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31/03/2017 | FRANCE | N°407470

France | France, Conseil d'État, 4ème - 5ème chambres réunies, 31 mars 2017, 407470


Vu la procédure suivante :

La Caisse d'épargne et de prévoyance de Normandie, à l'appui de ses conclusions présentées devant le tribunal administratif de Rouen et tendant à l'annulation, d'une part, de la décision du 24 septembre 2012 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, du travail et de l'emploi de Haute-Normandie l'a mise en demeure de faire cesser une situation dangereuse pour la santé et la sécurité de ses salariés ainsi que, d'autre part, de la décision implicite de rejet née le 2 juillet 2014 du silence gardé par le ministre du tra

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Vu la procédure suivante :

La Caisse d'épargne et de prévoyance de Normandie, à l'appui de ses conclusions présentées devant le tribunal administratif de Rouen et tendant à l'annulation, d'une part, de la décision du 24 septembre 2012 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, du travail et de l'emploi de Haute-Normandie l'a mise en demeure de faire cesser une situation dangereuse pour la santé et la sécurité de ses salariés ainsi que, d'autre part, de la décision implicite de rejet née le 2 juillet 2014 du silence gardé par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social sur son recours hiérarchique, a produit un mémoire, présenté en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, par lequel elle soulève une question prioritaire de constitutionnalité.

Par une ordonnance n° 1402947 du 31 janvier 2017, enregistrée le 3 février 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Rouen, avant de statuer sur la requête de la Caisse d'épargne et de prévoyance de Normandie, a décidé, en application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des articles L. 4721-1 et L. 4721-2 du code du travail.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code du travail, notamment ses articles L. 4721-1 et L. 4721-2 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sara-Lou Gerber, auditeur,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Célice, Soltner, Texidor, Perier, avocat de la Caisse d'épargne et de prévoyance de Normandie ;

1. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et qu'elle soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant que, dans son ordonnance du 31 janvier 2017, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Rouen a limité sa transmission aux dispositions des articles L. 4721-1 et L. 4721-2 du code du travail ;

3. Considérant que l'article L. 4721-1 du code du travail prévoit que le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi peut, sur le rapport de l'inspecteur du travail constatant une situation dangereuse, mettre en demeure un employeur de remédier à cette situation si celle-ci résulte " 1° D'un non-respect par l'employeur des principes généraux de prévention prévus par les articles L. 4121-1 à L. 4121-5 et L. 4522-1 ; / 2° D'une infraction à l'obligation générale de santé et de sécurité résultant des dispositions de l'article L. 4221-1 " ; que l'article L. 4721-2 du même code prévoit que l'inspecteur du travail peut dresser un procès-verbal à l'employeur si la situation dangereuse n'a pas cessé à l'expiration du délai fixé par la mise en demeure ;

4. Considérant, en premier lieu, que si les dispositions de l'article R. 4741-2 du code du travail, en vigueur à la date des décisions attaquées devant le tribunal administratif de Rouen, permettaient de sanctionner de l'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe le fait, pour l'employeur, de ne pas avoir satisfait à une mise en demeure prononcée sur le fondement des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 4721-1 du code du travail, cette mise en demeure ne peut être regardée comme l'ouverture de la procédure de sanction prévue par l'article R. 4741-2 cité ci-dessus ; que, dès lors, ni cette mise en demeure, ni le procès-verbal que peut dresser l'inspecteur du travail en application de l'article L. 4721-2 du même code ne revêtent, par eux-mêmes, le caractère d'une sanction ; que, par suite, la requérante ne saurait utilement soutenir que ces dispositions législatives méconnaissent, en raison de l'imprécision qui entacherait celles des situations susceptibles de conduire à une telle mise en demeure, le principe constitutionnel de légalité des délits et des peines ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que les mises en demeure prononcées sur le fondement des dispositions contestées de l'article L. 4721-1 du code du travail sont susceptibles de faire l'objet des voies de recours de droit commun devant le juge administratif, au nombre desquelles les procédures d'urgence en référé ; que la requérante ne saurait par suite, en tout état de cause, soutenir que ces dispositions méconnaissent le principe de sécurité juridique issu des dispositions de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 au seul motif qu'elles ne sont pas assorties d'un recours à caractère suspensif ;

6. Considérant, enfin, que si la requérante soutient que les dispositions litigieuses méconnaissent l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la norme, cette question, qui n'a pas été soumise au tribunal administratif, ne peut être présentée pour la première fois au Conseil d'Etat saisi, en application de l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, d'une ordonnance de transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité ; qu'au demeurant, la méconnaissance de cet objectif de valeur constitutionnelle ne peut, en elle-même, être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la question prioritaire de constitutionnalité transmise, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux ; que, par suite, il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

D E C I D E :

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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité transmise par le tribunal administratif de Rouen.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Caisse d'épargne et de prévoyance de Normandie, à la ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et au tribunal administratif de Rouen.

Copie sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 4ème - 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 407470
Date de la décision : 31/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Publications
Proposition de citation : CE, 31 mar. 2017, n° 407470
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sara-Lou GERBER
Rapporteur public ?: M. Frédéric Dieu
Avocat(s) : SCP CELICE, SOLTNER, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:407470.20170331
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