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10/05/2017 | FRANCE | N°395897

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 10 mai 2017, 395897


Vu la procédure suivante :

M. et Mme A...ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge du supplément d'impôt sur le revenu auquel ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 en raison de la remise en cause de l'abattement appliqué à une plus-value de cession. Par un jugement n° 1000926 du 20 mars 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 14NT01018 du 5 novembre 2015, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par M. et Mme A...contre ce jugement.

Par un pourvoi somm

aire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 5 janvier et 5 avril 2016 au s...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme A...ont demandé au tribunal administratif de Rennes de prononcer la décharge du supplément d'impôt sur le revenu auquel ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 en raison de la remise en cause de l'abattement appliqué à une plus-value de cession. Par un jugement n° 1000926 du 20 mars 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.

Par un arrêt n° 14NT01018 du 5 novembre 2015, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par M. et Mme A...contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 5 janvier et 5 avril 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme A...demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Soltner, Texidor, Perier, avocat de M. et Mme A...;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article 150-0 D bis du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige : " I. - 1. Les gains nets mentionnés au 1 de l'article 150-0 D et déterminés dans les conditions du même article retirés des cessions à titre onéreux d'actions, de parts de sociétés ou de droits démembrés portant sur ces actions ou parts sont réduits d'un abattement d'un tiers pour chaque année de détention au-delà de la cinquième, lorsque les conditions prévues au II sont remplies. (...) / II. - Le bénéfice de l'abattement prévu au 1 du I est subordonné au respect des conditions suivantes : / 1° La durée et le caractère continu de la détention des titres ou droits cédés doivent pouvoir être justifiés par le contribuable ; / 2° La société dont les actions, parts ou droits sont cédés : / a) Est passible de l'impôt sur les sociétés ou d'un impôt équivalent ou soumise sur option à cet impôt ; / b) Exerce une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ou financière, à l'exception de la gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier, ou a pour objet social exclusif de détenir des participations dans des sociétés exerçant les activités précitées. Cette condition s'apprécie de manière continue pendant les cinq années précédant la cession ; (...). ". Aux termes de l'article 150-0 D ter du même code, dans sa rédaction applicable à l'année d'imposition en litige, cet abattement s'applique dans les mêmes conditions aux gains nets réalisés lors de la cession à titre onéreux d'actions, de parts ou de droits démembrés portant sur les actions ou parts d'une petite ou moyenne entreprise, acquis ou souscrits avant le 1er janvier 2006 à condition, notamment, que le propriétaire des parts ou actions ait effectivement exercé en contrepartie d'une rémunération normale les fonctions de président ou de directeur général de la société cédée.

2. D'une part, pour l'application des dispositions des articles 150-0 D bis et 150-0 D ter du code général des impôts analysées ci-dessus, la société propriétaire d'un fonds de commerce qui, après l'avoir exploité directement, le donne en location-gérance, doit être regardée, compte tenu de la nature de ce contrat, comme poursuivant, selon des modalités différentes, son activité antérieure. D'autre part, il résulte des dispositions du b du 2° du II de l'article 150-0 D bis, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005 dont elles sont issues, que les termes " à l'exception de la gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier " doivent être interprétés comme n'excluant du bénéfice de l'abattement que les plus-values réalisées lors de la cession des titres d'une société exerçant une activité financière et dont l'activité principale consiste à gérer son propre patrimoine.

3. Il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme A... ont appliqué l'abattement prévu par les dispositions combinées des articles 150-0 D bis et 150-0 D ter du code général des impôts à la plus-value d'un montant de 1 047 677 euros réalisée en 2008 lors de la cession des actions détenues dans la société SOGEVE, propriétaire d'un fonds de commerce donné en location gérance à la société Etablissements A...à compter du 1er juillet 2005. L'administration fiscale a remis en cause le bénéfice de cet abattement et a mis à la charge des époux A...un supplément d'impôt sur le revenu au titre de 2008. Après le rejet de leur réclamation, M. et Mme A...ont saisi le tribunal administratif de Rennes qui, par un jugement du 20 mars 2014, a rejeté leur demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu. Par un arrêt du 5 novembre 2015, la cour administrative d'appel de Nantes a également rejeté leur requête. M. et Mme A...se pourvoient en cassation contre cet arrêt.

4. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour a relevé que la société SOGEVE avait perçu au cours des exercices clos en 2006 et 2007, outre le loyer annuel versé par la société Etablissements A...en contrepartie de la location du fonds de commerce, des produits financiers, s'élevant respectivement à 59 076 euros et 36 452 euros, provenant de valeurs mobilières de placement figurant à l'actif de son bilan. Il résulte de ce qui est dit au point 2 ci-dessus, qu'en déduisant de cette circonstance que la société exerçait une activité de gestion de son propre patrimoine mobilier conduisant à exclure les titres de cette société du champ d'application de l'abattement en cause, la cour a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, que M. et Mme A...sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Nantes.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme A...une somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme A...et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 395897
Date de la décision : 10/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-03-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. REVENUS ET BÉNÉFICES IMPOSABLES - RÈGLES PARTICULIÈRES. REVENUS DES CAPITAUX MOBILIERS ET ASSIMILABLES. PLUS-VALUES DE CESSION DE DROITS SOCIAUX, BONI DE LIQUIDATION. - MODALITÉS D'IMPOSITION DES GAINS NETS DE CESSION À TITRE ONÉREUX DE VALEURS MOBILIÈRES ET DE DROITS SOCIAUX RÉALISÉS PAR LES DIRIGEANTS DE SOCIÉTÉS FAISANT VALOIR LEURS DROITS À LA RETRAITE (ART. 150-0 D BIS ET 150-0 D TER DU CGI) - EXCLUSION DU BÉNÉFICE DE L'ABATTEMENT DES PLUS-VALUES DE CESSION DE TITRES D'UNE SOCIÉTÉ EXERÇANT UNE ACTIVITÉ FINANCIÈRE ET DONT L'ACTIVITÉ CONSISTE À GÉRER SON PROPRE PATRIMOINE - NOTION.

19-04-02-03-02 Il résulte des dispositions du b du 2° du II de l'article 150-0 D bis du code général des impôts (CGI), éclairées par leurs travaux préparatoires, que seules les plus-values réalisées lors de la cession des titres d'une société exerçant une activité financière et dont l'activité principale consiste à gérer son propre patrimoine sont exclues du bénéfice de l'abattement prévu par les dispositions combinées de cet article et de l'article 150-0 D ter de ce code. Par suite, la plus-value réalisée lors de la cession d'actions détenues dans une société propriétaire d'un fonds donné en location-gérance ouvre droit au bénéfice de l'abattement.


Publications
Proposition de citation : CE, 10 mai. 2017, n° 395897
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Ophélie Champeaux
Rapporteur public ?: Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon
Avocat(s) : SCP CELICE, SOLTNER, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:395897.20170510
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