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07/06/2017 | FRANCE | N°393850

France | France, Conseil d'État, 4ème - 5ème chambres réunies, 07 juin 2017, 393850


Vu la procédure suivante :

1° Sous le n° 393850, par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 septembre et 29 décembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la fédération européenne des ostéopathes pour animaux demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'article 5 de l'ordonnance n° 2015-953 du 31 juillet 2015 relative à la réforme de l'ordre des vétérinaires.

2° Sous le n° 393889, par une requête, enregistrée le 2 octobre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat national

des vétérinaires salariés d'entreprise demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ...

Vu la procédure suivante :

1° Sous le n° 393850, par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 30 septembre et 29 décembre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la fédération européenne des ostéopathes pour animaux demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'article 5 de l'ordonnance n° 2015-953 du 31 juillet 2015 relative à la réforme de l'ordre des vétérinaires.

2° Sous le n° 393889, par une requête, enregistrée le 2 octobre 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprise demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la même ordonnance en tant qu'elle modifie l'article L. 242-4 du code rural et de la pêche maritime et qu'elle y introduit un article L. 242-4-1 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et ses articles 34 et 38 ;

- la directive n° 2006/123/CE du Parlement et du Conseil du 12 décembre 2006 ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- la loi n° 2014-1170 du 13 octobre 2014 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-François de Montgolfier, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat de la fédération européenne des ostéopathes pour animaux ;

1. Considérant que les requêtes visées ci-dessus de la fédération européenne des ostéopathes pour animaux et du syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprise sont dirigées contre plusieurs dispositions de l'ordonnance du 31 juillet 2015 relative à la réforme de l'ordre des vétérinaires ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur les dispositions de l'ordonnance attaquée qui modifient l'article L. 243-3 du code rural et de la pêche maritime :

2. Considérant que, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance attaquée du 31 juillet 2015, l'article L. 243-3 du code rural et de la pêche maritime disposait : " Outre les soins de première urgence autres que ceux nécessités par les maladies contagieuses, qui peuvent être réalisés par toute personne, des actes de médecine ou de chirurgie des animaux peuvent être réalisés par :/ (...) 12° Dès lors qu'elles justifient de compétences définies par décret, les personnes réalisant des actes d'ostéopathie animale, inscrites sur une liste tenue par l'ordre régional des vétérinaires et s'engageant, sous le contrôle de celui-ci, à respecter des règles de déontologie définies par décret en Conseil d'Etat (...) " ; que l'article 5 de cette ordonnance a modifié le 12° de cet article en y insérant, après les mots " compétences définies par décret ", les mots : " et évaluées par le conseil national de l'ordre " et en supprimant le mot " régional " ;

3. Considérant qu'en confiant au conseils régionaux de l'ordre des vétérinaires le soin de tenir la liste des personnes qui étaient autorisées, dès lors qu'elles justifiaient de certaines compétences, à réaliser des actes de médecine ou de chirurgie des animaux, les dispositions citées ci-dessus de l'article L. 243-3 du code rural et de la pêche maritime, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance attaquée, avaient implicitement mais nécessairement conféré aux conseils régionaux de l'ordre des vétérinaires le pouvoir de vérifier, à l'occasion d'une demande tendant à être inscrit sur cette liste, que l'intéressé justifiait des compétences requises par la loi ; que, par suite, contrairement à ce que soutient la fédération européenne des ostéopathes pour animaux, les dispositions de l'article 5 de l'ordonnance n'ont pas pour effet d'introduire un contrôle de l'ordre des vétérinaires sur l'accès à l'activité de médecine ou de chirurgie des animaux, mais se bornent à transférer au Conseil national de l'ordre des vétérinaires cette compétence de contrôle jusque-là confiée à ses conseils régionaux ; qu'ainsi, la fédération requérante n'est pas fondée à soutenir que l'ordonnance a méconnu l'étendue de l'habilitation, donnée au Gouvernement par l'article 55 de la loi du 13 octobre 2014 d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, de " redéfinir et moderniser l'organisation et les missions de l'ordre des vétérinaires " ; qu'elle ne saurait, pour les mêmes raisons, utilement soutenir qu'au motif qu'elles auraient instauré un tel contrôle, les dispositions de cet article 5 méconnaissent le principe d'égalité, la liberté du commerce et de l'industrie, la liberté d'entreprendre ainsi que les exigences qui résultent du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ou le " principe selon lequel un ordre n'est compétent qu'à l'égard de ses membres " ;

Sur les dispositions de l'ordonnance attaquée qui modifient l'article L. 242-4 du code rural et de la pêche maritime :

4. Considérant que le 6° de l'article 4 de l'ordonnance attaquée du 31 juillet 2015 donne une nouvelle rédaction à l'article L. 242-4 du code rural et la pêche maritime ; qu'aux termes des quatrième et cinquième alinéa du III de ce nouvel article L. 242-4 : " En demandant leur inscription au tableau ou celle de la société dont ils sont associés, les vétérinaires s'engagent sous la foi du serment à exercer leur profession avec conscience et probité. Nul ne peut être inscrit au tableau s'il ne remplit les conditions requises par le présent titre et notamment les conditions nécessaires de moralité, d'indépendance et de compétence. Le conseil régional peut prononcer d'office l'omission temporaire du tableau et, le cas échéant, radier de celui-ci les personnes qui, par suite de l'intervention de circonstances postérieures à leur inscription, ont cessé de remplir ces conditions ou dont l'état pathologique ou l'infirmité rend dangereux l'exercice de la profession. / Les conditions d'inscription au tableau, d'omission et de radiation du tableau sont précisées par décret en Conseil d'Etat " ; que la requête du syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprises doit être regardée comme ne demandant l'annulation de cet article L. 242-4, tel que modifié par l'ordonnance attaquée, qu'en tant seulement qu'il comporte ces dispositions ;

5. Considérant, en premier lieu, que les dispositions citées au point 4 définissent avec une précision suffisante les conditions d'inscription au tableau de l'ordre des vétérinaires et, par suite, celles dans lesquelles le conseil régional de cet ordre peut omettre ou radier un vétérinaire du tableau de l'ordre, soit en raison de ce qu'il ne remplit plus ces conditions, soit en raison d'un exercice rendu dangereux pour des raisons de santé ; qu'elles se bornent à renvoyer au pouvoir réglementaire le soin d'apporter à ces conditions des précisions supplémentaires ; que, d'autre part, contrairement à ce que soutient le syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprise, la définition de la procédure selon laquelle doivent être prises les décisions d'omission ou de radiation ne met en cause aucune règle ni aucun principe fondamental que la Constitution réserve à la loi ; que, par suite, le moyen tiré de ce que les dispositions attaquées seraient entachées d'incompétence négative, en violation des dispositions de l'article 34 de la Constitution, doit être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aucune règle ni aucun principe de valeur constitutionnelle n'interdit qu'un vétérinaire inscrit au tableau de l'ordre ne puisse en être radié lorsqu'il ne remplit plus les conditions pour une telle inscription ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'en prévoyant la possibilité de radier un vétérinaire qui ne remplirait plus la condition de " moralité " nécessaire à l'inscription au tableau de l'ordre, les dispositions attaquées n'ont pas méconnu les dispositions de l'article 10 de la directive du Parlement et du Conseil du 12 décembre 2006 relative aux services dans le marché intérieur, aux termes desquelles les régimes d'autorisation applicables à une activité de service doivent reposer sur des critères " (...) d) clairs et non ambigus ; e) objectifs ; f) rendus publics à l'avance ; g) transparents et accessibles " ;

Sur les dispositions de l'ordonnance attaquée qui modifient l'article L. 242-4-1 du code rural et de la pêche maritime :

8. Considérant que le 7° de l'article 4 de l'ordonnance du 31 juillet 2015 insère dans le code rural et de la pêche maritime un article L. 242-4-1 relatif aux " dispositions communes aux différents conseils " de l'ordre des vétérinaires ; qu'aux termes du second alinéa du II de l'article ainsi inséré : " La fonction de président ou de trésorier du conseil national ou d'un conseil régional est incompatible avec tout mandat syndical professionnel vétérinaire " ; que la requête du syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprises doit être regardée comme ne demandant l'annulation de l'article L. 242-4-1 introduit par l'ordonnance attaquée qu'en tant seulement qu'il comporte cet alinéa ;

9. Considérant que, contrairement à ce que soutient le syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprise, ces dispositions, qui ont pour objet de renforcer l'impartialité des membres des conseils de l'ordre des vétérinaires et de prévenir les risques de conflit d'intérêts, ne portent une atteinte disproportionnée ni au droit pour les vétérinaires de se syndiquer et d'exercer des mandats syndicaux ni à l'égal accès, pour les vétérinaires élus à des fonctions ordinales, aux fonctions de président ou de trésorier des conseils de l'ordre ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requêtes de la fédération européenne des ostéopathes pour animaux et du syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprise doivent être rejetées, y compris, par voie de conséquence, les conclusions que présente le syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprise au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les requêtes de la fédération européenne des ostéopathes pour animaux et du syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprise sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la fédération européenne des ostéopathes pour animaux, au syndicat national des vétérinaires salariés d'entreprise, au Premier ministre et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation.


Synthèse
Formation : 4ème - 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 393850
Date de la décision : 07/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 07 jui. 2017, n° 393850
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-François de Montgolfier
Rapporteur public ?: M. Frédéric Dieu
Avocat(s) : SCP BOUTET-HOURDEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:393850.20170607
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