La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/03/2017 | FRANCE | N°404876

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 31 mars 2017, 404876


Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Mayotte de suspendre, en application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de l'arrêté du 8 septembre 2016 par lequel le préfet de Mayotte a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire.

Par une ordonnance n° 1600832 du 20 octobre 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique

, enregistrés les 4 et 21 novembre 2016 et 17 mars 2017 au secrétariat du contentieux du...

Vu la procédure suivante :

Mme A...B...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Mayotte de suspendre, en application de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de l'arrêté du 8 septembre 2016 par lequel le préfet de Mayotte a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire.

Par une ordonnance n° 1600832 du 20 octobre 2016, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 et 21 novembre 2016 et 17 mars 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Stéphane Decubber, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Louis Dutheillet de Lamothe, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Spinosi, Sureau, avocat de MmeB....

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que MmeB..., de nationalité comorienne, mère d'un enfant né en 2004 à Mayotte, a sollicité un titre de séjour " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 8 septembre 2016, le préfet de Mayotte a refusé de lui délivrer ce titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire ; que par une ordonnance du 20 octobre 2016, contre laquelle Mme B... se pourvoit en cassation, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a rejeté sa demande de suspension de cet arrêté ;

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. " ; que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés, saisi d'une demande de suspension d'une décision refusant la délivrance d'un titre de séjour, d'apprécier et de motiver l'urgence compte tenu de l'incidence immédiate du refus de titre de séjour sur la situation concrète de l'intéressé ; que cette condition d'urgence sera en principe constatée dans le cas d'un refus de renouvellement du titre de séjour, comme d'ailleurs d'un retrait de celui-ci ; que, dans les autres cas, il appartient au requérant de justifier de circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier à très bref délai d'une mesure provisoire dans l'attente d'une décision juridictionnelle statuant sur la légalité de la décision litigieuse ;

3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 514-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour la mise en oeuvre du présent titre, sont applicables en Guyane, en Guadeloupe, à Mayotte, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin les dispositions suivantes : / 1° Si l'autorité consulaire le demande, l'obligation de quitter sans délai le territoire français ne peut être mise à exécution avant l'expiration du délai d'un jour franc à compter de la notification de l'arrêté ; / 2° Sans préjudice des dispositions de l'alinéa précédent, l'étranger qui a fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et qui défère cet acte au tribunal administratif peut assortir son recours d'une demande de suspension de son exécution ; / 3° L'obligation de quitter le territoire français ne peut faire l'objet d'une exécution d'office, si l'étranger a saisi le tribunal administratif d'une demande sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, avant que le juge des référés ait informé les parties de la tenue ou non d'une audience publique en application du deuxième alinéa de l'article L. 522-1 du même code, ni, si les parties ont été informées d'une telle audience, avant que le juge ait statué sur la demande. / En conséquence, l'article L. 512-1, à l'exception de la seconde phrase du premier alinéa de son III, ainsi que les articles L. 512-3 et L. 512-4 ne sont pas applicables dans ces collectivités. " ; qu'en vertu de l'article L. 512-3 du même code, " L'obligation de quitter le territoire français ne peut faire l'objet d'une exécution d'office ni avant l'expiration du délai de départ volontaire ou, si aucun délai n'a été accordé, avant l'expiration d'un délai de quarante-huit heures suivant sa notification par voie administrative, ni avant que le tribunal administratif n'ait statué s'il a été saisi " ;

4. Considérant qu'en se fondant, pour écarter la condition d'urgence, sur la circonstance qu'à supposer même que Mme B...soit interpelée en vue d'être éloignée physiquement, elle disposerait d'un recours permettant en pratique que le juge intervienne en temps utile pour statuer sur sa situation, au regard notamment de sa vie privée et familiale, sans préciser la nature de ce recours ni son caractère suspensif, le juge des référés du tribunal administratif de Mayotte a insuffisamment motivé son ordonnance ; que cette dernière doit, par suite, être annulée ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

6. Considérant que Mme B... fait valoir que la décision litigieuse est entachée d'illégalité dès lors que le préfet ne pouvait légalement lui opposer les dispositions de l'article 47 du code civil relatif aux conditions d'appréciation de la validité des actes d'état civil étrangers, alors qu'elle n'était pas tenue de produire un acte d'état civil à l'appui de sa demande ; qu'elle soutient également que la décision litigieuse méconnaît les stipulations des articles 3 § 1 et 9 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ; qu'elle fait valoir, enfin, que cette décision méconnaît son droit au respect de sa vie privée et familiale, garanti par l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, toutefois, aucun de ces moyens n'est de nature à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ; que dès lors, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la condition d'urgence, la demande de Mme B... doit être rejetée ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance n° 1600832 du 20 octobre 2016 du tribunal administratif de Mayotte est annulée.

Article 2 : La requête présentée par Mme B...tendant à la suspension de l'exécution de l'arrêté du 8 septembre 2016 du préfet de Mayotte est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par Mme B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B...et au ministre de l'intérieur.


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 404876
Date de la décision : 31/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 31 mar. 2017, n° 404876
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Stéphane Decubber
Rapporteur public ?: M. Louis Dutheillet de Lamothe
Avocat(s) : SCP SPINOSI, SUREAU

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:404876.20170331
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award