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29/05/2017 | FRANCE | N°401491

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 29 mai 2017, 401491


Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiée (SAS) Galerie Ariane A...a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos entre le 1er juillet 2005 et le 31 décembre 2008, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1316014 du 31 décembre 2014, ce tribunal a partiellement fait droit à la demande de la société en réduisant, à concurrence de 482 200 euros, ses

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Vu la procédure suivante :

La société par actions simplifiée (SAS) Galerie Ariane A...a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur cet impôt auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos entre le 1er juillet 2005 et le 31 décembre 2008, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un jugement n° 1316014 du 31 décembre 2014, ce tribunal a partiellement fait droit à la demande de la société en réduisant, à concurrence de 482 200 euros, ses bases imposables à l'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en juin 2007 et en prononçant la décharge correspondante des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur cet impôt auxquelles elle avait été assujettie.

Par un arrêt n° 15PA00820 du 13 mai 2016, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la SAS Galerie Ariane A...contre l'article 4 de ce jugement, par lequel le tribunal administratif a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 13 juillet 2016, 13 octobre 2016 et 5 mai 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la SAS Galerie Ariane A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Emmanuelle Petitdemange, auditeur,

- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Soltner, Texidor, Perier, avocat de la SAS ArianeA.au Luxembourg

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société par actions simplifiée (SAS) Galerie ArianeA..., dont Mme A...était présidente directrice générale et associée à hauteur de 1 % du capital, exerçait une activité de commerce d'antiquités. La société Hosur Corporation, dont le siège était situé à Panama (société Hosur Panama), détenait une participation à hauteur de 99 % du capital social de la société Galerie ArianeA..., qu'elle a cédée à la société holding Hosur Corporation domiciliée au Luxembourg(société Hosur Luxembourg). Dans la perspective de sa cessation d'activité liée au départ à la retraite de MmeA..., la société Galerie Ariane A...a vendu entre février et juillet 2007 un ensemble de 334 lots d'antiquités à la société Hosur Panama pour un montant total de 4 567 652 euros. Les sociétés Galerie Ariane A...et Hosur Panama ont simultanément cédé en octobre 2007, dans le cadre d'une vente aux enchères, plus de 800 lots. Parmi les lots proposés au cours de cette vente aux enchères figuraient 183 lots que la société Hosur Panama avait précédemment acquis auprès de la société Galerie ArianeA.au Luxembourg Lors d'une vérification de comptabilité de la société Galerie ArianeA..., l'administration fiscale a estimé que cette société aurait pu bénéficier d'un prix de vente sensiblement plus élevé si elle avait directement présenté l'ensemble de ses lots à la vente aux enchères. Elle a en conséquence réintégré au résultat imposable de la société Galerie ArianeA..., sur le fondement de l'article 57 du code général des impôts, la différence entre le produit de la vente aux enchères des lots en cause et le prix qui avait été facturé lors des cessions intervenues entre février et juillet 2007. L'administration a en outre réintégré diverses charges déduites par la société Galerie Ariane A...au motif qu'elles n'étaient pas justifiées ou qu'elles ne relevaient pas d'une gestion commerciale normale. Par une proposition de rectification du 14 décembre 2009, l'administration a en conséquence notifié à la société Galerie Ariane A...des rehaussements en matière d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos entre le 1er juillet 2005 et le 31 décembre 2008. Par un jugement du 31 mars 2014, le tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à la demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur cet impôt auxquelles la société a été assujettie. La société Galerie Ariane A...se pourvoit en cassation contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 13 mai 2016 qui a rejeté sa requête tendant à la décharge des impositions restant en litige.

Sur le bien-fondé de l'arrêt en ce qui concerne le transfert indirect de bénéfices :

2. Aux termes de l'article 57 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Pour l'établissement de l'impôt sur le revenu dû par les entreprises qui sont sous la dépendance ou qui possèdent le contrôle d'entreprises situées hors de France, les bénéfices indirectement transférés à ces dernières, soit par voie de majoration ou de diminution des prix d'achat ou de vente, soit par tout autre moyen, sont incorporés aux résultats accusés par les comptabilités. Il est procédé de même à l'égard des entreprises qui sont sous la dépendance d'une entreprise ou d'un groupe possédant également le contrôle d'entreprises situées hors de France ". Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'elle constate que les prix facturés par une entreprise établie en France à une entreprise étrangère qui lui est liée sont inférieurs à ceux pratiqués, soit par cette entreprise avec d'autres clients dépourvus de liens de dépendance avec elle, soit par des entreprises similaires exploitées normalement avec des clients dépourvus de liens de dépendance, sans que cet écart ne s'explique par la situation différente de ces clients, l'administration doit être regardée comme établissant l'existence d'un avantage qu'elle est en droit de réintégrer dans les résultats de l'entreprise établie en France, sauf pour celle-ci à justifier que cet avantage a eu pour elle des contreparties au moins équivalentes. A défaut d'avoir procédé à de telles comparaisons, l'administration n'est, en revanche, pas fondée à invoquer la présomption de transferts de bénéfices ainsi instituée mais doit, pour démontrer qu'une entreprise a consenti une libéralité en facturant des prestations à un prix insuffisant, établir l'existence d'un écart injustifié entre le prix convenu et la valeur vénale du bien cédé ou du service rendu.

3. Pour caractériser l'existence d'un écart entre le prix des lots litigieux résultant de la cession à la société Hosur Panama en février et juillet 2007 et leur valeur vénale, en l'absence de comparaisons effectuées par l'administration avec les prix pratiqués par la société avec d'autres clients ou par des entreprises similaires exploitées normalement avec des clients dépourvus de liens de dépendance, la cour a notamment relevé que la marge dégagée par la société Hosur Panama en octobre 2007 lors de la vente aux enchères des lots précédemment acquis auprès de la société Galerie Ariane A...était nettement supérieure à celle qui avait été réalisée lors de la vente de ces mêmes lots quelques mois auparavant. En se bornant ainsi, pour fixer la valeur vénale des lots litigieux, en l'absence d'éléments relatifs au caractère inhabituel qu'aurait revêtu le taux de marge pratiqué par la société Galerie Ariane A...à l'occasion des ventes de gré-à-gré effectuées en février et juillet 2007 au regard du taux de marge observé lors de ventes de gré-à-gré récentes et comparables, à se référer au prix obtenu pour ces lots lors d'une vente aux enchères unique et qui, ainsi qu'il ressortait des pièces du dossier qui lui était soumis, présentait au surplus un caractère exceptionnel, la cour a commis une erreur de droit. Par suite, son arrêt doit être annulé en tant qu'il statue sur le transfert indirect de bénéfices.

Sur le bien-fondé de l'arrêt en ce qui concerne la déductibilité de charges:

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Galerie Ariane A...a déduit entre 2002 et 2008 des charges correspondant notamment à des frais de transport, d'hôtellerie, de restaurant et de spectacle, à des fournitures d'entretien et de petits équipements et à l'achat de matériel informatique. En énonçant, sans autres précisions, que la société se bornait à indiquer que les charges déduites étaient inhérentes à l'exploitation d'une galerie d'antiquités ayant une activité internationale sans fournir les pièces permettant de justifier du principe de la déductibilité de ces frais et que le tableau récapitulatif des frais produit, établi par la société elle-même, ne pouvait tenir lieu de justificatif comptable, alors que la société Galerie Ariane A...avait versé au dossier, devant le tribunal puis à nouveau devant la cour, outre ce tableau récapitulatif, une documentation de six volumes comprenant de très nombreuses factures correspondant aux frais litigieux ainsi que les relevés de compte bancaire justifiant de leur paiement et des éléments d'explication concernant leur affectation professionnelle, la cour a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la société est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SAS Galerie Ariane A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 13 mai 2016 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : L'Etat versera à la SAS Galerie Ariane A...une somme de 3 000 au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société par actions simplifiée Galerie Ariane A... et au ministre de l'action et des comptes publics.


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 401491
Date de la décision : 29/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 29 mai. 2017, n° 401491
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Emmanuelle Petitdemange
Rapporteur public ?: M. Romain Victor
Avocat(s) : SCP CELICE, SOLTNER, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:401491.20170529
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