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26/04/2017 | FRANCE | N°403979

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 26 avril 2017, 403979


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 3 octobre 2016, 3 janvier 2017 et 21 mars 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Weleda demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du directeur général de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés du 2 novembre 2015 relative aux conditions de prise en charge des préparations magistrales définies à l'article L. 5121-1 du code de la santé publique et aux pr

oduits homéopathiques qu'elle fabrique ;

2°) d'enjoindre à la Caisse nationale...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 3 octobre 2016, 3 janvier 2017 et 21 mars 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Weleda demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du directeur général de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés du 2 novembre 2015 relative aux conditions de prise en charge des préparations magistrales définies à l'article L. 5121-1 du code de la santé publique et aux produits homéopathiques qu'elle fabrique ;

2°) d'enjoindre à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, d'une part, d'insérer en première page de son site Internet, dans les deux jours à compter de la décision à intervenir, un communiqué faisant état de l'annulation de la décision attaquée et du caractère remboursable des préparations magistrales homéopathiques qu'elle fabrique en sous-traitance, pendant une durée minimale de deux mois et, d'autre part, d'en informer les caisses primaires d'assurance maladie, dans ce même délai, en leur demandant d'en informer, dans les quinze jours, les officines pharmaceutiques ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain ;

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sabine Monchambert, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Jean Lessi, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la société Weleda, et à la SCP Baraduc, Duhamel, Rameix, avocat de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés.

Considérant ce qui suit :

1. Par un courrier du 2 novembre 2015, dont la société Weleda demande l'annulation pour excès de pouvoir, le directeur général de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, à la suite d'une information sur les facturations présentées aux caisses d'assurance maladie, a rappelé à cette société les conditions de prise en charge des préparations magistrales définies à l'article L. 5121-1 du code de la santé publique, l'a informée du caractère non remboursable des produits homéopathiques numérotés qu'elle fabrique et a porté à sa connaissance sa décision d'en informer les éditeurs de bases de données implantées dans les logiciels de facturation destinés aux officines de pharmacie.

2. En premier lieu, le directeur général de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, qui, en vertu de l'article L. 221-3-1 du code de la sécurité sociale, est notamment chargé de prendre les mesures nécessaires au pilotage du réseau des caisses du régime général et d'assurer pour les systèmes d'information les responsabilités prévues à l'article L. 161-28 du même code, avait compétence pour prendre les mesures utiles à une pratique uniforme des caisses primaires d'assurance maladie en matière de remboursement des produits de la société requérante. Aucun texte ni aucun principe ne lui imposait de respecter une procédure contradictoire préalablement à l'acte attaqué. Enfin, contrairement à ce que soutient la société requérante, celui-ci est, en tout état de cause, suffisamment motivé.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique : " On entend par : / 1° Préparation magistrale, tout médicament préparé selon une prescription médicale destinée à un malade déterminé en raison de l'absence de spécialité pharmaceutique disponible disposant d'une autorisation de mise sur le marché, de l'une des autorisations mentionnées aux articles L. 5121-9-1 et L. 5121-12, d'une autorisation d'importation parallèle ou d'une autorisation d'importation délivrée à un établissement pharmaceutique dans le cadre d'une rupture de stock d'un médicament, soit extemporanément en pharmacie, soit dans les conditions prévues à l'article L. 5125-1 ou à l'article L. 5126-2 (...) ". Le troisième alinéa de l'article L. 5125-1 du même code précise que : " Pour certaines catégories de préparations, une officine peut, par un contrat écrit, confier l'exécution d'une préparation à un établissement pharmaceutique autorisé à fabriquer des médicaments par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ou à toute personne titulaire d'une autorisation de fabrication de médicaments délivrée en application de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (...) ". Les huitième et neuvième alinéas de l'article L. 5126-2 de ce code disposent que : " Pour certaines catégories de préparations, une pharmacie à usage intérieur d'un établissement de santé peut confier, par un contrat écrit, la réalisation de préparations à un établissement pharmaceutique autorisé à fabriquer des médicaments. (...) / Les établissements pharmaceutiques des établissements de santé peuvent, à titre exceptionnel et sous réserve que l'autorisation délivrée en application de l'article L. 5124-9 le précise, confier sous leur responsabilité, par un contrat écrit, la réalisation de préparations hospitalières à un établissement pharmaceutique autorisé pour la fabrication de médicaments (...) ".

4. Il résulte de ces dispositions, qui doivent être interprétées dans le respect des objectifs de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain, que, même lorsqu'elles ne sont pas préparées extemporanément en pharmacie mais exécutées par un établissement pharmaceutique dans les conditions prévues à l'article L. 5125-1 ou à l'article L. 5126-2 du code de la santé publique, les préparations magistrales doivent être préparées selon une prescription médicale destinée à un malade déterminé, c'est-à-dire rédigée antérieurement à leur préparation, laquelle doit être réalisée spécifiquement pour un malade préalablement identifié. Par suite, en indiquant que les produits homéopathiques Weleda numérotés, fabriqués en série à l'avance selon une formule prédéfinie et sans être destinés à un malade particulier, ne répondent pas à la définition des préparations magistrales, le directeur général de la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, qui ne s'est pas fondé sur des faits matériellement inexacts, n'a pas méconnu le sens ou la portée des dispositions de l'article L. 5121-1 du code de la santé publique.

5. En dernier lieu, s'il appartient à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés, comme aux caisses primaires d'assurance maladie, d'assurer le respect des dispositions en vigueur en matière de remboursement de médicaments pour l'ensemble des établissements pharmaceutiques, la société requérante ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance du principe d'égalité et du principe de libre concurrence à l'encontre de l'acte attaqué, qui porte à sa connaissance les dispositions prises en ce qui concerne les produits qu'elle commercialise, en tirant les conséquences nécessaires de la législation applicable, sans préjudice des dispositions similaires à prendre pour les produits qui présenteraient les mêmes caractéristiques.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la société Weleda n'est pas fondée à demander l'annulation de l'acte qu'elle attaque. Ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent, dès lors, qu'être également rejetées.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Weleda une somme de 3 000 euros à verser à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les dispositions de cet article font, en revanche, obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la société Weleda présentées au même titre.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la société Weleda est rejetée.

Article 2 : La société Weleda versera une somme de 3 000 euros à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Weleda et à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés.

Copie en sera adressée à la ministre des affaires sociales et de la santé.


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 403979
Date de la décision : 26/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 26 avr. 2017, n° 403979
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sabine Monchambert
Rapporteur public ?: M. Jean Lessi
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ ; SCP BARADUC, DUHAMEL, RAMEIX

Origine de la décision
Date de l'import : 09/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:403979.20170426
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