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06/06/2018 | FRANCE | N°402552

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 06 juin 2018, 402552


Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 14 octobre 2014 du préfet des Alpes-Maritimes refusant le renouvellement de son titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi et d'enjoindre à ce préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois. Par un jugement n° 1404588 du 12 février 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15MA01215 du 20 juin 20

16, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. ...

Vu la procédure suivante :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 14 octobre 2014 du préfet des Alpes-Maritimes refusant le renouvellement de son titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi et d'enjoindre à ce préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois. Par un jugement n° 1404588 du 12 février 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 15MA01215 du 20 juin 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par M. A...contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 août 2016, 16 novembre 2016 et 15 septembre 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Coralie Albumazard, maître des requêtes en service extraordinaire ;

- les conclusions de M. Louis Dutheillet de Lamothe, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de M.A....

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M.A..., de nationalité turque, est entré en France en mai 1980, où il a bénéficié d'un titre de séjour entre 1985 et 1995, puis entre 2003 et 2007. Après avoir réuni la commission du titre de séjour qui a émis un avis défavorable à son admission au séjour au regard notamment de son passé pénal, le préfet des Alpes-Maritimes a, par un arrêté du 14 octobre 2014, refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. A...se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille ayant rejeté son appel contre le jugement du tribunal administratif de Nice ayant rejeté son recours pour excès de pouvoir contre cet arrêté.

2. En premier lieu, en jugeant, après avoir relevé que l'arrêté attaqué visait les textes applicables ainsi que l'avis défavorable rendu par la commission du titre de séjour sur la demande de titre de M.A..., qu'il mentionnait des éléments circonstanciés relatifs tant au passé pénal qu'à la situation personnelle et familiale de ce dernier et qu'il faisait état de ce que ces éléments ne justifiaient pas son admission exceptionnelle au séjour à titre dérogatoire ni ne méconnaissaient les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que cet arrêté n'était pas entaché d'insuffisance de motivation, la cour administrative d'appel n'a pas dénaturé les pièces du dossier au regard des exigences précitées.

3. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". En outre, aux termes de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit, sauf s'il constitue une menace pour l'ordre public, " à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, (...) dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. "

4. D'une part, en jugeant qu'était en tout état de cause sans incidence sur l'appréciation portée par l'autorité administrative sur son passé pénal et les conséquences de ce dernier sur son intégration à la société française et son respect des valeurs de la République l'erreur de fait entachant l'arrêté attaqué en ce qui concerne la durée totale d'incarcération de M. A..., lequel ne contestait pas avoir fait l'objet entre 1987 et 2011 de quatorze condamnations à des peines délictuelles, dont plusieurs peines d'emprisonnement avec ou sans sursis, la cour administrative d'appel n'a pas entaché son arrêt de dénaturation.

5. D'autre part, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M.A..., qui est de nationalité turque, a résidé dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 26 ans, a été présent sur le territoire français et y a exercé une activité professionnelle à partir de l'année 1982 sans y avoir établi pour autant sa présence habituelle depuis lors, a fait l'objet de 14 condamnations pénales, dont plusieurs d'entre elles ont donné lieu à des peines d'emprisonnement entre les années 1992 et 2012. Dans ces conditions, la cour a pu juger, sans erreur de qualification juridique, qu'à supposer même qu'il ait repris une vie commune avec son épouse à l'issue de sa dernière incarcération, qui a pris fin le 5 décembre 2012, qu'il justifierait, en outre, de la présence régulière de plusieurs membres de sa famille dans les départements des Alpes-Maritimes et du Var et avoir noué certains liens personnels et professionnels depuis son arrivée en France, l'arrêté attaqué n'avait pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations et dispositions précitées.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ". Eu égard aux nombreuses condamnations dont M. A...a fait l'objet ainsi que du caractère discontinu de son activité professionnelle depuis 1982, c'est par une appréciation souveraine des faits, exempte de dénaturation, que la cour administrative d'appel a jugé que M. A...ne justifiait pas de l'existence de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires de nature à fonder sa régularisation exceptionnelle sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité.

7. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi de M. A...doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de M A...est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Monsieur B...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 402552
Date de la décision : 06/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 06 jui. 2018, n° 402552
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Coralie Albumazard
Rapporteur public ?: M. Louis Dutheillet de Lamothe
Avocat(s) : SCP THOUVENIN, COUDRAY, GREVY

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:402552.20180606
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