Vu la procédure suivante :
L'Association pour la sauvegarde de la Haute-Vienne, M. C...H..., M. D...I..., M. K...E..., M. F...B...G..., M. A... J..., la commune d'Arnac-la-Poste, la commune de Dompierre-les-Eglises, la commune de Saint-Hilaire la Treille, la commune de Saint-Amand Magnazeix et la commune de Saint-Sornin Leulac ont demandé au tribunal administratif de Paris :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 1er avril 2011 par lequel le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire a déterminé les zones, les périodes et les productions ou biens touchés par la calamité agricole pour l'année 2010 en Haute-Vienne, en tant qu'il exclut les communes d'Arnac-la-Poste, de Dompierre-les-Eglises, de Saint-Hilaire la Treille, de Saint-Armand Magnazeix et de Saint-Sornin Leulac de la zone sinistrée ainsi que les exploitations agricoles situées sur le territoire de ces communes ;
2°) d'enjoindre au ministre de réexaminer le dossier ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par une ordonnance n°1116602/7 du 17 janvier 2012, le tribunal administratif de Paris a transmis le dossier de cette requête au tribunal administratif de Limoges.
Par un jugement n° 1200123 du 17 avril 2014, le tribunal administratif de Limoges a donné acte du désistement d'action de la commune d'Arnac-la-Poste et a fait droit aux conclusions des requérants.
Par un arrêt n° 14BX01819 du 15 janvier 2015, sur l'appel formé par le ministre contre ce jugement, la cour administrative d'appel de Bordeaux l'a annulé et a transmis le dossier de la requête au Conseil d'Etat.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt conclut au rejet de la requête.
Par un mémoire, enregistré le 22 février 2017, par l'Association pour la sauvegarde de la Haute-Vienne, MM.H..., I..., E..., B...G..., J..., la commune de Dompierre-les-Eglises, la commune de Saint-Hilaire la Treille, la commune de Saint-Amand Magnazeix et la commune de Saint-Sornin Leulac qui reprennent les conclusions aux fins d'annulation de leur demande initiale et demandent de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Pierre Lombard, auditeur,
- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes, d'une part, de l'article L. 311-1 du code de justice administrative : " Les tribunaux administratifs sont, en premier ressort, juges de droit commun du contentieux administratif, sous réserve des compétences que l'objet du litige ou l'intérêt d'une bonne administration de la justice conduisent à attribuer au Conseil d'Etat ". Aux termes de l'article R. 311-1 du même code : " Le Conseil d'Etat est compétent pour connaître en premier et dernier ressort : / ... 2° Des recours dirigés contre les actes réglementaires des ministres ". En vertu du premier alinéa de l'article R. 312-7 du même code, les litiges relatifs aux décisions concernant des immeubles relèvent de la compétence du tribunal administratif dans le ressort duquel se trouvent les immeubles faisant l'objet du litige.
2. Aux termes, d'autre part, du dernier alinéa de l'article L. 361-5 du code rural et de la pêche maritime : " Les conditions dans lesquelles les calamités agricoles sont reconnues, évaluées et indemnisées sont déterminées par décret". En vertu des cinquième et sixième alinéas de l'article R. 361-21 du même code, s'il estime, à la suite de l'avis du comité national de l'assurance en agriculture, qu'un sinistre présente le caractère de calamité agricole, le ministre chargé de l'agriculture prend un arrêt reconnaissant ce caractère et détermine les zones, les périodes et les productions ou biens touchés par la calamité agricole ainsi, le cas échéant, que le déficit fourrager moyen défini au 7° de l'article R. 361-27.
3. L'arrêté par lequel le ministre chargé de l'agriculture détermine, en application des dispositions citées au point 2, les zones, les périodes et les productions ou biens touchés par la calamité agricole et, le cas échéant, le déficit fourrager moyen, lorsqu'il se borne à appliquer à une zone géographique ou à une catégorie d'administrés données la réglementation en cause, ne présente pas un caractère réglementaire. La requête dirigée contre un tel arrêté ne relève, dès lors, d'aucune des catégories dont il appartient au Conseil d'État de connaître en premier et dernier ressort en vertu de l'article R. 311-1 du code de justice administrative. Il résulte des dispositions de l'article R. 312-7 du même code que le tribunal administratif dans le ressort duquel se situe les parcelles concernées est compétent pour connaître en premier ressort d'une telle demande.
4. Il ressort des pièces du dossier que les requérants demandent l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 1er avril 2011 par lequel le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l'aménagement du territoire a déterminé les zones, les périodes et les productions ou biens touchés par la calamité agricole pour l'année 2010 en Haute-Vienne, en tant qu'il exclut les communes d'Arnac-la-Poste, de Dompierre-les-Eglises, de Saint-Hilaire la Treille, de Saint-Armand Magnazeix et de Saint-Sornin Leulac de la zone sinistrée ainsi que les exploitations agricoles situées sur le territoire de ces communes. Le tribunal administratif de Limoges était donc compétent pour statuer sur cette demande. Ainsi, c'est à tort que, par son arrêt du 15 janvier 2015, la cour administrative d'appel de Bordeaux a transmis au Conseil d'Etat les conclusions précitées, après avoir annulé le jugement du 17 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Limoges y avait fait droit, pour avoir statué sur des conclusions dont il n'avait pas compétence pour connaître. L'annulation de ce jugement, qui est devenue définitive faute de pourvoi sur ce point, prive les requérants de toute possibilité qu'il soit statué sur leur demande. Dans ces conditions, il y a lieu pour le Conseil d'Etat de déclarer nul et non avenu l'arrêt précité de la cour administrative d'appel de Bordeaux et de renvoyer à celle-ci le jugement de la requête d'appel que le ministre chargé de l'agriculture a présenté devant elle.
D E C I D E :
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Article 1 : L'arrêt du 15 janvier 2015 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est déclaré nul et non avenu.
Article 2 : Le jugement de la requête d'appel présentée par le ministre chargé de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt contre le jugement du tribunal administratif de Limoges du 17 avril 2014 est renvoyé devant cette cour.
Article 3 : La présente décision sera notifiée, pour l'ensemble des requérants, à l'association pour la sauvegarde de l'agriculture en Haute-Vienne, première dénommée, et au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt.