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11/07/2018 | FRANCE | N°410924

France | France, Conseil d'État, 10ème - 9ème chambres réunies, 11 juillet 2018, 410924


Vu la procédure suivante :

La SARL PPK a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de taxe sur les véhicules de sociétés, ainsi que des pénalités correspondantes, qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010 en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée et de la période du 1er octobre 2007 au 30 septembre 2010 en ce qui concerne la taxe sur les véhicules de sociétés. Par un jugement n° 1303309 du 28 avril 2016, le tribunal administratif de Lille a rej

eté sa demande.

Par un arrêt n° 16DA00962 du 28 mars 2017, la cour admini...

Vu la procédure suivante :

La SARL PPK a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de taxe sur les véhicules de sociétés, ainsi que des pénalités correspondantes, qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010 en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée et de la période du 1er octobre 2007 au 30 septembre 2010 en ce qui concerne la taxe sur les véhicules de sociétés. Par un jugement n° 1303309 du 28 avril 2016, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 16DA00962 du 28 mars 2017, la cour administrative d'appel de Douai a rejeté l'appel formé par la SARL PPK contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 29 mai et 29 août 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SARL PPK demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Vincent Villette, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Soltner, Texidor, Perier, avocat de la SARL PPK ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société PPK, qui exerce une activité consistant à proposer à ses clients des stages de pilotage de véhicules sur circuit, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er octobre 2007 au 31 décembre 2010. A l'issue de cette vérification, l'administration fiscale l'a assujettie, notamment, à des rappels de droits de taxe sur la valeur ajoutée et de taxe sur les véhicules de sociétés, au motif que son activité ne pouvait être regardée comme une activité d'enseignement de la conduite. Le tribunal administratif de Lille a, par un jugement du 28 avril 2016, rejeté sa demande de décharge de ces rappels de taxes. La société PPK se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 28 mars 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Douai a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre ce jugement.

2. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. (...) ". Aux termes de l'article 205 de l'annexe II au code général des impôts : " La taxe sur la valeur ajoutée grevant un bien ou un service qu'un assujetti à cette taxe acquiert, importe ou se livre à lui-même est déductible à proportion de son coefficient de déduction ". Enfin, le IV de l'article 206 de la même annexe de ce code prévoit : " 1. Le coefficient d'admission d'un bien ou d'un service est égal à l'unité, sauf dans les cas décrits aux 2 à 4. / 2. Le coefficient d'admission est nul dans les cas suivants : (...) 6° Pour les véhicules ou engins, quelle que soit leur nature, conçus pour transporter des personnes ou à usages mixtes, à l'exception de ceux : / a. Destinés à être revendus à l'état neuf ; / b. Donnés en location ; / c. Comportant, outre le siège du conducteur, plus de huit places assises et utilisés par des entreprises pour amener leur personnel sur les lieux du travail ; / d. Affectés de façon exclusive à l'enseignement de la conduite ; / e. De type tout terrain affectés exclusivement à l'exploitation des remontées mécaniques et des domaines skiables, dès lors qu'ils ont été certifiés par le service technique des remontées mécaniques et des transports guidés, dans des conditions fixées par décret ; / f. Acquis par les entreprises de transports publics de voyageurs et affectés de façon exclusive à la réalisation desdits transports ". Il résulte de l'économie générale de ces dispositions que si, aux fins de limiter les risques de fraude, les véhicules conçus pour transporter des personnes sont exclus du droit général à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée, cette exclusion ne s'applique pas aux assujettis dont les véhicules sont affectés de façon exclusive à l'enseignement professionnel de la conduite. A cet égard, le fait que la prestation d'enseignement soit exercée dans un contexte de loisir et n'ait pas un caractère diplômant est sans incidence sur le bénéfice du droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée.

3. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour confirmer la remise en cause, par l'administration fiscale, de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les dépenses afférentes aux véhicules que la société requérante utilise dans le cadre de son activité d'initiation au pilotage sur circuit, la cour administrative d'appel a estimé que ces véhicules n'étaient pas affectés de façon exclusive à l'enseignement de la conduite, au sens et pour l'application des dispositions, citées au point 2, de l'article 206 de l'annexe II au code général des impôts, dès lors, d'une part, que les prestations proposées s'inscrivaient dans un contexte de loisir sportif et, d'autre part, que leur contenu n'était encadré par aucune disposition législative ou réglementaire. En confirmant pour de tels motifs la remise en cause de la déduction de taxe sur la valeur ajoutée, sans rechercher si, compte tenu de l'activité effective de la société requérante, les véhicules en cause devaient être regardés comme affectés de façon exclusive à l'enseignement professionnel de la conduite, la cour administrative d'appel de Douai a entaché son arrêt d'erreur de droit. La société PPK est fondée, pour ce motif, à en demander l'annulation, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à la société requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Douai du 28 mars 2017 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Douai.

Article 3 : L'Etat versera à la société PPK une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société PPK et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 10ème - 9ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 410924
Date de la décision : 11/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES. TAXES SUR LE CHIFFRE D'AFFAIRES ET ASSIMILÉES. TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE. EXEMPTIONS ET EXONÉRATIONS. - VÉHICULES CONÇUS POUR TRANSPORTER DES PERSONNES - DROIT GÉNÉRAL À DÉDUCTION DE LA TVA - EXCLUSION - CAS DES VÉHICULES AFFECTÉS DE FAÇON EXCLUSIVE À L'ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL DE LA CONDUITE - INCLUSION.

19-06-02-02 Il résulte de l'économie générale de l'article 271 du code général des impôts (CGI), de l'article 205 de l'annexe II au même code et du IV de l'article 206 de la même annexe que si, aux fins de limiter les risques de fraude, les véhicules conçus pour transporter des personnes sont exclus du droit général à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), cette exclusion ne s'applique pas aux assujettis dont les véhicules sont affectés de façon exclusive à l'enseignement professionnel de la conduite. A cet égard, le fait que la prestation d'enseignement soit exercée dans un contexte de loisir et n'ait pas un caractère diplômant est sans incidence sur le bénéfice du droit à déduction de la TVA.


Publications
Proposition de citation : CE, 11 jui. 2018, n° 410924
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Vincent Villette
Rapporteur public ?: Mme Aurélie Bretonneau
Avocat(s) : SCP CELICE, SOLTNER, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:410924.20180711
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