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31/03/2017 | FRANCE | N°395870

France | France, Conseil d'État, 5ème - 4ème chambres réunies, 31 mars 2017, 395870


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 4 janvier 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat Alliance-Police nationale demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de l'intérieur sur sa demande tendant à l'édiction de dispositions obligeant les policiers à revêtir leur uniforme sur leur lieu de travail et qualifiant leur temps d'habillage et de déshabillage de temps de travail effectif au sens de l'article 2 du décret n° 2000-815 d

u 25 août 2000, ensemble la décision expresse de rejet du ministre de l'inté...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 4 janvier 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat Alliance-Police nationale demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par le ministre de l'intérieur sur sa demande tendant à l'édiction de dispositions obligeant les policiers à revêtir leur uniforme sur leur lieu de travail et qualifiant leur temps d'habillage et de déshabillage de temps de travail effectif au sens de l'article 2 du décret n° 2000-815 du 25 août 2000, ensemble la décision expresse de rejet du ministre de l'intérieur du 6 novembre 2015 ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur d'édicter de telles dispositions, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à l'expiration du délai d'un mois à compter de la notification de la décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la directive 89/391/CEE du Conseil du 12 juin 1989 ;

- la directive 2003/88/CEE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 ;

- le décret n° 2000-815 du 25 août 2000 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Guillaume Leforestier, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Polge, rapporteur public.

1. Considérant que le syndicat Alliance Police nationale a demandé au ministre de l'intérieur d'instituer une obligation pour les policiers de revêtir et d'ôter leur uniforme sur leur lieu de travail et de considérer le temps passé à l'habillage et au déshabillage comme du temps de travail effectif au sens de l'article 2 du décret du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat ; que par une décision implicite du 21 septembre 2015 et une décision expresse du 6 novembre 2015, dont le syndicat Alliance Police nationale demande l'annulation pour excès de pouvoir, le ministre de l'intérieur a rejeté cette demande ;

2. Considérant qu'aux termes de son article 1er, la directive du 12 juin 1989 a pour objet " la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail " ; qu'aux termes du 1 de son article 5 : " L'employeur est obligé d'assurer la sécurité et la santé des travailleurs dans tous les aspects liés au travail " ; que si le syndicat requérant soutient que le fait, pour les fonctionnaires des services actifs de la police nationale, de revêtir leur uniforme à leur domicile et de le porter sur le trajet entre leur domicile et leur lieu de travail les expose à des risques, notamment d'agression, aucune disposition n'interdit à ces fonctionnaires de revêtir et d'ôter cet uniforme sur leur lieu de travail ; qu'en s'abstenant d'instituer une obligation, pour les fonctionnaires de police, de revêtir et d'ôter leur uniforme sur leur lieu de travail et en laissant à leur libre appréciation le choix du lieu où ils peuvent le faire dans les meilleures conditions de sécurité, le ministre de l'intérieur n'a pas méconnu les dispositions de la directive du 12 juin 1989 ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la directive du 4 novembre 2003 : " Aux fins de la présente directive, on entend par :/ 1. "temps de travail": toute période durant laquelle le travailleur est au travail, à la disposition de l'employeur et dans l'exercice de son activité ou de ses fonctions, conformément aux législations et/ou pratiques nationales ;/ 2. "période de repos": toute période qui n'est pas du temps de travail ; " ; qu'aux termes de l'article 2 du décret du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique de l'Etat et dans la magistrature : " La durée du travail effectif s'entend comme le temps pendant lequel les agents sont à la disposition de leur employeur et doivent se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles " ; que le temps qu'un fonctionnaire tenu de porter un uniforme consacre à son habillage et son déshabillage ne peut être regardé, alors même que ces opérations seraient effectuées sur le lieu de travail, comme un temps de travail au sens de cette directive ou comme un temps de travail effectif au sens de ce décret, dès lors qu'il s'agit d'un temps au cours duquel le fonctionnaire se met en état de prendre son service sans pouvoir encore se conformer aux directives de ses supérieurs ; qu'ainsi les moyens tirés de ce que le ministre de l'intérieur aurait méconnu les dispositions précitées en refusant d'édicter des dispositions qualifiant le temps d'habillage et de déshabillage des policiers de temps de travail doivent être écartés ;

4. Considérant que le principe d'égalité de traitement n'est susceptible de s'appliquer, s'agissant de fonctionnaires, qu'entre agents d'un même corps ; que, par suite, le moyen tiré de l'existence d'une disparité de traitement, en ce qui concerne la prise en compte du temps d'habillage et de déshabillage, entre les fonctionnaires de police d'une part et les agents de la fonction publique hospitalière, les sapeurs-pompiers professionnels et les personnels des services déconcentrés de l'administration pénitentiaire d'autre part, qui n'appartiennent pas aux mêmes corps, ne saurait être accueilli ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions aux fins d'injonction présentées par le syndicat Alliance Police nationale ne peuvent qu'être rejetées ;

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête du syndicat Alliance Police nationale est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat Alliance-Police nationale et au ministre de l'intérieur.

Copie sera transmise à la ministre de la fonction publique et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 5ème - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 395870
Date de la décision : 31/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 31 mar. 2017, n° 395870
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guillaume Leforestier
Rapporteur public ?: M. Nicolas Polge

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:395870.20170331
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