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19/01/2018 | FRANCE | N°403871

France | France, Conseil d'État, 5ème - 4ème chambres réunies, 19 janvier 2018, 403871


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 28 septembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...A...demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 29 juillet 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de proposer au président de la République de rapporter le décret du 20 novembre 2006 le révoquant de ses fonctions de commissaire de police.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;r>
- le code pénal ;

- le code de procédure pénale ;

- le code de justice administrative ;
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Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 28 septembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...A...demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 29 juillet 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé de proposer au président de la République de rapporter le décret du 20 novembre 2006 le révoquant de ses fonctions de commissaire de police.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code pénal ;

- le code de procédure pénale ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Briard, avocat de M.A....

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A...a été révoqué, à titre disciplinaire, de ses fonctions de commissaire de police par décret du 20 novembre 2006 en raison d'agissements qui ont ultérieurement motivé sa condamnation, par un jugement du tribunal correctionnel de Versailles du 12 mai 2010 confirmé par un arrêt de la cour d'appel de Versailles du 7 avril 2011, devenu définitif, à une peine d'emprisonnement de dix-huit mois avec sursis et à la peine complémentaire de l'interdiction définitive d'exercer toute fonction publique et toute activité professionnelle dans la police nationale et municipale ; que, par une lettre du 29 mai 2016 adressée au ministre de l'intérieur, l'intéressé a demandé le retrait du décret du 20 novembre 2016 en produisant un document délivré le 23 mai 2016 par le greffe de l'exécution des peines du tribunal de grande instance de Versailles, ne faisant apparaître aucune condamnation inscrite au bulletin n° 2 de son casier judiciaire, document dont il déduisait qu'il se trouvait réhabilité ; que, par une décision du 29 juillet 2016, le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande au motif que ce document n'avait pas d'incidence sur " la matérialité, la nature et la particulière gravité " des faits qui avaient motivé sa révocation ; que M. A...demande l'annulation pour excès de pouvoir de cette décision, qui doit être regardée comme le refus du ministre de l'intérieur de proposer au Président de la République de rapporter le décret du 20 novembre 2006 ; que le requérant soulève, à l'appui de sa requête, la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du premier alinéa de l'article 131-27 du code pénal ;

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

3. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 131-27 du code pénal : " Lorsqu'elle est encourue à titre de peine complémentaire pour un crime ou un délit, l'interdiction d'exercer une fonction publique ou d'exercer une activité professionnelle ou sociale est soit définitive, soit temporaire ; dans ce dernier cas, elle ne peut excéder une durée de cinq ans " ; que le requérant soutient que ces dispositions législatives, sur le fondement desquelles la juridiction pénale a prononcé à son encontre la peine complémentaire de l'interdiction définitive d'exercer toute fonction publique et toute activité professionnelle dans la police, méconnaissent le principe d'individualisation des peines protégé par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, faute de permettre le prononcé d'une peine intermédiaire entre l'interdiction d'exercer une fonction publique ou une activité professionnelle ou sociale pour cinq ans et l'interdiction définitive ; que, toutefois, ces dispositions ne peuvent être regardées, au sens et pour l'application de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, comme applicables au présent litige, qui porte sur la légalité d'une décision par laquelle le ministre de l'intérieur a estimé qu'il n'y avait pas lieu de rapporter une sanction disciplinaire ; qu'ainsi, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que le premier alinéa de l'article 131-27 du code pénal porterait atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté ;

Sur la requête de M.A... :

4. Considérant que, pour prendre la décision attaquée, le ministre de l'intérieur ne s'est pas fondé sur l'interdiction professionnelle définitive prononcée par le tribunal correctionnel de Versailles ; que la circonstance que la condamnation pénale qui a été infligée à M. A...à raison des faits qui avaient auparavant motivé sa révocation ne serait plus mentionnée au bulletin n° 2 de son casier judiciaire n'est pas de nature à imposer au Président de la République de rapporter cette mesure administrative ni à faire regarder le refus du ministre de l'intérieur de proposer un tel retrait comme entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de M. A...doit être rejetée, sans qu'il soit besoin d'examiner sa recevabilité ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M.A....

Article 2 : La requête de M. A...est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B...A..., au Conseil constitutionnel et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 5ème - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 403871
Date de la décision : 19/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 19 jan. 2018, n° 403871
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Langlais
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge
Avocat(s) : SCP BRIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 23/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:403871.20180119
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