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23/05/2018 | FRANCE | N°418311

France | France, Conseil d'État, 5ème et 6ème chambres réunies, 23 mai 2018, 418311


Vu la procédure suivante :

M. B...A..., à l'appui de sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 13 décembre 2017 relatif au contenu de la notice d'information relative aux obligations du bailleur et aux voies de recours et d'indemnisation du locataire jointe au congé délivré par le bailleur en raison de sa décision de reprendre ou de vendre le logement, a produit deux mémoires, enregistrés les 27 février et 24 avril 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1

958, par lesquels il soulève la question de la conformité aux droits ...

Vu la procédure suivante :

M. B...A..., à l'appui de sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 13 décembre 2017 relatif au contenu de la notice d'information relative aux obligations du bailleur et aux voies de recours et d'indemnisation du locataire jointe au congé délivré par le bailleur en raison de sa décision de reprendre ou de vendre le logement, a produit deux mémoires, enregistrés les 27 février et 24 avril 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, par lesquels il soulève la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article 190 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ;

- la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 ;

- la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Florian Roussel, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 46 de la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis : " Toute promesse unilatérale de vente ou d'achat, tout contrat réalisant ou constatant la vente d'un lot ou d'une fraction de lot mentionne la superficie de la partie privative de ce lot ou de cette fraction de lot. La nullité de l'acte peut être invoquée sur le fondement de l'absence de toute mention de superficie. / Cette superficie est définie par le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article 47. / Les dispositions du premier alinéa ci-dessus ne sont pas applicables aux caves, garages, emplacements de stationnement ni aux lots ou fractions de lots d'une superficie inférieure à un seuil fixé par le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article 47. / Le bénéficiaire en cas de promesse de vente, le promettant en cas de promesse d'achat ou l'acquéreur peut intenter l'action en nullité, au plus tard à l'expiration d'un délai d'un mois à compter de l'acte authentique constatant la réalisation de la vente. / La signature de l'acte authentique constatant la réalisation de la vente mentionnant la superficie de la partie privative du lot ou de la fraction de lot entraîne la déchéance du droit à engager ou à poursuivre une action en nullité de la promesse ou du contrat qui l'a précédé, fondée sur l'absence de mention de cette superficie. / Si la superficie est supérieure à celle exprimée dans l'acte, l'excédent de mesure ne donne lieu à aucun supplément de prix. / Si la superficie est inférieure de plus d'un vingtième à celle exprimée dans l'acte, le vendeur, à la demande de l'acquéreur, supporte une diminution du prix proportionnelle à la moindre mesure. / L'action en diminution du prix doit être intentée par l'acquéreur dans un délai d'un an à compter de l'acte authentique constatant la réalisation de la vente, à peine de déchéance " ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes du premier alinéa du II de la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, dans sa rédaction initiale : " Lorsqu'il est fondé sur la décision de vendre le logement, le congé doit, à peine de nullité, indiquer le prix et les conditions de la vente projetée. Le congé vaut offre de vente au profit du locataire : l'offre est valable pendant les deux premiers mois du délai de préavis " ; que le I de l'article 190 de la loi du 13 décembre 2000 a complété cet alinéa par une phrase ainsi rédigée : " Les dispositions de l'article 46 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ne sont pas applicables au congé fondé sur la décision de vendre le logement " ; que le II de l'article 190 de cette loi dispose que : " Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés les congés fondés sur la décision de vendre le logement en tant qu'ils n'ont pas satisfait aux dispositions de l'article 46 mentionné au I ci-dessus " ;

4. Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article 190 de la loi du 13 décembre 2000 ne présentent aucune difficulté particulière d'interprétation, qui serait source d'insécurité juridique ; que, par suite, et en tout état de cause, le moyen tiré de ce que ces dispositions méconnaîtraient l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi ne présente pas de caractère sérieux ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions du II de l'article 190 de la loi du 13 décembre 2000 valident les congés pour vendre ne comportant pas l'indication de superficie du lot, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée avant leur entrée en vigueur ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient M.A..., ces dispositions ne renvoient pas à l'administration ou au juge le soin de décider de l'application de l'article 46 de la loi du 10 juillet 1965 au congé pour vendre ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'elles seraient entachées d'incompétence négative ne présente pas davantage, en tout état de cause, de caractère sérieux ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte des termes de l'article 46 de la loi du 10 juillet 1965, dans sa rédaction issue de loi du 18 décembre 1996 améliorant la protection des acquéreurs de lots de copropriété, que l'obligation de mentionner la superficie du lot vendu qu'il prévoit ne s'applique qu'à des contrats relatifs à la cession d'un logement, tels que les promesses unilatérales de vente ou d'achat ou les contrats de vente ; que cette obligation ne concerne donc pas, ainsi que l'a confirmé l'article 190 de la loi du 13 décembre 2000, le congé, fondé sur la décision de vendre le bien, que le propriétaire notifie au locataire, un tel acte, s'il ouvre au profit du locataire un droit de préemption au prix indiqué, ne résultant pas de la rencontre des volontés du bailleur et du preneur en vue d'une cession du logement à ce dernier ; que la différence de traitement qui en résulte entre le bénéficiaire d'une promesse unilatérale de vente et le locataire recevant notification d'un congé pour vendre est justifiée par la différence des situations juridiques dans lesquelles les intéressés se trouvent respectivement placés eu égard à la nature et à l'objet de ces actes ; qu'en particulier, la nullité de l'acte résultant du défaut de mention de la superficie, qui, s'agissant des promesses de vente, n'a d'incidence que sur l'obligation pour le bénéficiaire de s'acquitter de l'indemnité que le contrat a pu mettre à sa charge, aurait, si elle était étendue au congé pour vente, des conséquences sur le droit du locataire de se maintenir dans les lieux ; qu'en outre, le locataire dispose de la partie privative en cause, dont il lui est loisible de constater ou de faire vérifier la superficie ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article 190 de la loi du 13 décembre 2000 méconnaîtraient le principe constitutionnel d'égalité devant la loi ne présente pas non plus de caractère sérieux ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; que, par suite, il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

D E C I D E :

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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité à la Constitution de l'article 190 de la loi du 13 décembre 2000.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et au ministre de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 5ème et 6ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 418311
Date de la décision : 23/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 mai. 2018, n° 418311
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Florian Roussel
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:418311.20180523
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