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03/05/2017 | FRANCE | N°384113

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 03 mai 2017, 384113


Vu la procédure suivante :

Le président de l'université de Reims a saisi, sur le fondement de l'article L. 232-2 du code de l'éducation, le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) d'une plainte disciplinaire contre M. B...A.... Par une décision n° 664 du 27 janvier 2009, le CNESER, statuant en matière disciplinaire, a infligé à M. A...la sanction d'interdiction d'exercer toute fonction d'enseignement et de recherche au sein d'un établissement public d'enseignement supérieur pendant une durée de trois ans, avec privation de la moitié du trai

tement.

Par une décision n° 331465 du 2 mai 2012, le Conseil d'Eta...

Vu la procédure suivante :

Le président de l'université de Reims a saisi, sur le fondement de l'article L. 232-2 du code de l'éducation, le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER) d'une plainte disciplinaire contre M. B...A.... Par une décision n° 664 du 27 janvier 2009, le CNESER, statuant en matière disciplinaire, a infligé à M. A...la sanction d'interdiction d'exercer toute fonction d'enseignement et de recherche au sein d'un établissement public d'enseignement supérieur pendant une durée de trois ans, avec privation de la moitié du traitement.

Par une décision n° 331465 du 2 mai 2012, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, sur le pourvoi de M.A..., annulé cette décision et renvoyé l'affaire au CNESER.

Par une décision n° 664 du 4 mars 2014, le CNESER, statuant en matière disciplinaire sur renvoi du Conseil d'Etat, a décidé de n'infliger aucune sanction à M.A....

Par un pourvoi, enregistré le 1er septembre 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) réglant l'affaire au fond, de prononcer contre M. A...l'une des sanctions prévues à l'article L. 952-8 du code de l'éducation.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pierre-François Mourier, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Odent, Poulet, avocat de M. A...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 27 janvier 2009, le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), statuant en matière disciplinaire, a infligé à M. B... A..., maître de conférences à l'institut universitaire de technologie de Reims, la sanction d'interdiction d'exercer toutes fonctions d'enseignement ou de recherche dans tout établissement public d'enseignement supérieur pendant une durée de trois ans, avec privation de la moitié du traitement ; que, par une décision du 2 mai 2012, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cette décision et renvoyé l'affaire au CNESER ; que, par une nouvelle décision du 26 juin 2014 contre laquelle la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche se pourvoit en cassation, le CNESER, statuant en matière disciplinaire après renvoi, a décidé de n'infliger aucune sanction à M.A... ;

2. Considérant qu'il résulte des termes mêmes de la décision attaquée que, pour fonder sa décision de n'infliger aucune sanction à M.A..., le CNESER a retenu que la sanction d'interdiction d'exercice dans tout établissement public d'enseignement supérieur pendant trois ans avec privation de la moitié du traitement prononcée le 27 janvier 2009 avait été entièrement exécutée avant d'être annulée, en cassation, par le Conseil d'Etat statuant au contentieux ; que, toutefois, s'il appartenait au CNESER, statuant en matière disciplinaire, de tenir compte de cette circonstance pour fixer les modalités d'exécution de toute nouvelle sanction qu'il aurait été amené à prononcer en statuant après le renvoi de l'affaire par le Conseil d'Etat, il ne pouvait, eu égard à l'effet rétroactif de l'annulation prononcée par le juge de cassation, déduire de cette seule circonstance qu'elle faisait obstacle à ce qu'il prononce à nouveau, pour les mêmes faits, la même sanction à l'égard de l'intéressé ; que, par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen du pourvoi, la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche est fondée à soutenir que la décision qu'elle attaque est entachée d'erreur de droit ;

3. Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 821-2 du code de justice administrative : " Lorsque l'affaire fait l'objet d'un second pourvoi en cassation, le Conseil d'Etat statue définitivement sur cette affaire " ; qu'il y a lieu, par suite, de régler l'affaire au fond ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de nombreux témoignages circonstanciés et concordants d'étudiants ainsi que d'enseignants et membres du personnel de l'institut universitaire de technologie de Reims, que M.A..., maître de conférences en énergétique, génie des procédés, a fait preuve, à de nombreuses reprises, au cours des années 2006 et 2007, d'un comportement déplacé à l'égard d'une partie de ses étudiantes et commis des négligences dans l'organisation et le déroulement des enseignements dont il avait la charge, notamment en s'absentant en cours de séance à plusieurs reprises et sans motif, ou en méconnaissant les exigences de transparence et d'équité dans sa notation ; qu'il a également manqué à plusieurs reprises à ses obligations en tenant, devant ses étudiants, des propos polémiques et injurieux à l'adresse de plusieurs membres de la direction du département " génie, conditionnement et emballage " au sein duquel il enseignait, en s'abstenant régulièrement de participer aux réunions et rencontres organisées au sein du département ainsi qu'en adoptant une attitude inconvenante et irrespectueuse à l'égard de certaines de ses collègues ; que, même si certains témoignages peuvent avoir été dictés par une hostilité à son égard et qu'une partie des manquements reprochés trouvent aussi leur raison dans le climat conflictuel qui régnait alors au sein du département, ces faits sont constitutifs de fautes de nature à justifier une sanction disciplinaire ;

5. Considérant qu'eu égard à la gravité des manquements commis, il y a lieu d'infliger à M. A...la sanction d'interdiction d'exercer toutes fonctions d'enseignement ou de recherche dans tout établissement public d'enseignement supérieur pendant trois ans, avec privation de la moitié du traitement ; qu'il n'y pas lieu, en revanche, de prévoir d'exécution de cette sanction dès lors que, comme il a été dit au point 2, une sanction identique, prononcée pour les mêmes faits, a déjà été entièrement exécutée à la date de la présente décision ;

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche du 26 juin 2014 est annulée.

Article 2 : Il est interdit à M. A...d'exercer toutes fonctions d'enseignement ou de recherche dans tout établissement public d'enseignement supérieur pendant trois ans avec privation de la moitié du traitement.

Article 3 : La sanction prononcée à l'article 2 ayant déjà été exécutée, il n'y a pas lieu de prévoir de période d'exécution de cette sanction.

Article 4 : Les conclusions de M. A...présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, à M. B...A...et à l'université de Reims.


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 384113
Date de la décision : 03/05/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 03 mai. 2017, n° 384113
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Pierre-François Mourier
Rapporteur public ?: Mme Sophie-Justine Lieber
Avocat(s) : SCP ODENT, POULET

Origine de la décision
Date de l'import : 16/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:384113.20170503
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