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19/07/2017 | FRANCE | N°409950

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 19 juillet 2017, 409950


Vu la procédure suivante :

M. C...E..., M. D...A...et M. B...F...ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Lille, d'une part, d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a rejeté leur demande de réouverture du bureau central de la main d'oeuvre du port de Calais, jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de cette décision, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de procéder à la réouverture d

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Vu la procédure suivante :

M. C...E..., M. D...A...et M. B...F...ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Lille, d'une part, d'ordonner, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de l'exécution de la décision implicite par laquelle le préfet du Pas-de-Calais a rejeté leur demande de réouverture du bureau central de la main d'oeuvre du port de Calais, jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de cette décision, d'autre part, d'enjoindre au préfet du Pas-de-Calais de procéder à la réouverture du bureau central de la main d'oeuvre du port de Calais, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'ordonnance du juge des référés, sous astreinte de 500 euros par jour de retard. Par une ordonnance n°1702125 du 4 avril 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 avril et 5 mai 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M.E..., M. A...et M. F... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à leur demande.

Par un mémoire, enregistré le 5 mai 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, M. E...et autres demandent au Conseil d'État, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 et à l'appui de leur pourvoi, de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution de l'article 41 de la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999.

Ils soutiennent que ces dispositions méconnaissent le droit à l'emploi garanti par le cinquième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 et la liberté d'entreprendre protégée par l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

Par un mémoire, enregistré le 16 juin 2017, le ministre des solidarités et de la santé soutient que les conditions posées par l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 ne sont pas remplies.

Le mémoire a été communiqué au Premier ministre et au ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, qui n'ont pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998, notamment l'article 41 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Didier Ribes, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Louis Dutheillet de Lamothe, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Rousseau, Tapie, avocat de M.E..., de M. A...et de M. F...;

Sur la question prioritaire de constitutionnalité :

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) " ; qu'il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 de financement de la sécurité sociale pour 1999 : " I. (...) Le bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité est ouvert aux ouvriers dockers professionnels et personnels portuaires assurant la manutention sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent les conditions suivantes : / 1° Travailler ou avoir travaillé, au cours d'une période déterminée, dans un port au cours d'une période pendant laquelle était manipulé de l'amiante; la liste de ces ports et, pour chaque port, de la période considérée est fixée par arrêté conjoint des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale, des transports et du budget ; / 2° Avoir atteint l'âge de soixante ans diminué du tiers de la durée du travail effectué dans les ports visés au 1°, sans que cet âge puisse être inférieur à cinquante ans. / (...) Le bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité ne peut se cumuler ni avec l'un des revenus ou l'une des allocations mentionnées à l'article L. 131-2 du code de la sécurité sociale ni avec un avantage de vieillesse ou d'invalidité. / (...) V.-Le salarié qui est admis au bénéfice de l'allocation de cessation anticipée d'activité présente sa démission à son employeur. Le contrat de travail cesse de s'exécuter dans les conditions prévues à l'article L. 122-6 du code du travail. Cette rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié ouvre droit, au bénéfice du salarié, au versement par l'employeur d'une indemnité de cessation d'activité d'un montant égal à celui de l'indemnité de départ en retraite prévue par le premier alinéa de l'article L. 122-14-13 du code du travail et calculée sur la base de l'ancienneté acquise au moment de la rupture du contrat de travail, sans préjudice de l'application de dispositions plus favorables prévues en matière d'indemnité de départ à la retraite par une convention ou un accord collectif de travail ou par le contrat de travail. / (...) " ;

3. Considérant que M. E...et autres soutiennent que les dispositions de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 portent atteinte au droit à l'emploi garanti par le cinquième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 et à la liberté d'entreprendre protégée par l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 en ce qu'elles interdisent aux bénéficiaires de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs exposés à l'amiante d'exercer, à l'avenir, toute activité professionnelle ; que, toutefois, ces dispositions n'interdisent pas aux bénéficiaires de cette allocation de reprendre une activité professionnelle mais seulement de cumuler le bénéfice de cette allocation avec un emploi ; que, dès lors, la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; que, par suite, il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;

Sur les autres moyens du pourvoi :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux. " ;

5. Considérant que pour demander l'annulation de l'ordonnance qu'ils attaquent, M. E...et autres soutiennent que le juge des référés a commis une erreur de droit en leur faisant application des dispositions de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 ; qu'en retenant qu'ils avaient renoncé à l'exercice de toute activité professionnelle, il a entaché son ordonnance d'erreur de droit et de dénaturation des faits de l'espèce ; qu'il a entaché son ordonnance d'une erreur de droit en estimant que les dispositions de l'article 41 impliquaient l'engagement irrévocable de renoncer à toute activité professionnelle ;

6. Considérant qu'aucun de ces moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par M. E...et autres.

Article 2 : Le pourvoi de M. E...et autres n'est pas admis.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. C...E..., premier dénommé, pour l'ensemble des requérants, et à la ministre des solidarités et de la santé.

Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel, au Premier ministre et au ministre d'Etat, ministre de la transition écologique et solidaire.


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 409950
Date de la décision : 19/07/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 2017, n° 409950
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Didier Ribes
Rapporteur public ?: M. Louis Dutheillet de Lamothe
Avocat(s) : SCP ROUSSEAU, TAPIE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:409950.20170719
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