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20/10/2017 | FRANCE | N°400122

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 20 octobre 2017, 400122


Vu la procédure suivante :

L'association " Ecologie-société " a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, le refus implicite de l'Office national des forêts (ONF) de lui fournir des informations sur le lieu de replantation des arbres de la forêt de la Verrière, arrachés à la suite des travaux de construction des bretelles de l'autoroute " A 86 ", et d'autre part, le refus implicite de lui communiquer les procès-verbaux d'adjudication et les engagements d'achat émis sur les cinq dernières années relatifs aux ventes de bois

issu de la forêt de la Verrière. Par un jugement n° 1401919 du 31 m...

Vu la procédure suivante :

L'association " Ecologie-société " a demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, le refus implicite de l'Office national des forêts (ONF) de lui fournir des informations sur le lieu de replantation des arbres de la forêt de la Verrière, arrachés à la suite des travaux de construction des bretelles de l'autoroute " A 86 ", et d'autre part, le refus implicite de lui communiquer les procès-verbaux d'adjudication et les engagements d'achat émis sur les cinq dernières années relatifs aux ventes de bois issu de la forêt de la Verrière. Par un jugement n° 1401919 du 31 mars 2016, le tribunal administratif de Versailles a fait droit à sa requête.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 25 mai 2016, 8 août 2016 et le 25 septembre 2017, l'Office national des forêts demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de mettre à la charge de l'association " Ecologie-société " la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que le tribunal administratif de Versailles a entaché son jugement :

- d'erreur de droit en admettant la compétence de la juridiction administrative ;

- d'insuffisance de motivation en ne répondant pas au moyen tiré de ce que les demandes de l'association se heurtaient au secret en matière commerciale et industrielle ;

- d'erreur de droit en jugeant qu'il y avait lieu de statuer sur la demande de communication alors que les documents en cause avaient été mis à la disposition du public sur un site internet ;

- d'erreur de droit en ne relevant pas d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande de l'association, qui n'avait pas été précédée de la saisine pour avis de la commission d'accès aux documents administratifs ;

- de dénaturation des pièces du dossier en ne jugeant pas que l'association avait saisi pour avis la Commission d'accès aux documents administratifs de l'ensemble de ses demandes de communication.

Le pourvoi a été communiqué à l'association " Ecologie-société ", au ministre de l'agriculture et de l'alimentation et au ministre de la transition écologique et solidaire qui n'ont pas produit de mémoires.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Isabelle Lemesle, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP de Nervo, Poupet, avocat de l'Office national des forêts ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'association " Ecologie-société " a demandé le 10 mars 2014 au tribunal administratif de Versailles d'annuler pour excès de pouvoir les refus implicites de l'Office national des forêts (ONF) d'une part, de lui indiquer le lieu de plantation des arbres de la forêt de la Verrière arrachés à la suite des travaux de construction des bretelles de l'autoroute " A 86 ", d'autre part, de lui communiquer les procès-verbaux d'adjudication et les engagements d'achat émis sur les cinq dernières années relatifs aux ventes du bois issu de la forêt de la Verrière. L'ONF se pourvoit en cassation contre le jugement du 31 mars 2016 du tribunal administratif de Versailles qui a fait droit à la requête de l'association " Ecologie-société " qui, contrairement à ce qui est soutenu, était compétent pour connaître du litige qui ne relève pas de la juridiction judiciaire.

Sur la demande de communication d'informations relatives au lieu de replantation des arbres de la forêt de la Verrière :

2. Aux termes de l'article L. 124-1 du code de l'environnement, dans sa rédaction applicable au litige : " Le droit de toute personne d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues, reçues ou établies par les autorités publiques mentionnées à l'article L. 124-3 ou pour leur compte s'exerce dans les conditions définies par les dispositions du titre Ier de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, sous réserve des dispositions du présent chapitre " . Aux termes du quatrième alinéa de l'article 20 de la loi du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, alors en vigueur, la saisine pour avis de la commission d'accès aux documents administratif " est un préalable obligatoire à l'exercice d'un recours contentieux ".

3. Il ressort tant de la saisine de la commission d'accès aux documents administratifs (CADA), effectuée le 7 février 2014 par l'association " Ecologie-société ", que de l'avis de cette commission émis le 13 mars 2014, qu'elle n'a été consultée et ne s'est prononcée que sur la demande de communication des procès-verbaux d'adjudication et des engagements d'achats de bois, à l'exclusion de toute question relative à la replantation des arbres de la forêt de la Verrière. Il s'ensuit qu'en admettant la recevabilité de la demande de l'association requérante tendant à la communication des informations relatives au lieu de replantation des arbres arrachés dans la forêt de la Verrière, alors que celle-ci n'avait été précédée d'aucune saisine de la CADA, le tribunal administratif de Versailles a entaché son jugement d'erreur de droit.

Sur la demande de communication des procès-verbaux d'adjudication et des engagements d'achat émis sur ces cinq dernières années relatifs aux ventes de bois issu de la forêt de la Verrière :

4. Aux termes de l'article L. 124-4 du code de l'environnement, dans sa rédaction alors applicable : " I.-Après avoir apprécié l'intérêt d'une communication, l'autorité publique peut rejeter la demande d'une information relative à l'environnement dont la consultation ou la communication porte atteinte : 1° Aux intérêts mentionnés à l'article 6 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 précitée, à l'exception de ceux visés au e et au h du 2° du I de cet article (...) ". Aux termes de l'article 6 de la loi du 17 juillet 1978, alors en vigueur : " (...) II.-Ne sont communicables qu'à l'intéressé les documents administratifs : - dont la communication porterait atteinte à la protection de la vie privée, au secret médical et au secret en matière commerciale et industrielle (...) ".

5. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que les informations en matière environnementale, au sens de l'article L. 124-1 du code de l'environnement, sont communicables dans les conditions prévues par l'ensemble du titre Ier de la loi du 17 juillet 1978. S'y appliquent dès lors les exceptions au droit de communication prévues par le II de l'article 6 de cette loi. Il s'ensuit qu'en ne répondant pas au moyen soulevé en défense dans les écritures de l'ONF, tiré de ce que le secret des affaires faisait obstacle à la communication d'informations relatives aux ventes de bois entre professionnels, le tribunal administratif de Versailles a insuffisamment motivé son jugement.

6. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que l'Office national des forêts est fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association " Ecologie-société " une somme de 3 000 à verser à l'Office national des forêts.

D E C I D E :

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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Versailles du 31 mars 2016 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Versailles.

Article 3 : L'association " Ecologie-société " versera la somme de 3 000 euros à l'Office national des forêts au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'Office national des forêts et à l'association " Ecologie-société ".


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 400122
Date de la décision : 20/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 oct. 2017, n° 400122
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Isabelle Lemesle
Rapporteur public ?: Mme Aurélie Bretonneau
Avocat(s) : SCP DE NERVO, POUPET

Origine de la décision
Date de l'import : 24/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:400122.20171020
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