Vu les procédures suivantes :
1° L'association Union départementale de la consommation, du logement et du cadre de vie du Var (CLCV UD 83), MmeR..., Mme P...E..., M. J... F..., M. I...Q..., Mme B...K..., épouseG..., Mme M... C..., M. L... A..., MmeS..., M. N...O...et Mme H...D...ont demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler les opérations électorales qui se sont déroulées le 10 décembre 2014 pour l'élection des représentants des locataires au sein du conseil d'administration de l'office public d'habitation (OPH) " Terres du Sud Habitat ". Par un jugement n° 1404568 du 20 mars 2015, le tribunal administratif a fait droit à leur demande.
Par un arrêt n° 15MA02089 du 11 janvier 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par l'OPH " Terres du Sud Habitat " contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 11 mars et 13 juin 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 397853, l'OPH " Terres du Sud Habitat " demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'association CLCV UD 83 et des autres demandeurs la somme globale de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2° L'association Force ouvrière (FO) des consommateurs a demandé au tribunal administratif de Toulon, par une requête en tierce opposition, de déclarer nul et non avenu le jugement n° 1404568 du 20 mars 2015 par lequel ce tribunal, statuant sur la demande de l'union départementale de la consommation, du logement et du cadre de vie du Var (CLCV UD 83), de MmeR..., de Mme P...E..., de M. J... F..., de M. I... Q..., de Mme B...K..., épouseG..., de Mme M... C..., de M. L... A..., de MmeS..., de M. N...O...et de Mme H...D..., a annulé les opérations électorales qui se sont déroulées le 10 décembre 2014 pour l'élection des représentants des locataires au sein du conseil d'administration de l'office public d'habitation " Terres du Sud Habitat ". Par un jugement n° 1501752 du 8 juillet 2015, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 15MA03048 du 11 janvier 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par l'association FO des consommateurs contre ce jugement.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 mars et 15 juin 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat sous le n° 397882, l'association FO des consommateurs demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge des défenseurs la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Garreau, Bauer-Violas, avocat de l'Office public de l'Habitat "Terres du sud habitat", à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de l'Union départementale de la consommation du logement et du cadre de vie du Var et à Me Haas, avocat de l'association Force Ouvrière des consommateurs.
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'association Union départementale de la consommation, du logement et du cadre de vie du Var (CLCV UD 83) et l'association Force Ouvrière (FO) des consommateurs ont chacune présenté une liste de candidats en vue de l'élection des représentants des locataires au conseil d'administration de l'OPH " Terres du Sud Habitat " de La-Seyne-sur-Mer ; que, par une décision du 24 octobre 2014, l'OPH a écarté la liste de l'association CLCV UD 83 ; qu'à l'issue des opérations électorales qui se sont déroulées le 10 décembre 2014, les candidats de la liste présentée par l'association FO des consommateurs ont été proclamés élus ; que, par un jugement du 20 mars 2015, le tribunal administratif de Toulon, statuant sur une protestation présentée par l'association CLCV UD 83 et par les personnes qui figuraient sur sa liste, a annulé les opérations électorales au motif que la décision de l'OPH écartant la liste de l'association CLCV UD 83 était illégale ; qu'alors qu'un appel de l'OPH " Terres du sud habitat " contre ce jugement était pendant devant la cour administrative d'appel de Marseille, l'association FO des consommateurs a formé tierce-opposition devant le tribunal administratif afin que le jugement, rendu à l'issue d'une instance à laquelle elle n'avait pas été appelée, soit déclaré nul et non avenu ; que le tribunal a rejeté cette tierce-opposition par un jugement du 8 juillet 2015, dont l'association FO des consommateurs a relevé appel ; que, par deux arrêts du 11 janvier 2016, la cour a rejeté les appels dont elle était saisie ; que, par des pourvois qu'il y a lieu de joindre pour statuer par une seule décision, l'OPH " Terres du sud habitat " et l'association FO des consommateurs demandent l'annulation, respectivement, de l'arrêt rejetant l'appel de l'OPH contre le premier jugement et de l'arrêt rejetant l'appel de l'association contre le second ;
2. Considérant qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 421-9 du code de la construction et de l'habitation, dans sa rédaction applicable au litige, les représentants des locataires au conseil d'administration des offices publics de l'habitat (OPH) " sont élus sur des listes de candidats présentées par des associations oeuvrant dans le domaine du logement. / Ces associations doivent être indépendantes de tout parti politique ou organisation à caractère philosophique, confessionnel, ethnique ou racial et ne pas poursuivre des intérêts collectifs qui seraient en contradiction avec les objectifs du logement social fixés par le code de la construction et de l'habitation (...) " ; qu'aux termes du septième alinéa de l'article R. 421-7 du même code : " 2° Sont éligibles, à l'exclusion des personnes membres du personnel de l'office en qualité de salarié ou de fonctionnaire, les personnes physiques, âgées de dix-huit ans au minimum et ne tombant pas sous le coup des dispositions de l'article L. 423-12, qui sont locataires d'un local à usage d'habitation et peuvent produire soit la quittance correspondant à la période de location précédant l'acte de candidature, soit le reçu mentionné à l'article 21 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, soit la décision de justice octroyant les délais de paiement du loyer ou des charges ; chaque contrat de location ne donne droit à la présentation que d'une seule candidature " ; qu'aux termes du neuvième alinéa du même article : " Les listes de candidats, présentées par des associations remplissant les conditions prévues à l'article L. 421-9, comportent chacune six noms pour un conseil d'administration de dix-sept membres, huit noms pour un conseil d'administration de vingt-trois membres ou dix noms pour un conseil d'administration de vingt-sept membres. Elles doivent parvenir à l'office au plus tard six semaines avant la date de l'élection. Un mois au moins avant cette dernière date, l'office porte ces listes à la connaissance des personnes mentionnées au 1°. Toute contestation relative à l'inscription sur ces listes est soumise au juge d'instance qui statue dans les conditions prévues par le code électoral " ; qu'aux termes du quatorzième alinéa du même article : " Les réclamations contre les opérations électorales sont portées devant le tribunal administratif du lieu du siège de l'office dans les quinze jours suivant le dépouillement. Le tribunal statue dans un délai de trois mois à compter de l'enregistrement de la réclamation au greffe (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 771-2 du code de justice administrative : " Lorsque la solution d'un litige dépend d'une question soulevant une difficulté sérieuse et relevant de la compétence de la juridiction judiciaire, la juridiction administrative initialement saisie la transmet à la juridiction judiciaire compétente. Elle sursoit à statuer jusqu'à la décision sur la question préjudicielle " ;
3. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article R. 421-7 du code de la construction et de l'habitation qu'il appartient au tribunal administratif de connaître des réclamations contre les opérations électorales organisées en vue de désigner les représentants des locataires au conseil d'administration des offices publics de l'habitat ; que le tribunal administratif est à ce titre compétent pour se prononcer sur la recevabilité d'une liste au regard des dispositions du neuvième alinéa de l'article R. 421-7, en vertu desquelles les listes doivent être présentées par des associations remplissant les conditions prévues à l'article L. 421-9, comporter, selon les cas, six, huit ou dix noms et parvenir à l'office au plus tard six semaines avant la date de l'élection ; qu'en revanche, lorsque l'auteur d'une réclamation contre les opérations électorales soutient qu'un candidat proclamé élu ne remplit pas les conditions d'éligibilité prévues au 2° de l'article R. 421-7 ou que l'office a à tort refusé d'enregistrer une liste au motif qu'un ou plusieurs candidats ne remplissaient pas ces conditions, le tribunal administratif, auquel le délai de trois mois pour statuer n'est pas imposé à peine de dessaisissement, doit, par application de l'article R. 771-2 du code de justice administrative, dès lors du moins que cette contestation soulève une difficulté sérieuse, saisir le tribunal d'instance à titre préjudiciel et surseoir à statuer sur la réclamation ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en confirmant l'annulation des opérations électorales litigieuses au motif que le refus de l'OPH " Terres du sud habitat " d'enregistrer la liste de l'association CLCV UD 83 reposait sur une inexacte application des critères d'éligibilité fixés par l'article R. 421-7 du code de la construction et de l'habitation, sans rechercher si la question de l'éligibilité des candidats en cause soulevait une difficulté sérieuse de nature à justifier qu'elle soit transmise, à titre préjudiciel, au tribunal d'instance, la cour a commis une erreur de droit qui justifie, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du second pourvoi, l'annulation de ses deux arrêts ;
5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler les affaires au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
6. Considérant que, par une décision du 24 octobre 2014, l'OPH " Terres du sud habitat " a refusé de diffuser la liste de l'association CLCV UD 83 au motif que six des candidats figurant sur cette liste étaient débiteurs de charges locatives à la date de son dépôt et se trouvaient de ce fait inéligibles par application du 2° de l'article R. 421-7 du code de la construction et de l'habitation ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que, si l'office a demandé le règlement des sommes en cause, qui correspondaient à des régularisations de charges, par des avis complémentaires d'avoir à payer émis le 6 septembre 2014, il a, par une note distincte, informé les locataires que ces sommes ne seraient exigibles qu'à compter du 15 octobre 2014 ; que cette note ne fixait pas de délai pour s'acquitter des sommes dues ; qu'ainsi, la circonstance qu'un locataire n'était pas en mesure de produire une quittance attestant leur versement lors du dépôt des listes, qui devait intervenir au plus tard le 22 octobre 2014, ne pouvait conduire à le regarder comme inéligible au regard des dispositions du 2° de l'article R. 421-7 ; qu'en soutenant que, pour refuser de diffuser sa liste, l'OPH a méconnu ces dispositions, l'association CLCV UD 83 soumet au juge une contestation relative à l'éligibilité de candidats qui, ne soulevant aucune difficulté sérieuse, peut être tranchée par le juge administratif saisi de sa réclamation contre les opérations électorales ; qu'il suit de là, sans qu'il soit besoin de saisir le tribunal d'instance à titre préjudiciel, que l'OPH " Terres du sud habitat " n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par son jugement n° 1404568 du 20 mars 2015, le tribunal administratif de Toulon a annulé les opérations électorales litigieuses ; que l'association Force ouvrière des consommateurs n'est pas davantage fondée à se plaindre de ce que, par son jugement n° 1501752 du 8 juillet 2015, ce tribunal a rejeté la tierce-opposition qu'elle a formée contre le précédent jugement ;
7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'association CLCV UD 83 et autres, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, au titre des mêmes dispositions, de mettre à la charge de l'OPH " Terres du sud habitat " et de l'association FO des consommateurs, chacun, la somme de 3 000 euros à verser à l'association CLCV UD 83 et la somme de 300 euros à verser à chacun des dix candidats évincés ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les arrêts n° 15MA02089 et n° 15MA03048 du 11 janvier 2016 de la cour administrative d'appel de Marseille sont annulés.
Article 2 : Les requêtes présentées par l'OPH " Terres du sud habitat " et l'association FO des consommateurs devant la cour administrative d'appel de Marseille sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions présentées par l'OPH " Terres du sud habitat " et l'association FO des consommateurs au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. L'OPH " Terres du sud habitat " et l'association FO des consommateurs verseront chacun la somme de 3 000 euros à l'association CLCV UD 83 et la somme de 300 euros à chacun des dix candidats évincés au titre des mêmes dispositions.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'office public d'habitation " Terres du sud habitat ", à l'association Force ouvrière des consommateurs, à l'association Union départementale de la consommation, du logement et du cadre de vie du Var, à MmeR..., à Mme P...E..., à M. J... F..., à M. I...Q..., à Mme B...K..., épouseG..., à Mme M... C..., à M. L... A..., à Mme S..., à M. N...O...et à Mme H...D....