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20/03/2017 | FRANCE | N°389561

France | France, Conseil d'État, 4ème - 5ème chambres réunies, 20 mars 2017, 389561


Vu la procédure suivante :

1° Sous le n° 389561, par une requête, un mémoire complémentaire et deux mémoires en réplique, enregistrés les 17 avril 2015, 13 mai 2015, 1er février 2016 et 15 avril 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat maritime FO de la façade Atlantique demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2015-219 du 27 février 2015 relatif à la résolution des litiges individuels entre les marins et leurs employeurs.

2° Sous le n° 389713, par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire e

n réplique, enregistrés les 23 avril 2015, 26 mai 2015 et 1er février 2016 au secré...

Vu la procédure suivante :

1° Sous le n° 389561, par une requête, un mémoire complémentaire et deux mémoires en réplique, enregistrés les 17 avril 2015, 13 mai 2015, 1er février 2016 et 15 avril 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat maritime FO de la façade Atlantique demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2015-219 du 27 février 2015 relatif à la résolution des litiges individuels entre les marins et leurs employeurs.

2° Sous le n° 389713, par une requête, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 23 avril 2015, 26 mai 2015 et 1er février 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat maritime FO du littoral Manche Mer du Nord demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le même décret.

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3° Sous le n° 389714, par une requête, un mémoire complémentaire et deux mémoires en réplique, enregistrés les 23 avril 2015, 20 mai 2015 et 1er et 4 février 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat maritime FO du littoral des régions Corse et PACA demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le même décret.

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Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et les libertés fondamentales ;

- le code des transports ;

- le code du travail ;

- le code de l'organisation judiciaire ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Huet, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Sophie-Justine Lieber, rapporteur public ;

1. Considérant que les requêtes visées ci-dessus sont dirigées contre le même décret du 27 février 2015 relatif à la résolution des litiges individuels entre les marins et leurs employeurs ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

Sur la légalité externe :

2. Considérant que le contreseing du décret attaqué par le ministre chargé du travail n'était pas nécessaire dès lors que ce décret n'implique pas nécessairement l'intervention de mesures d'exécution que ce ministre serait compétent pour signer ou contresigner ;

3. Considérant que le moyen par lequel les requérants se bornent, sans aucune précision, à alléguer qu'il n'est pas établi que le décret attaqué ne comporterait pas de disposition ajoutée après l'examen du projet de texte du gouvernement par le Conseil d'Etat ne peut qu'être écarté ;

Sur la légalité interne :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5542-48 du code des transports, dans sa version issue de l'article 25 de la loi du 16 juillet 2013 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine du développement durable : " Tout différend qui peut s'élever à l'occasion de la formation, de l'exécution ou de la rupture d'un contrat de travail entre l'employeur et le marin est porté devant le juge judiciaire. Sauf en ce qui concerne le capitaine, cette instance est précédée d'une tentative de conciliation devant l'autorité compétente de l'Etat (...) / Les conditions d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'Etat " ; qu'aux termes de l'article 1er du décret attaqué : " Le directeur départemental des territoires et de la mer procède à la tentative de conciliation entre les marins, à l'exception du capitaine, et leurs employeurs, dans les cas prévus par l'article L. 5542-48 du code des transports " ;

5. Considérant, en premier lieu, que les requérants soutiennent que les dispositions citées ci-dessus de l'article L. 5542-48 du code des transports, en ce que la tentative de conciliation qu'elles prévoient s'effectue devant un représentant de l'Etat, sont incompatibles avec le principe d'impartialité rappelé par les stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, toutefois, une autorité appelée à procéder à une tentative de conciliation n'est ni une autorité juridictionnelle ni un tribunal au sens des stipulations de l'article 6, paragraphe 1, de cette convention ; que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que l'article L. 5542-48 du code des transports, cité au point 4, prévoit que la tentative de conciliation est effectuée par l'autorité compétente de l'Etat ; que les dispositions de l'article 1er du décret attaqué se bornent à préciser, eu égard à l'organisation territoriale de l'Etat, la qualité de ce représentant de l'Etat ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que ces dispositions du décret méconnaîtraient le principe d'impartialité, au motif que la tentative de conciliation est faite devant le représentant qu'elles désignent, est inopérant ;

7. Considérant, en troisième lieu, que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, l'article 1er du décret attaqué se borne, s'agissant des capitaines, à rappeler les dispositions de l'article L. 5542-48 du code des transports qui les excluent de la procédure de conciliation ; qu'elles n'ont par suite ni pour objet ni pour effet de priver les capitaines d'un accès au juge en cas de conflit avec leur employeur ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte également des mêmes dispositions de l'article L. 5542-48 du code des transports que le législateur a entendu, par l'introduction d'une procédure de conciliation spécifique qui déroge expressément à celle que prévoient pour les conseils de prud'hommes les articles L. 1454-1 à L. 1454-4 du code du travail, ne pas confier au juge prud'homal le règlement juridictionnel des litiges relatifs à la formation, à l'exécution ou à la rupture d'un contrat de travail entre l'employeur et le marin ; que, par suite, le moyen tiré de ce que, en modifiant les dispositions de l'article R. 221-13 du code de l'organisation judiciaire pour préciser que le tribunal d'instance est compétent pour connaître de ces litiges, le décret attaqué aurait, en écartant la compétence du juge prud'homal, méconnu le principe d'égal accès des salariés au service public de la justice, ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant, enfin, que le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les syndicats requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret qu'ils attaquent ;

D E C I D E :

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Article 1er : Les requêtes du syndicat maritime FO de la façade Atlantique, du syndicat maritime FO du littoral Manche Mer du Nord et du syndicat maritime FO des régions Corse et PACA sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat maritime FO de la façade Atlantique, au syndicat maritime FO du littoral Manche Mer du Nord, au syndicat maritime FO des régions Corse et PACA.

Copie en sera adressée au Premier ministre, à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, à la ministre des affaires sociales et de la santé et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 4ème - 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 389561
Date de la décision : 20/03/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 mar. 2017, n° 389561
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Laurent Huet
Rapporteur public ?: Mme Sophie-Justine Lieber

Origine de la décision
Date de l'import : 28/03/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:389561.20170320
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