Vu la procédure suivante :
La société Artec et M. B...A...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier notamment, d'une part, d'annuler la décision du 11 mars 2011 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de la région Languedoc-Roussillon a annulé l'enregistrement de la déclaration d'activité au titre de la formation professionnelle continue de la société en date du 2 avril 2004 et, d'autre part, de condamner l'Etat à verser à la société une somme de 1 546 061 euros en réparation des préjudices subis du fait des fautes commises par l'administration. Par un jugement n°s 1102080, 1102198, 1102417 du 31 décembre 2013, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leurs demandes.
Par un arrêt n°s 14MA00932, 14MA00966 du 2 février 2016, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur l'appel de la société Artec et de M.A..., après avoir annulé le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 31 décembre 2013 en tant qu'il statuait sur leurs conclusions indemnitaires, rejeté ces conclusions et le surplus de leurs conclusions d'appel.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire rectificatif, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 4 avril, 5 avril, 4 juillet et 3 octobre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Artec et M. A...demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur appel ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;
- le code du travail ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Frédéric Puigserver, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Rémi Decout-Paolini, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de la société Artec et de M. B...A....
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société " Académie de recherche des techniques éducatives corporelles " (Artec), enregistrée comme organisme de formation professionnelle continue sous le régime de la déclaration d'activité, dont M. B...A...est le gérant et qui exerce ses activités principalement dans le secteur médico-social et hospitalier, a fait l'objet, en juin et juillet 2009, d'un contrôle sur place, sur le fondement du 1° de l'article L. 6361-2 du code du travail, portant sur la période du 1er juillet 2006 au 30 juin 2008, par le service de contrôle de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de Languedoc-Roussillon. Au vu du rapport établi à l'issue de ce contrôle, le préfet de région a, le 25 novembre 2010, annulé, sur le fondement de l'article L. 6351-4 du code du travail, l'enregistrement de la déclaration d'activité de la société Artec au motif, d'une part, que les formations dispensées par la société ne relevaient pas de la formation professionnelle continue au sens de l'article L. 6313-1 de ce code et, d'autre part, que ses contrats et conventions et la réalisation de ses actions de formation ne respectaient pas les dispositions des articles L. 6353-1 à L. 6353-9 du même code. Par l'arrêt du 2 février 2016, contre lequel la société et son gérant se pourvoient en cassation, la cour administrative d'appel de Marseille a, d'une part, rejeté leur appel formé contre le jugement du tribunal administratif de Marseille du 31 décembre 2013 en tant qu'il a rejeté leur demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision d'annulation de l'enregistrement de la déclaration d'activité de la société et, d'autre part, après avoir annulé ce jugement pour irrégularité en tant qu'il statuait sur leurs conclusions indemnitaires, rejeté ces conclusions.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 6351-1 du code du travail : " Toute personne qui réalise des prestations de formation professionnelle continue au sens de l'article L. 6313-1 dépose auprès de l'autorité administrative une déclaration d'activité, dès la conclusion de la première convention de formation professionnelle ou du premier contrat de formation professionnelle, conclus respectivement en application des articles L. 6353-2 et L.6353-3. / L'autorité administrative procède à l'enregistrement de la déclaration sauf dans les cas prévus par l'article L. 6351-3 ". Aux termes de l'article L. 6351-2 du même code : " La déclaration d'activité comprend les informations administratives d'identification du déclarant, ainsi que les éléments descriptifs de son activité ". Aux termes de son article L. 6351-3 : " L'enregistrement de la déclaration d'activité peut être refusé de manière motivée, avec indication des modalités de recours, par décision de l'autorité administrative dans les cas suivants : / 1° Les prestations prévues à la première convention de formation professionnelle ou au premier contrat de formation professionnelle ne correspondent pas aux actions [de formation professionnelle continue] mentionnées à l'article L. 6313-1 ; / 2° Les dispositions du chapitre III du présent titre relatives à la réalisation des actions de formation ne sont pas respectées ; / 3° L'une des pièces justificatives n'est pas produite ".
3. Par ailleurs, l'article L. 6351-4 du code du travail dispose que : " L'enregistrement de la déclaration d'activité est annulé par décision de l'autorité administrative lorsqu'il est constaté, au terme d'un contrôle réalisé en application du 1° de l'article L. 6361-2 : / 1° Soit que les prestations réalisées ne correspondent pas aux actions mentionnées à l'article L. 6313-1 ; / 2° Soit que l'une des dispositions du chapitre III du présent titre relatives à la réalisation des actions de formation n'est pas respectée ; / 3° Soit que, après mise en demeure de se mettre en conformité avec les textes applicables dans un délai fixé par décret, l'une des dispositions du chapitre II du présent titre relatives au fonctionnement des organismes de formation n'est pas respectée. / Avant toute décision d'annulation, l'intéressé est invité à faire part de ses observations ". Et l'article L. 6351-6 du même code prévoit que : " La déclaration d'activité devient caduque lorsque le bilan pédagogique et financier prévu à l'article L. 6352-11 ne fait apparaître aucune activité de formation, ou lorsque ce bilan n'a pas été adressé à l'autorité administrative ".
4. Enfin, aux termes de l'article L. 6362-7 du code du travail : " Les organismes prestataires d'actions de formation entrant dans le champ de la formation professionnelle continue au sens de l'article L. 6313-1 versent au Trésor public, solidairement avec leurs dirigeants de fait ou de droit, une somme égale au montant des dépenses ayant fait l'objet d'une décision de rejet en application de l'article L. 6362-10 ".
5. Il résulte des dispositions citées au point 2 que la réalisation de prestations de formation professionnelle continue au sens défini par l'article L. 6313-1 du code du travail est subordonnée à une déclaration préalable d'activité, comportant l'identification du déclarant et la description de son activité, que l'administration enregistre, sauf pour des motifs tenant soit à l'absence de conformité des prestations envisagées ou des conditions de leur réalisation aux dispositions législatives régissant de telles prestations, soit à l'absence de production des pièces justificatives. Au vu des constatations effectuées lors d'un contrôle, l'absence de conformité des prestations réalisées, des conditions de leur réalisation ou du fonctionnement de l'organisme de formation aux dispositions régissant cette activité peuvent justifier que l'enregistrement de la déclaration d'activité soit, selon les termes de l'article L. 6351-4 du code du travail cités au point 3, annulé par l'autorité administrative, ce qui a pour effet de mettre fin à cet enregistrement pour l'avenir. En outre, comme le prévoit l'article L. 6351-6 du code du travail cité au même point, la déclaration d'activité devient caduque lorsque l'administration n'a pu constater d'action de formation professionnelle continue au bilan pédagogique et financier annuel qui doit lui être adressé. Contrairement aux mesures prévues par les dispositions cités au point 4, qui visent à punir des manquements d'un organisme à ses obligations et présentent le caractère de sanctions administratives, l'annulation de l'enregistrement de la déclaration d'activité, comme la caducité de cette déclaration, qui se bornent à tirer les conséquences de ce que l'organisme a cessé de satisfaire aux conditions mises à l'enregistrement de sa déclaration d'activité ou n'exerce plus d'activité et qui ne font pas obstacle par elles-mêmes au dépôt, sans délai, d'une nouvelle déclaration et à un nouvel enregistrement, sont des mesures de police administrative.
6. Il en résulte qu'en jugeant que l'annulation de l'enregistrement de la déclaration d'activité attaquée ne constituait pas une sanction administrative et en écartant comme inopérants, pour ce motif, les moyens tirés de la méconnaissance du principe constitutionnel de légalité des délits et des peines et de la disproportion de la sanction aux faits reprochés, la cour n'a pas commis d'erreur de droit.
7. En deuxième lieu, après avoir relevé que, par un courrier du 24 avril 2009, adressé en réponse à une demande reçue d'un organisme paritaire collecteur agréé, l'un des inspecteurs du travail ultérieurement chargés du contrôle de la société avait indiqué à son interlocuteur que l'une des actions de formation organisées par la société en " art thérapie " ne remplissait pas, au vu de l'examen de son programme et eu égard à ses objectifs et à ses modalités pédagogiques, les conditions requises pour relever de la formation professionnelle continue, la cour a jugé que l'attribution à cet agent, à compter de juin 2009, du contrôle de la société ne portait pas atteinte au principe d'impartialité qui s'impose à toute autorité administrative. En statuant ainsi, elle n'a pas commis d'erreur de droit.
8. En troisième lieu, aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international (...) ".
9. La décision litigieuse se bornant, ainsi qu'il a été dit au point 5, à tirer les conséquences de ce que la société requérante avait cessé de satisfaire aux conditions mises dès l'origine à cet enregistrement, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en écartant le moyen tiré de ce que cette décision porterait atteinte aux stipulations citées au point précédent.
10. En dernier lieu, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant, après avoir écarté les moyens tirés de l'illégalité de la décision d'annulation de l'enregistrement de la déclaration d'activité, que la responsabilité de l'Etat n'était pas susceptible d'être engagée du fait de l'illégalité de cette décision.
11. Il résulte de tout ce qui précède que la société Artec et M. A...ne sont pas fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent.
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la société Artec et de M. A...est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Artec, à M. B...A...et à la ministre du travail.