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18/06/2018 | FRANCE | N°413619

France | France, Conseil d'État, 5ème - 6ème chambres réunies, 18 juin 2018, 413619


Vu la procédure suivante :

Par une décision du 11 avril 2018, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de M. A...B...dirigées contre l'ordonnance n° 1705414 du 31 juillet 2017 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant en application de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, a rejeté sa demande, présentée au titre de l'article L. 521-2 du même code, tendant à la suspension de la décision du 26 juin 2017 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a accordé le concou

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Vu la procédure suivante :

Par une décision du 11 avril 2018, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de M. A...B...dirigées contre l'ordonnance n° 1705414 du 31 juillet 2017 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Marseille, statuant en application de l'article L. 522-3 du code de justice administrative, a rejeté sa demande, présentée au titre de l'article L. 521-2 du même code, tendant à la suspension de la décision du 26 juin 2017 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a accordé le concours de la force publique, à compter du 1er août 2017, en vue de l'expulser d'un logement situé 8, rue Nostre Seigne à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône), en tant seulement que cette ordonnance lui inflige une amende pour recours abusif d'un montant de 1 500 euros.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 27 avril et 30 mai 2018, le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur déclare s'en remettre à la sagesse du Conseil d'Etat sur les conclusions relatives à l'amende pour recours abusif et au rejet des conclusions présentées au titre des articles L. 761- 1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que l'Etat ne saurait être regardé comme la partie perdante dans un litige qui relève de la seule décision du juge de première instance.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Dominique Chelle, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de M.B....

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Marseille que, par une décision du 26 juin 2017, le préfet des Bouches-du-Rhône a accordé le concours de la force publique en vue de l'expulsion de M. B...d'un logement qu'il occupait ; que le juge des référés du tribunal administratif a rejeté une demande de l'intéressé tendant à la suspension de l'exécution de cette décision, présentée sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative ; que M. B...a alors présenté une demande ayant le même objet sur le fondement de l'article L. 521-2 du même code ; que, par une ordonnance du 31 juillet 2017, le juge des référés a rejeté cette demande et a condamné le requérant à une amende pour recours abusif ; que, par une décision du 11 avril 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de M. B... dirigé contre cette ordonnance en tant qu'elle lui inflige une amende pour recours abusif ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros " ; qu'alors notamment que, contrairement à ce qu'a relevé le juge des référés, M. B...avait soulevé, à l'appui de sa seconde demande en référé, un moyen nouveau tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, cette demande ne pouvait, dans les circonstances de l'espèce, être regardée comme abusive ; qu'ainsi, la condamnation du requérant à une amende pour recours abusif repose sur une erreur de qualification juridique ; que l'ordonnance attaquée doit, par suite, être annulée en tant qu'elle prononce cette condamnation ;

3. Considérant que M. B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; que, contrairement à ce que soutient le ministre de l'intérieur, la circonstance que le prononcé d'une amende pour recours abusif relève des pouvoirs propres du juge ne fait pas obstacle à ce que l'Etat soit regardé comme la partie perdante dans la présente instance ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de M.B..., sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 31 juillet 2017 du juge des référés du tribunal administratif de Marseille est annulée en tant qu'elle inflige à M. B...une amende pour recours abusif.

Article 2 : L'Etat versera à la SCP Monod, Colin, Stoclet, avocat de M.B..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cette société renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 5ème - 6ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 413619
Date de la décision : 18/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

PROCÉDURE - JUGEMENTS - FRAIS ET DÉPENS - REMBOURSEMENT DES FRAIS NON COMPRIS DANS LES DÉPENS - CONTESTATION D'UNE DÉCISION JURIDICTIONNELLE INFLIGEANT UNE AMENDE POUR RECOURS ABUSIF - ETAT AYANT LA QUALITÉ DE PARTIE - EXISTENCE - CONSÉQUENCE - POSSIBILITÉ DE CONDAMNER L'ETAT SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE L - 761-1 DU CJA - EXISTENCE [RJ1].

54-06-05-11 Annulation de l'ordonnance d'un juge des référés en tant qu'elle condamne un requérant à une amende pour recours abusif, dans un litige opposant l'Etat à un particulier.......La circonstance que le prononcé d'une amende pour recours abusif relève des pouvoirs propres du juge ne fait pas obstacle à ce que l'Etat soit regardé comme partie perdante dans l'instance.

PROCÉDURE - JUGEMENTS - AMENDE POUR RECOURS ABUSIF - CONTESTATION D'UNE DÉCISION JURIDICTIONNELLE INFLIGEANT UNE AMENDE POUR RECOURS ABUSIF - ETAT AYANT LA QUALITÉ DE PARTIE - EXISTENCE - CONSÉQUENCE - POSSIBILITÉ DE CONDAMNER L'ETAT SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE L - 761-1 DU CJA - EXISTENCE [RJ1].

54-06-055 Annulation de l'ordonnance d'un juge des référés en tant qu'elle condamne un requérant à une amende pour recours abusif, dans un litige opposant l'Etat à un particulier.......La circonstance que le prononcé d'une amende pour recours abusif relève des pouvoirs propres du juge ne fait pas obstacle à ce que l'Etat soit regardé comme partie perdante dans l'instance.


Références :

[RJ1]

Cf. CE, 8 avril 2009, Société Médiafi, n° 308907, inédite au Recueil.


Publications
Proposition de citation : CE, 18 jui. 2018, n° 413619
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Dominique Chelle
Avocat(s) : SCP MONOD, COLIN, STOCLET

Origine de la décision
Date de l'import : 25/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:413619.20180618
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