de Mme B...est rejeté.

Article 2 : Le surplus des conclusions de l'université de Pau et des pays de l'Adour, présenté au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, est rejeté.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B...et à l'université de Pau et des pays de l'Adour.

Copie en sera adressée à la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation.


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 400453
Date de la décision : 12/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 12 sep. 2018, n° 400453
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Fuchs
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ ; SCP PIWNICA, MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 18/09/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:400453.20180912
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