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11/07/2018 | FRANCE | N°414684

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 11 juillet 2018, 414684


Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiée (SAS) Garage du Lac a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des rappels de taxe sur les surfaces commerciales auxquels elle a été assujettie au titre des années 2010 et 2011. Par un jugement n° 1304418 du 29 février 2016, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 16LY01411 du 28 septembre 2017, enregistré le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R.

351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 25 avril...

Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiée (SAS) Garage du Lac a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des rappels de taxe sur les surfaces commerciales auxquels elle a été assujettie au titre des années 2010 et 2011. Par un jugement n° 1304418 du 29 février 2016, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 16LY01411 du 28 septembre 2017, enregistré le même jour au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 25 avril 2016 au greffe de cette cour, formé par la société Étoile du Rhône contre ce jugement en tant qu'il statue sur les impositions dues au titre de l'année 2011.

Par ce pourvoi et trois nouveaux mémoires, enregistrés au greffe de cette cour les 21 octobre, 27 juillet et 1er septembre 2017, la société Garage du Lac demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il se prononce sur les impositions dues au titre de l'année 2011 ;

2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 72-657 du 13 juillet 1972 ;

- le décret n° 95-85 du 26 janvier 1995 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Domingo, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la Société Garage Du Lac.

Vu la note en délibéré, enregistrée le 14 juin 2018, présentée par la société Garage du Lac.

Considérant ce qui suit :

1. La société Garage du Lac, qui exerce une activité de vente de véhicules automobiles au sein, notamment, de quatre établissements situés à Voglans (Savoie), Sallanches (Savoie), Ville-la-Grand (Haute-Savoie) et Seynod (Haute-Savoie), a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration fiscale l'a assujettie à des rappels de taxe sur les surfaces commerciales au titre des années 2010 et 2011. Elle se pourvoit en cassation contre le jugement du 29 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande, en tant qu'elle tendait à la décharge des impositions dues au titre de l'année 2011.

Sur les moyens relatifs à la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations. En revanche, sa régularité ne dépend pas du bien-fondé de ces motifs.

3. Après avoir, d'une part, relevé que la proposition de rectification adressée le 11 juin 2012 à la société requérante rappelait les modalités d'exploitation de cette société ainsi que les textes qui régissent la taxe sur les surfaces commerciales, précisait la surface taxable par établissement et justifiait du montant des chiffres d'affaires pris en considération et, d'autre part, estimé, par une appréciation souveraine des faits non entachée de dénaturation, qu'elle indiquait ainsi les motifs de droit et de fait à l'origine des rehaussements envisagés de manière suffisamment précise pour permettre à la société de présenter utilement ses observations, la cour a pu en déduire, sans méconnaître les dispositions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, que cette proposition était suffisamment motivée.

4. Si, par ailleurs, la société requérante soutient que l'administration a entaché la procédure d'imposition d'irrégularité en ne la mettant pas à même de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, ce moyen, qui n'a pas été soulevé devant le tribunal administratif et n'est pas d'ordre public, ne peut être utilement soulevé pour la première fois en cassation.

Sur les moyens relatifs au bien-fondé de l'imposition :

5. En premier lieu, aux termes de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 instituant des mesures en faveur de certaines catégories de commerçants et artisans âgés, dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige : " Il est institué une taxe sur les surfaces commerciales assise sur la surface de vente des magasins de commerce de détail, dès lors qu'elle dépasse 400 mètres carrés des établissements ouverts à partir du 1er janvier 1960 quelle que soit la forme juridique de l'entreprise qui les exploite. (...) / La surface de vente des magasins de commerce de détail, prise en compte pour le calcul de la taxe, et celle visée à l'article L. 720-5 du code de commerce, s'entendent des espaces affectés à la circulation de la clientèle pour effectuer ses achats, de ceux affectés à l'exposition des marchandises proposées à la vente, à leur paiement, et de ceux affectés à la circulation du personnel pour présenter les marchandises à la vente (...) / Si ces établissements, à l'exception de ceux dont l'activité principale est la vente ou la réparation de véhicules automobiles, ont également une activité de vente au détail de carburants, l'assiette de la taxe comprend en outre une surface calculée forfaitairement en fonction du nombre de position de ravitaillement dans la limite de 70 mètres carrés par position de ravitaillement. Le décret prévu à l'article 20 fixe la surface forfaitaire par emplacement à un montant compris entre 35 et 70 mètres carrés. / Pour les établissements dont le chiffre d'affaires au mètre carré est inférieur à 3 000 euros, le taux de cette taxe est de 5,74 euros au mètre carré de surface définie au troisième alinéa. Pour les établissements dont le chiffre d'affaires au mètre carré est supérieur à 12 000 euros, le taux est fixé à 34, 12 euros. / A l'exclusion des établissements qui ont pour activité principale la vente ou la réparation de véhicules automobiles, les taux mentionnés à l'alinéa précédent sont respectivement portés à 8,32 euros ou 35,70 euros (...). Un décret prévoira, par rapport aux taux ci-dessus, des réductions pour les professions dont l'exercice requiert des superficies de vente anormalement élevées ou, en fonction de leur chiffre d'affaires au mètre carré, pour les établissements dont la surface des locaux de vente destinés à la vente au détail est comprise entre 400 et 600 mètres carrés ". Aux termes de l'article 3 du décret du 26 janvier 1995 : " A. - La réduction de taux prévue au troisième alinéa de l'article 3 de la loi du 13 juillet 1972 susvisée en faveur des professions dont l'exercice requiert des superficies de vente anormalement élevées est fixée à 30 p. 100 en ce qui concerne la vente exclusive des marchandises énumérées ci-après (...) - véhicules automobiles ". Il résulte de la lettre même de ces dispositions, qui prévoient notamment des règles propres à ces établissement, que les établissements dont l'activité principale est la vente ou la réparation de véhicules automobiles, qu'ils soient neufs ou d'occasion, sont inclus dans le champ d'application de la taxe sur les surfaces commerciales. La société requérante n'est par suite fondée à soutenir ni que le tribunal administratif aurait inexactement qualifié son activité de commerce de détail au sens et pour l'application des dispositions précitées de la loi du 13 juillet 1972, ni qu'il aurait méconnu ces dispositions en jugeant qu'elle était susceptible, eu égard à son activité, d'être assujettie à la taxe sur les surfaces commerciales. Il s'ensuit que la société requérante n'est pas davantage fondée à soutenir que le décret du 26 janvier 1995 méconnaîtrait ces mêmes dispositions en ce qu'il mentionne la vente de véhicules automobiles dans les activités bénéficiant d'un taux réduit.

6. En deuxième lieu, le tribunal administratif, qui n'a pas insuffisamment motivé son jugement sur ce point, n'a commis d'erreur de droit ni en jugeant que les dispositions de la loi du 13 juillet 1972, telles que précisées par le décret du 26 janvier 1995, étaient claires et précises ni, en tout état de cause, en en déduisant que la requérante n'était pas fondée à soutenir que ces dispositions seraient incompatibles avec les stipulations de l'alinéa 1er de l'article 7 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, relatif au principe de légalité des délits et des peines.

7. En quatrième lieu, il résulte des dispositions précitées de la loi du 13 juillet 1972 et du décret du 26 janvier 1995, que le chiffre d'affaires à prendre en compte pour le calcul du taux de la taxe sur les surfaces commerciales s'entend de celui correspondant à l'ensemble des ventes au détail en l'état réalisées par l'établissement, sans qu'il y ait lieu notamment de distinguer selon que ces ventes concernent ou non des biens qui sont présentés ou stockés dans cet établissement, ni selon que l'acheteur est un particulier ou un professionnel. Le tribunal n'a par suite pas commis d'erreur de droit en jugeant qu'il y avait lieu en l'espèce, pour calculer le chiffre d'affaires permettant de déterminer le taux applicable, de retenir tant les ventes réalisées par l'établissement correspondant à des véhicules stockés ou exposés à l'intérieur ou à l'extérieur de celui-ci que celles correspondant à des véhicules commandés et livrés ultérieurement. Il n'a davantage méconnu les dispositions applicables ni en jugeant qu'il n'y avait pas lieu de diminuer le chiffre d'affaire des charges correspondant à la reprise des anciens véhicules, ni en refusant d'accueillir, au motif qu'aucun élément, notamment comptable, ne permettait de distinguer les accessoires utilisés pour effectuer des réparations de ceux vendus en l'état aux clients, l'argumentation de la société tendant à la non prise en compte des accessoires utilisés pour les besoins de prestations de services. Enfin, la société, qui ne contestait pas devant le tribunal administratif que l'administration n'avait pas tenu compte des ventes aux professionnels n'ayant pas le caractère de vente au détail, n'est pas fondée à soutenir que celui-ci aurait entaché son jugement d'insuffisance de motivation sur ce point.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la société Garage du Lac n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque. Ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la société Garage du Lac est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société par actions simplifiée Garage du Lac et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 414684
Date de la décision : 11/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 11 jui. 2018, n° 414684
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Laurent Domingo
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:414684.20180711
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