Vu la procédure suivante :
M. et Mme A...ont demandé au tribunal administratif de Nancy de condamner le centre hospitalier universitaire (CHU) de Nancy à réparer les préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait d'une intervention subie par M. A...au sein de cet établissement et d'ordonner une expertise médicale. Par un jugement n° 1400445 du 4 juin 2015, le tribunal administratif a rejeté cette demande.
Par une ordonnance n°15NC01622 du 13 mai 2016, enregistrée le 18 mai 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la présidente de la cour administrative d'appel de Nancy a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative, le pourvoi, enregistré le 22 juillet 2015 au greffe de cette cour, présenté par M. et MmeA....
Par ce pourvoi, un mémoire enregistré le 25 mars 2016 au greffe de la cour et un nouveau mémoire, enregistré le 16 août 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme A... demandent au Conseil d'Etat :
1°) de renvoyer l'affaire devant la cour administrative d'appel de Nancy ;
2°) subsidiairement, d'annuler le jugement du 4 juin 2015 du tribunal administratif de Nancy ;
3°) de mettre à la charge du CHU de Nancy le versement d'une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Guillaume Leforestier, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de M. et Mme A...et à Me Le Prado, avocat du centre hospitalier universitaire de Nancy.
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, le 25 décembre 2009, M.A..., né en 1935, a été admis au service des urgences du centre hospitalier universitaire (CHU) de Nancy en raison de douleurs abdominales ; que l'examen des clichés radiologiques a laissé suspecter un pneumopéritoine abdominal ; que, du 28 décembre 2009 au 7 janvier 2010, M.A..., après avoir fait l'objet d'une coelioscopie exploratrice, a bénéficié d'un traitement digestif par voie parentérale puis par voie orale ; qu'en raison d'un syndrome confusionnel, un avis neurologique a été sollicité et a révélé que le patient était atteint de la maladie de Parkinson ; que M. et MmeA..., qui imputent le dernier état de M. A...aux conditions de la prise en charge de ce dernier au CHU de Nancy, ont recherché la responsabilité de cet établissement devant le tribunal administratif de Nancy qui a rejeté leur recours indemnitaire par un jugement du 4 juin 2015 dont ils demandent l'annulation ;
Sur la compétence du Conseil d'Etat :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " (...) le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort:/ (...) 8° Sur toute action indemnitaire ne relevant pas des dispositions précédentes, lorsque le montant des indemnités demandées est inférieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 (...) " ; que l'article R. 222-14 du même code fixe ce seuil à la somme de 10 000 euros ; que le premier alinéa de l'article R. 222-15 du même code prévoit qu'il est déterminé " par la valeur totale des sommes demandées dans la requête introductive d'instance " ;
3. Considérant que les actions indemnitaires dont les conclusions n'ont pas donné lieu à une évaluation chiffrée dans la requête introductive d'instance devant le tribunal administratif, et qui ne peuvent ainsi être regardées comme tendant au versement d'une somme supérieure à 10 000 euros, entrent dans le champ des dispositions précitées de l'article R. 811-1 du code de justice administrative ; qu'il en va toutefois autrement lorsque le requérant, dans sa requête introductive d'instance, a expressément demandé qu'une expertise soit ordonnée afin de déterminer l'étendue de son préjudice, en se réservant de fixer le montant de sa demande au vu du rapport de l'expert ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la requête introductive d'instance présentée par M. et Mme A...devant le tribunal administratif de Nancy ne contenait pas de conclusions chiffrées ni de conclusions tendant à la désignation d'un expert ; que le jugement a, dès lors, été rendu en premier et dernier ressort ; que sont dépourvues d'incidence à cet égard les circonstances que la requête introductive avait été présentée sans le ministère d'un avocat, comme le permettaient en tout état de cause les dispositions du 4° de l'article R. 431-3 du code de justice administrative s'agissant d'un litige où le défendeur était un établissement public de santé, et que le tribunal administratif a statué dans une formation collégiale ; qu'il suit de là que les conclusions par lesquelles les requérants demandent l'annulation du jugement présentent le caractère d'un pourvoi en cassation et relèvent de la compétence du Conseil d'Etat ;
Sur le pourvoi de M. et MmeA... :
5. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme A...ont produit devant le tribunal administratif de Nancy un rapport établi le 11 août 2014 par un expert désigné par leur assureur, qui après avoir précisément décrit les faits concluait que le CHU de Nancy n'avait commis aucune faute dans la prise en charge de M. A... ; que les requérants se sont bornés devant le tribunal administratif à mettre en avant la différence de l'état de santé de M. A...avant et après sa prise en charge, sans avancer aucun élément de nature à mettre sérieusement en doute les conclusions de l'expert ; que, dans ces conditions, le tribunal a pu, sans dénaturer les faits ni les pièces du dossier qui lui était soumis, rejeter les conclusions tendant à la désignation d'un nouvel expert présentées en cours d'instance par M. et MmeA... ;
6. Considérant, en second lieu, que pour rejeter le recours indemnitaire de M. et MmeA..., le tribunal s'est fondé sur les conclusions de l'expert qui relevait que l'indication opératoire était cohérente, que les modalités techniques et le suivi avaient été satisfaisants, qu'aucun aléa thérapeutique n'était survenu, que les mesures de contention étaient nécessaires et que l'état de M. A...s'expliquait par l'évolution d'un état neurologique préexistant ; que le tribunal, dont le jugement est suffisamment motivé, a pu en déduire, sans commettre d'erreur de droit ni priver sa décision de base légale, l'absence de faute du centre hospitalier dans l'organisation et le fonctionnement du service comme dans l'accomplissement des actes médicaux liés à la prise en charge de M.A..., de nature à engager sa responsabilité ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le pourvoi de M. et Mme A... doit être rejeté, y compris leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de M. et Mme A...est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme A..., au centre hospitalier universitaire de Nancy et à la caisse d'assurance maladie des industries électriques et gazières.