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23/06/2017 | FRANCE | N°401631

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 23 juin 2017, 401631


Vu la procédure suivante :

Mme B...A...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Versailles, d'une part, de liquider l'astreinte prononcée par l'ordonnance n° 1602583 du 19 avril 2016, à compter du 17 avril 2016 s'agissant de l'injonction de faire dresser procès-verbaux des infractions, et à compter du 9 avril 2016 s'agissant de l'interruption des travaux, d'autre part, de porter le montant de l'astreinte, en cas d'inexécution des mesures prescrites, à 1 000 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir.

Par une ordon

nance n° 1604463 du 4 juillet 2016, le juge des référés du tribunal adminis...

Vu la procédure suivante :

Mme B...A...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Versailles, d'une part, de liquider l'astreinte prononcée par l'ordonnance n° 1602583 du 19 avril 2016, à compter du 17 avril 2016 s'agissant de l'injonction de faire dresser procès-verbaux des infractions, et à compter du 9 avril 2016 s'agissant de l'interruption des travaux, d'autre part, de porter le montant de l'astreinte, en cas d'inexécution des mesures prescrites, à 1 000 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir.

Par une ordonnance n° 1604463 du 4 juillet 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Versailles a condamné l'Etat à verser une somme de 4 350 euros à Mme A... au titre de l'astreinte due pour la période du 9 avril au 4 juillet 2016, le surplus du montant de l'astreinte, soit 39 150 euros, étant versé au budget de l'Etat en application de l'article L. 911-8 du code de justice administrative.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 19 juillet 2016, 2 août 2016 et 1er mars 2017, Mme B...A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance en tant qu'elle limite à 4 350 euros la somme que l'État doit lui verser au titre de l'astreinte due pour la période du 9 avril au 4 juillet 2016 et ordonne le versement du surplus de l'astreinte, soit 39 150 euros au budget de l'État en application de l'article L. 911-8 du code de justice administrative ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Laure Durand-Viel, auditeur,

- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de Mme A...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Versailles que les propriétaires de la parcelle AX62 située sur le territoire de Longpont-sur-Orge, classée en zone naturelle, y ont, en méconnaissance du plan local d'urbanisme de la commune, entrepris des travaux d'exhaussement du sol dans le but d'installer des caravanes ; que, le 27 mars 2015, le maire de Longpont-sur-Orge a pris un arrêté interruptif de travaux à l'encontre de ces propriétaires ; que, par une ordonnance n° 1502118 du 30 avril 2015, le juge des référés a, à la demande de MmeA..., enjoint au maire, d'une part, de faire dresser un procès-verbal constatant la poursuite des travaux et d'en adresser copie au ministère public, d'autre part, de prendre toutes mesures de coercition nécessaires pour assurer l'application de son arrêté, en procédant notamment à la saisie des matériaux approvisionnés ou du matériel de chantier, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'ordonnance, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; que, par une ordonnance n° 1602583 du 19 avril 2016, le juge des référés a, d'une part, enjoint au maire de faire dresser un procès-verbal constatant la poursuite tant des travaux illicites que de l'installation irrégulière de nouvelles caravanes et d'en adresser copie au ministère public, sous astreinte de 500 euros par jour de retard passé un délai de huit jours à compter du prononcé de l'ordonnance, d'autre part, condamné l'Etat à verser une somme de 16 900 euros à Mme A...au titre de l'astreinte due pour la période du 22 octobre 2015 au 8 avril 2016, le montant de cette astreinte ordonnée le 30 avril 2015 étant porté à 500 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision ; que, par l'ordonnance attaquée du 4 juillet 2016, le juge des référés a liquidé l'astreinte due pour la période du 9 avril au 4 juillet 2016 et condamné l'Etat à en verser à Mme A...10 % de son montant, soit une somme de 4 350 euros, le surplus étant affecté au budget de l'Etat en application de l'article L. 911-8 du code de justice administrative ;

2. Considérant qu'en vertu de l'article L. 911-7 du code de justice administrative, la juridiction qui, en cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, procède à la liquidation de l'astreinte provisoire qu'elle avait prononcée peut la modérer ou la supprimer, même en cas d'inexécution constatée ; qu'aux termes de l'article L. 911-8 du même code : " La juridiction peut décider qu'une part de l'astreinte ne sera pas versée au requérant. / Cette part est affectée au budget de l'Etat. "

3. Considérant qu'en jugeant, au vu des circonstances de l'espèce, qu'une somme de 4 350 euros devait être versée par l'Etat à Mme A...au titre de la liquidation provisoire de l'astreinte résultant de l'ordonnance n° 1502118 du 30 avril 2015, pour la période du 9 avril au 4 juillet 2016, le juge des référés a suffisamment motivé sa décision ; que la possibilité laissée au juge de ne verser au requérant qu'une partie de l'astreinte prononcée ne méconnaît pas le droit à l'exécution des décisions de justice, dès lors que le juge conserve un pouvoir d'appréciation depuis le prononcé de l'astreinte jusqu'à son versement postérieur à la liquidation et qu'au surplus, la responsabilité de l'Etat peut, le cas échéant, être mise en cause en réparation du préjudice qui résulterait de l'exécution tardive d'une décision de justice ; que le moyen tiré de la méconnaissance des exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut par suite qu'être écarté ;

4. Considérant toutefois que la juridiction statuant sur la liquidation d'une astreinte ne peut faire usage de la faculté, prévue par le second alinéa de l'article L. 911-8 du code de justice administrative, d'en affecter une part au budget de l'Etat lorsque l'astreinte est prononcée à l'encontre de ce dernier ; qu'en jugeant que le surplus du montant de l'astreinte résultant de l'ordonnance précitée, soit une somme de 39 150 euros, devait être versé au budget de l'Etat, le juge des référés a commis une erreur de droit ; que Mme B...A...est, par suite, fondée, pour ce motif, à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque, en tant seulement qu'elle a affecté le surplus du montant de l'astreinte au budget de l'Etat ;

5. Considérant que, compte tenu de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par MmeA..., il n'y a pas lieu de statuer sur le pourvoi incident de la ministre du logement et de l'habitat durable ;

6. Considérant qu'aucune question ne reste à juger ; qu'il n'y a lieu, dès lors, pour le Conseil d'Etat statuant au contentieux ni de statuer en référé, ni de renvoyer l'affaire au juge des référés du tribunal administratif de Versailles en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à Mme B...A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

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Article 1er : A l'article 1er de l'ordonnance du 4 juillet 2016 du juge des référés du tribunal administratif de Versailles, les mots " le surplus du montant de l'astreinte, soit 39 150 euros, étant versé au budget de l'Etat en application de l'article L. 911-8 du code de justice administrative " sont annulés.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur le pourvoi incident de la ministre du logement et de l'habitat durable.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A...et au ministre de la cohésion des territoires.


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 401631
Date de la décision : 23/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 23 jui. 2017, n° 401631
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Laure DURAND-VIEL
Rapporteur public ?: Mme Suzanne von Coester
Avocat(s) : SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:401631.20170623
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