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08/06/2017 | FRANCE | N°398677

France | France, Conseil d'État, 5ème - 4ème chambres réunies, 08 juin 2017, 398677


Vu la procédure suivante :

La société civile immobilière (SCI) SICAM a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 15 avril 2013 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a enjoint de faire cesser toute occupation aux fins d'habitation d'un local lui appartenant, d'en reloger les occupants, d'en supprimer les équipements sanitaires et la cuisine et d'en interdire l'accès. Par un jugement n° 1305764 du 3 juillet 2014, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14VE02649 du 9 février 2016, la cour administrative d'

appel de Versailles, statuant sur l'appel de la SCI SICAM, a annulé ce jug...

Vu la procédure suivante :

La société civile immobilière (SCI) SICAM a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 15 avril 2013 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a enjoint de faire cesser toute occupation aux fins d'habitation d'un local lui appartenant, d'en reloger les occupants, d'en supprimer les équipements sanitaires et la cuisine et d'en interdire l'accès. Par un jugement n° 1305764 du 3 juillet 2014, le tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 14VE02649 du 9 février 2016, la cour administrative d'appel de Versailles, statuant sur l'appel de la SCI SICAM, a annulé ce jugement et annulé l'arrêté en litige.

Par un pourvoi, enregistré le 11 avril 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre des affaires sociales et de la santé demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter l'appel de la SCI SICAM.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Dominique Langlais, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gaschignard, avocat de la SCI SICAM.

1. Considérant, d'une part, qu'aux termes des premier et troisième alinéas de l'article L. 1331-24 du code de la santé publique : " Lorsque l'utilisation qui est faite de locaux ou installations présente un danger pour la santé ou la sécurité de leurs occupants, le représentant de l'Etat dans le département, après avis de la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires ou technologiques, peut enjoindre à la personne qui a mis ces locaux ou installations à disposition ou à celle qui en a l'usage de rendre leur utilisation conforme aux prescriptions qu'il édicte dans le délai qu'il fixe. (...) Si l'injonction est assortie d'une interdiction temporaire ou définitive d'habiter, la personne ayant mis ces locaux à disposition est tenue d'assurer l'hébergement ou le relogement des occupants " ;

2. Considérant, d'autre part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 1331-26 du même code : " Lorsqu'un immeuble, bâti ou non, vacant ou non, attenant ou non à la voie publique, un groupe d'immeubles, un îlot ou un groupe d'îlots constitue, soit par lui-même, soit par les conditions dans lesquelles il est occupé ou exploité, un danger pour la santé des occupants ou des voisins, le représentant de l'Etat dans le département, saisi d'un rapport motivé du directeur général de l'agence régionale de santé ou, par application du troisième alinéa de l'article L. 1422-1, du directeur du service communal d'hygiène et de santé concluant à l'insalubrité de l'immeuble concerné, invite la commission départementale compétente en matière d'environnement, de risques sanitaires et technologiques à donner son avis dans le délai de deux mois : / 1° Sur la réalité et les causes de l'insalubrité ; / 2° Sur les mesures propres à y remédier " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 1331-26-1 du même code : " Lorsque le rapport prévu par l'article L. 1331-26 fait apparaître un danger imminent pour la santé ou la sécurité des occupants lié à la situation d'insalubrité de l'immeuble, le représentant de l'Etat dans le département met en demeure le propriétaire, ou l'exploitant s'il s'agit de locaux d'hébergement, de prendre les mesures propres à faire cesser ce danger dans un délai qu'il fixe. Il peut prononcer une interdiction temporaire d'habiter " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société SICAM possède à Montreuil un bâtiment industriel exploité à titre commercial, dont 60 m2 ont été loués à titre d'habitation ; que, par un arrêté du 15 avril 2013, pris au visa des dispositions précitées de l'article L. 1331-24 du code de la santé publique après avis du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques, le préfet de la Seine-Saint-Denis a enjoint à la société SICAM de faire cesser définitivement son occupation aux fins d'habitation, d'en reloger les occupants, d'en supprimer les aménagements sanitaires et la cuisine et d'en empêcher tout accès dans un délai d'un mois ; que le ministre des affaires sociales et de la santé se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 9 février 2016 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles, statuant sur la requête de la société SICAM, a annulé cet arrêté ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des termes mêmes de l'arrêté en litige que celui-ci est fondé sur la circonstance que le local en cause, situé dans un bâtiment de nature industrielle, est inadapté à un usage d'habitation et connaît pour cette raison de graves problèmes d'humidité et de moisissure ; qu'en estimant qu'un tel arrêté ne pouvait être pris sur le fondement de l'article L. 1331-24 du code de la santé publique cité ci-dessus, alors qu'étant fondé sur l'existence d'un danger pour la santé des occupants résultant, selon le préfet, de l'utilisation qui était faite du local, non conforme à sa destination, il entrait bien, eu égard à son motif, dans les prévisions de cet article, la cour a entaché son arrêt d'une erreur de droit ;

5. Considérant, en second lieu, qu'en enjoignant à la société SICAM de faire cesser l'utilisation à des fins d'habitation du local litigieux et d'en supprimer les équipements sanitaires et la cuisine, le préfet a édicté des prescriptions tendant à ce qu'il soit mis fin à l'utilisation des lieux, dont il estimait qu'elle était à l'origine du danger ; que par suite, en retenant que la décision attaquée n'énonçait aucune prescription au sens de l'article L. 1331-24 du code de la santé publique, la cour a commis une erreur de droit ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'arrêt attaqué doit être annulé ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise sur ce fondement à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 9 février 2016 de la cour administrative d'appel de Versailles est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Versailles.

Article 3 : Les conclusions présentées par la SCI SICAM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la ministre des solidarités et de la santé et à la SCI SICAM.


Synthèse
Formation : 5ème - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 398677
Date de la décision : 08/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 08 jui. 2017, n° 398677
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Dominique Langlais
Rapporteur public ?: Mme Laurence Marion
Avocat(s) : SCP GASCHIGNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:398677.20170608
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