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15/01/2018 | FRANCE | N°410701

France | France, Conseil d'État, 2ème chambre, 15 janvier 2018, 410701


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 19 mai 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 24 octobre 2016 rapportant le décret du 27 février 2014 qui lui avait accordé la nationalité française ;

2°) d'enjoindre au Premier ministre de le réintégrer dans la nationalité française ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 761-1 du code de justice administrative.

Vu les

autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code de justice administrative ;

Apr...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 19 mai 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...B...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 24 octobre 2016 rapportant le décret du 27 février 2014 qui lui avait accordé la nationalité française ;

2°) d'enjoindre au Premier ministre de le réintégrer dans la nationalité française ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Barrois de Sarigny, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public,

1. Considérant qu'aux termes de l'article 27-2 du code civil : " Les décrets portant acquisition, naturalisation ou réintégration peuvent être rapportés sur avis conforme du Conseil d'Etat dans le délai de deux ans à compter de leur publication au Journal officiel si le requérant ne satisfait pas aux conditions légales ; si la décision a été obtenue par mensonge ou fraude, ces décrets peuvent être rapportés dans le délai de deux ans à partir de la découverte de la fraude " ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces de dossier que M. B..., ressortissant marocain, a déposé une demande de naturalisation le 29 avril 2013 dans laquelle il a indiqué être célibataire ; qu'au vu de ses déclarations, il a été naturalisé par décret du 27 février 2014, publié au Journal officiel du 1er mars 2014 ; que par un bordereau du 3 novembre 2014 reçu le 5 novembre, le ministre des affaires étrangères et du développement international a informé le ministre chargé des naturalisations que M. B...avait épousé au Maroc, le 15 août 2013, une ressortissante marocaine ; que, par le décret attaqué, le Premier ministre a rapporté le décret du 27 février 2014 prononçant la naturalisation de M. B...au motif qu'il avait été pris au vu d'informations mensongères délivrées par l'intéressé sur sa situation familiale ;

3. Considérant que le délai de deux ans imparti pour rapporter le décret de naturalisation de M. B...a commencé à courir à la date à laquelle la réalité de la situation familiale de l'intéressé a été portée à la connaissance du ministre chargé des naturalisations ; qu'il ressort des pièces du dossier que ce ministre n'en a été informé que le 5 novembre 2014, date à laquelle il a reçu du ministre des affaires étrangères les éléments relatifs à la situation familiale de M. B...; qu'ainsi, le décret du 24 octobre 2016 a été pris dans le délai prévu par les dispositions de l'article 27-2 du code civil ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 21-16 du code civil : " Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation " ; qu'il résulte de ces dispositions que la demande de naturalisation n'est pas recevable lorsque l'intéressé n'a pas fixé en France de manière stable le centre de ses intérêts ; que pour apprécier si cette condition se trouve remplie, l'autorité administrative peut notamment prendre en compte, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la situation familiale en France de l'intéressé ; que par suite, ainsi que l'énonce le décret attaqué, la circonstance que M. B... ait dissimulé s'être marié au Maroc était de nature à modifier l'appréciation qui a été portée par l'autorité administrative sur la fixation du centre de ses intérêts ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le mariage contracté le 15 août 2013 par M. B...postérieurement au dépôt de sa demande de naturalisation a constitué un changement de sa situation personnelle et familiale qu'il aurait dû porter à la connaissance des services instruisant sa demande de naturalisation ; que, si l'intéressé soutient avoir informé l'administration de ce mariage par courrier du 29 octobre 2013, il ne ressort d'aucune pièce versée au dossier que cette démarche aurait été effectuée avant l'intervention du décret lui accordant la nationalité française le 27 février 2014 ; que le 17 septembre 2013 lors de l'entretien d'assimilation, il n'a mentionné au titre des attaches familiales conservées au Maroc que son grand-père ; que l'intéressé, qui maîtrise la langue française ainsi qu'il ressort du procès-verbal d'assimilation versé au dossier, ne pouvait se méprendre sur la portée de la déclaration qu'il a signée en déposant sa demande de naturalisation ; qu'il doit être regardé comme ayant sciemment dissimulé le changement de sa situation familiale avant que ne soit prononcée sa naturalisation par l'effet du décret du 27 février 2014 ; que, par suite, en rapportant la naturalisation de M.B..., le Premier ministre n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article 27-2 du code civil ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 24 octobre 2016 rapportant le décret du 27 février 2014 lui accordant la nationalité française ; que ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 410701
Date de la décision : 15/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 jan. 2018, n° 410701
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Cécile Barrois de Sarigny
Rapporteur public ?: M. Xavier Domino

Origine de la décision
Date de l'import : 23/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2018:410701.20180115
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