Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 25 avril et 9 juin 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C...D...demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 25 juillet 1986 le libérant de ses liens d'allégeance à l'égard de la France ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le code de la nationalité française ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. François Weil, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Xavier Domino, rapporteur public,
1. Considérant qu'aux termes de l'article 91 du code de la nationalité française, en vigueur à la date du décret contesté : " Perd la nationalité française, le Français même mineur, qui, ayant une nationalité étrangère, est autorisé, sur sa demande, par le Gouvernement français, à perdre la qualité de Français. / Cette autorisation est accordée par décret. / Le mineur doit, le cas échéant, être autorisé ou représenté dans les conditions prévues aux articles 53 et 54 " ; qu'il résulte des dispositions combinées des articles 53 et 54 du même code que, pour un mineur jusqu'à seize ans, la demande est présentée, au nom de ce dernier, par la ou les personnes exerçant à son égard l'autorité parentale ; que, selon l'article 372 du code civil, dans sa rédaction applicable à la date du décret attaqué : " Pendant le mariage, les père et mère exercent en commun leur autorité " ; qu'aux termes de l'article 373 du même code : " Perd l'exercice de l'autorité parentale ou en est provisoirement privé celui des père et mère qui se trouve dans l'un des cas suivants : / 1° S'il est hors d'état de manifester sa volonté, en raison de son incapacité, de son absence, de son éloignement ou de toute autre cause (...) " ;
2. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la faculté ouverte à un mineur jusqu'à seize ans d'être autorisé par décret à perdre la qualité de Français ne peut résulter que de la demande de ses deux parents s'ils sont mariés et titulaires de l'autorité parentale ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les deux parents du requérant, M. B...D...et son épouse, Mme E...A..., de nationalité sénégalaise, ont demandé au ministre des affaires sociales et de l'emploi de libérer leur fils mineur M. C...D..., né le 4 juin 1985, de ses liens d'allégeance envers la France, en application de l'article 91 du code de la nationalité française ; que cette démarche a été régulièrement entreprise afin de permettre à M. B...D...de remplir les conditions prévues pour bénéficier de l'aide publique à la réinsertion, instituée par le décret du 27 avril 1984 créant une aide publique à la réinsertion des travailleurs étrangers ; qu'il ressort des pièces du dossier que les deux parents exerçaient l'autorité parentale et ont exprimé chacun, par lettre signée de leur main, leur volonté de solliciter la perte de la nationalité française pour leur enfant mineur ; que la circonstance aujourd'hui alléguée que Mme A...ne comprenait pas à l'époque le français et qu'elle indique, par une déclaration faite le 13 avril 2017, qu'elle n'avait pas saisi la portée juridique du décret du 25 juillet 1986, n'est pas de nature à établir qu'elle n'aurait pas donné, conjointement avec son mari, son consentement préalable à la libération des liens d'allégeance de son fils avec la France, alors que font état de ce consentement une lettre du maire de Champagnole en date du 14 mai 1986 et l'avis du préfet, commissaire de la République du Jura en date du 22 mai 1986 figurant au dossier ; qu'ainsi, en estimant que la volonté des deux parents avait été valablement exprimée à la date de signature du décret attaqué, l'autorité administrative n'a pas fait une inexacte application des dispositions du code de la nationalité française ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à demander l'annulation, pour excès de pouvoir, du décret du 25 juillet 1986 en tant que ce décret l'a libéré de ses liens d'allégeance à l'égard de la France ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. C...D...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.