La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/07/2018 | FRANCE | N°403652

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 11 juillet 2018, 403652


Vu la procédure suivante :

La société anonyme (SA) Fabre Domergue a demandé au tribunal administratif de la Martinique de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1995, 1996 et 1997 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 0400325 du 11 juillet 2011, ce tribunal a constaté qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur les conclusions de la demande à concurrence des dégrèvements prononcés en cours d'instance et a rejeté le surplus des conclusions de la so

ciété.

Par un arrêt n° 11BX02660 du 25 avril 2013, la cour administrative...

Vu la procédure suivante :

La société anonyme (SA) Fabre Domergue a demandé au tribunal administratif de la Martinique de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1995, 1996 et 1997 ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 0400325 du 11 juillet 2011, ce tribunal a constaté qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur les conclusions de la demande à concurrence des dégrèvements prononcés en cours d'instance et a rejeté le surplus des conclusions de la société.

Par un arrêt n° 11BX02660 du 25 avril 2013, la cour administrative d'appel de Bordeaux a, sur appel de la société Fabre Domergue, constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société à hauteur d'un dégrèvement accordé en cours d'instance par l'administration pour un montant de 337 522 francs (51 454,89 euros) et a rejeté le surplus des conclusions de la société.

Par une décision n° 369763 du 9 décembre 2015, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'article 2 de cet arrêt, notamment en tant qu'il a statué sur la réintégration d'une provision constituée par la SNC Résidence du Sud pour un montant de 36 499 000 francs (5 564 236,80 euros) à la clôture de l'exercice 1995 et a, dans cette mesure, renvoyé l'affaire à la cour.

Par un arrêt n° 16BX00035 du 21 juin 2016, la cour administrative d'appel de Bordeaux, statuant sur renvoi du Conseil d'État, a rejeté les conclusions de la société Fabre Domergue tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge à la suite de la réintégration de la provision constituée par la SNC Résidence du Sud à la clôture de l'exercice 1995.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 21 septembre 2016, 16 décembre 2016 et 12 février 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Fabre Domergue demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Domingo, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Odent, Poulet, avocat de la société Fabre Domergue.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Fabre Domergue, qui exerce une activité de holding, a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 1995 qui procèdent, notamment, de la réintégration dans les bénéfices imposables de la société en nom collectif (SNC) Résidence du Sud, dont elle est associée, d'une provision dite " pour fin de chantier " que cette société avait constituée, à hauteur de 36 499 000 francs (5 564 236,80 euros), à la clôture de l'exercice 1995. Par un jugement du 11 juillet 2011, le tribunal administratif de Fort-de-France a rejeté la demande de la société Fabre Domergue tendant à la décharge de ces impositions. Par une décision n° 369763 du 9 décembre 2015, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé l'arrêt du 25 avril 2013 de la cour administrative d'appel de Bordeaux rejetant l'appel de la société, en tant qu'elle avait statué sur ce chef de redressement et renvoyé, dans cette mesure, l'affaire à la cour. La société Fabre Domergue se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 21 juin 2016 par lequel la cour, statuant sur renvoi, a de nouveau rejeté son appel.

2. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant ... notamment ... 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des évènements en cours rendent probables (...) ". Il résulte de ces dispositions qu'une entreprise peut valablement porter en provision et déduire des bénéfices imposables d'un exercice des sommes correspondant à des pertes ou à des charges qui ne seront supportées qu'ultérieurement par elle, à la condition que ces pertes et charges soient nettement précisées quant à leur nature et susceptible d'être évaluées avec une approximation suffisante. En ce qui concerne les provisions pour charges, elles ne peuvent être déduites au titre d'un exercice que si se trouvent comptabilisées, au titre du même exercice, les produits correspondant à ces charges.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que la société Résidence du Sud a réalisé, entre 1991 et 1996, un programme immobilier consistant en la création d'une résidence hôtelière destinée à être vendue par lots à des investisseurs, dont 110 lots ont été cédés en 1995 et 42 lots en 1996. Il en ressort également que cette société a constitué, à la clôture de l'exercice 1995, une provision pour charges destinée à " tenir compte des travaux restant à finir ", d'un montant de 36 499 000 francs correspondant à la différence entre le coût de l'immeuble selon le budget estimatif de 92 037 230 francs et les sommes déjà payées au 31 décembre 1995, soit 55 538 230 francs.

4. En premier lieu, pour écarter l'argumentation de la société relative à la possibilité de déduire cette provision, la cour administrative d'appel s'est fondée, sans remettre en cause la réalité des charges dont la société soutenait qu'elles demeuraient à exposer pour achever la construction de l'immeuble, sur ce que celle-ci ne fournissait aucun élément permettant d'établir que ces charges correspondaient aux lots cédés avant la clôture de l'exercice 1995 et dont les produits avaient été comptabilisés au titre de cet exercice. En statuant ainsi, la cour administrative d'appel, qui n'a pas omis de répondre à l'argumentation qui lui était soumise et a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine non entachée de dénaturation, n'a pas méconnu les règles de déduction des provisions pour charges rappelées au point 2.

5. En second lieu, la cour, qui a relevé sans dénaturation que la société qualifiait elle-même la somme de 34 771 666 francs comptabilisée à l'actif de son bilan de clôture de 1995 " d'en-cours de production ", n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la comptabilisation d'un tel en-cours, qui a pour seul objet, en compensant des charges de production déjà supportées et comptabilisées, d'assurer la neutralité du résultat fiscal, n'était pas de nature à justifier la constitution d'une provision pour charges futures.

6. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi de la société Fabre Domergue ne peut qu'être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la société Fabre Domergue est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société anonyme Fabre Domergue et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 403652
Date de la décision : 11/07/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 11 jui. 2018, n° 403652
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Laurent Domingo
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP ODENT, POULET

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:403652.20180711
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award