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27/06/2018 | FRANCE | N°415240

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 27 juin 2018, 415240


Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision référencée 48SI par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté l'invalidité de son permis de conduire pour solde de points nul et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de procéder à la reconstitution de son capital de points et de lui restituer ce titre. Par une ordonnance n° 1702184 du 10 octobre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés

les 24 octobre et 11 décembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'E...

Vu la procédure suivante :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif d'Amiens d'annuler la décision référencée 48SI par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté l'invalidité de son permis de conduire pour solde de points nul et d'enjoindre au ministre de l'intérieur de procéder à la reconstitution de son capital de points et de lui restituer ce titre. Par une ordonnance n° 1702184 du 10 octobre 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 24 octobre et 11 décembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de la route ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Cédric Zolezzi, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de M.B....

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n'est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais " ; qu'aux termes de l'article L. 521-1 du même code : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision./ Lorsque la suspension est prononcée, il est statué sur la requête en annulation ou en réformation de la décision dans les meilleurs délais " ;

2. Considérant que, saisi sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative d'une demande tendant à ce qu'il prononce, à titre provisoire et conservatoire, la suspension d'une décision administrative, le juge des référés procède, dans les plus brefs délais, à une instruction succincte - distincte de celle au vu de laquelle le juge saisi du principal statuera - pour apprécier si les préjudices que l'exécution de cette décision pourrait entraîner sont suffisamment graves et immédiats pour caractériser une situation d'urgence et si les moyens invoqués apparaissent, en cet état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision ; qu'il se prononce par une ordonnance qui n'est pas revêtue de l'autorité de la chose jugée et dont il peut lui-même modifier la portée au vu d'un élément nouveau invoqué devant lui par toute personne intéressée ;

3. Considérant qu'eu égard à la nature de l'office ainsi attribué au juge des référés, la seule circonstance qu'un magistrat a statué sur une demande tendant à la suspension de l'exécution d'une décision administrative n'est pas, par elle-même, de nature à faire obstacle à ce qu'il se prononce ultérieurement sur la requête en qualité de juge du principal ; que, toutefois, dans le cas où il apparaîtrait, compte tenu notamment des termes mêmes de l'ordonnance, qu'un magistrat statuant comme juge des référés aurait préjugé l'issue du litige, ce magistrat ne pourrait, sans méconnaître le principe d'impartialité, se prononcer ultérieurement comme juge du principal ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le ministre de l'intérieur a, par une décision référencée 48 SI, constaté la perte de validité du permis de conduire de M. B...pour solde de points nul et lui a enjoint de restituer ce titre ; que M. B... a saisi le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens d'une demande de suspension de cette décision sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative ; qu'il a également saisi ce tribunal d'une demande au fond tendant à l'annulation de cette décision pour excès de pouvoir ; que, par une ordonnance du 4 septembre 2017, le juge des référés du tribunal administratif a rejeté sa demande de suspension en raison de la tardiveté de sa demande au fond ; que, par une ordonnance du 10 octobre 2017, prise au visa du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, le même magistrat, statuant en qualité de magistrat désigné par le président du tribunal administratif, a rejeté sa demande au fond comme manifestement irrecevable en raison de sa tardiveté ;

5. Considérant que l'ordonnance de référé se prononce sur le caractère régulier de la notification de la décision 48 SI à M. B...pour en déduire que le délai de recours de deux mois était expiré à la date d'enregistrement de sa demande au fond ; que le juge des référés ayant ainsi retenu la tardiveté de cette demande et préjugé l'issue du litige, M. B...est fondé à soutenir que l'ordonnance du 10 octobre 2017 a été rendue dans des conditions irrégulières, et à en demander l'annulation, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de son pourvoi ;

6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 10 octobre 2017 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif d'Amiens est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif d'Amiens.

Article 3 : L'Etat versera à M. B...la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 415240
Date de la décision : 27/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 27 jui. 2018, n° 415240
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Cédric Zolezzi
Rapporteur public ?: Mme Laurence Marion
Avocat(s) : SCP MARLANGE, DE LA BURGADE

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:415240.20180627
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