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07/02/2017 | FRANCE | N°391912

France | France, Conseil d'État, 5ème - 4ème chambres réunies, 07 février 2017, 391912


Vu la procédure suivante :

Mme C...A...épouse B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 13 décembre 2011 par laquelle l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) a rejeté sa demande d'indemnisation. Par un jugement n° 1200931 du 21 janvier 2014, le tribunal administratif a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 14LY00862 du 16 juillet 2015, la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat le pourvoi formé contre ce jugement par MmeB....
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Vu la procédure suivante :

Mme C...A...épouse B...a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la décision du 13 décembre 2011 par laquelle l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) a rejeté sa demande d'indemnisation. Par un jugement n° 1200931 du 21 janvier 2014, le tribunal administratif a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 14LY00862 du 16 juillet 2015, la cour administrative d'appel de Lyon a transmis au Conseil d'Etat le pourvoi formé contre ce jugement par MmeB....

Par ce pourvoi, enregistré au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon le 20 mars 2014, et un nouveau mémoire, enregistré le 7 janvier 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B...demande :

1°) de renvoyer le jugement de sa requête à la cour administrative d'appel de Lyon ;

2°) à titre subsidiaire, d'annuler ce jugement ;

3°) de mettre à la charge de l'ONIAM une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alain Seban, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Laurence Marion, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Didier, Pinet, avocat de Mme B...et à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B...a demandé à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), sur le fondement des dispositions de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique, de lui verser des indemnités réparant des préjudices qu'elle imputait à une vaccination contre le virus de l'hépatite B qu'elle avait subie à titre obligatoire en raison de son activité professionnelle ; que, par une décision du 13 décembre 2011, le directeur de l'office a rejeté sa demande au motif que le lien entre les préjudices et la vaccination n'était pas établi ; que l'intéressée a saisi le tribunal administratif de Lyon d'une demande tendant à l'annulation de cette décision ; qu'elle se pourvoit en cassation contre le jugement du 21 janvier 2014 par lequel le tribunal a rejeté cette demande comme irrecevable au motif qu'elle tendait à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du directeur de l'ONIAM, alors que cette décision pouvait seulement donner lieu à un litige relevant du plein contentieux indemnitaire ;

Sur la compétence du Conseil d'Etat :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 3111-9 du code de la santé publique : " Sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation intégrale des préjudices directement imputables à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre, est assurée par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales institué à l'article L. 1142-22, au titre de la solidarité nationale. / (...) L'offre d'indemnisation adressée à la victime ou, en cas de décès, à ses ayants droit est présentée par le directeur de l'office. (...)/ L'offre indique l'évaluation retenue pour chaque chef de préjudice, nonobstant l'absence de consolidation ainsi que le montant des indemnités qui reviennent à la victime ou à ses ayants droit, déduction faite des prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, et plus généralement des prestations et indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice. / L'acceptation de l'offre de l'office par la victime vaut transaction au sens de l'article 2044 du code civil. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 3111-31 du même code : " L'office se prononce par une décision motivée : / 1° Sur le caractère obligatoire de la vaccination ; / 2° Le cas échéant, sur l'existence d'un lien de causalité entre le dommage subi par la victime et la vaccination à laquelle il est imputé ; / Lorsque l'office estime que le dommage est indemnisable au titre de l'article L. 3111-9, la décision énumère les différents chefs de préjudice et en détermine l'étendue. (...) " ;

3. Considérant que les litiges nés des décisions mentionnées à l'article R. 3111-31 du code de la santé publique cité ci-dessus et dont la juridiction administrative est compétente pour connaître ressortissent par nature au plein contentieux indemnitaire ; qu'il suit de là que la demande portée par Mme B...devant le tribunal administratif de Lyon, alors même qu'elle se présentait comme une demande d'annulation pour excès de pouvoir de la décision du directeur de l'ONIAM, devait être regardée comme un recours de pleine juridiction tendant à ce que l'indemnisation sollicitée par la requérante soit mise à la charge de l'office ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " (...) le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort:/ (...) 8° Sur toute action indemnitaire ne relevant pas des dispositions précédentes, lorsque le montant des indemnités demandées est inférieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 (...) " ; que l'article R. 222-14 du même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce, fixe ce seuil à la somme de 10 000 euros ; que l'article R. 222-15 prévoit, dans son premier alinéa, qu'il est déterminé " par la valeur totale des sommes demandées dans la requête introductive d'instance " ;

5. Considérant que les actions indemnitaires dont les conclusions n'ont pas donné lieu à une évaluation chiffrée dans la requête introductive d'instance devant le tribunal administratif, et qui ne peuvent ainsi être regardées comme tendant au versement d'une somme supérieure à 10 000 euros, entrent dans le champ des dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 811-1 du code de justice administrative ; que si ces dispositions ne sauraient trouver application quand le requérant, dans sa requête introductive d'instance, a expressément demandé qu'une expertise soit ordonnée afin de déterminer l'étendue de son préjudice, en se réservant de fixer le montant de sa demande au vu du rapport de l'expert, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'aucune demande de cette nature n'a été formulée en première instance par Mme B...; qu'il suit de là que ce jugement attaqué a été rendu en premier et dernier ressort et peut faire l'objet d'un pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat statuant au contentieux ;

Sur le pourvoi en cassation de Mme B...contre le jugement du tribunal administratif de Lyon :

6. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 3 que c'est à tort que le tribunal administratif a considéré la demande de Mme B...comme un recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision du directeur de l'ONIAM refusant de reconnaître l'imputabilité des troubles dont elle se prévalait à la vaccination obligatoire contre l'hépatite B, et a, pour ce motif, rejeté cette demande comme irrecevable ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, le jugement attaqué doit être annulé ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'ONIAM la somme de 3 000 euros à verser à Mme B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre à la charge de MmeB..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 21 janvier 2014 du tribunal administratif de Lyon est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Lyon.

Article 3 : L'ONIAM versera la somme de 3 000 euros à Mme B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par l'ONIAM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme C...A...épouse B...et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.


Synthèse
Formation : 5ème - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 391912
Date de la décision : 07/02/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

PROCÉDURE - DIVERSES SORTES DE RECOURS - RECOURS DE PLEIN CONTENTIEUX - RECOURS AYANT CE CARACTÈRE - CONTESTATION DE LA DÉCISION DE L'ONIAM SE PRONONÇANT SUR UNE DEMANDE D'INDEMNISATION D'UN PRÉJUDICE RÉSULTANT D'UNE VACCINATION OBLIGATOIRE (ART - L - 3111-9 DU CSP) - LITIGE INDEMNITAIRE.

54-02-02-01 Les litiges nés des décisions mentionnées à l'article R. 3111-31 du code de la santé publique (CSP), par lesquelles l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) se prononce sur le caractère obligatoire d'une vaccination, sur l'existence d'un lien de causalité entre cette vaccination et un dommage et sur l'étendue des préjudices indemnisables, dont la juridiction administrative est compétente pour connaître, ressortissent par nature au plein contentieux indemnitaire.

RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITÉ EN RAISON DES DIFFÉRENTES ACTIVITÉS DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTÉ - SERVICE DES VACCINATIONS - CONTESTATION DE LA DÉCISION DE L'ONIAM STATUANT SUR UNE DEMANDE D'INDEMNISATION - NATURE DU CONTENTIEUX - PLEIN CONTENTIEUX INDEMNITAIRE.

60-02-01-03 Les litiges nés des décisions mentionnées à l'article R. 3111-31 du code de la santé publique (CSP), par lesquelles l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) se prononce sur le caractère obligatoire d'une vaccination, sur l'existence d'un lien de causalité entre cette vaccination et un dommage et sur l'étendue des préjudices indemnisables, dont la juridiction administrative est compétente pour connaître, ressortissent par nature au plein contentieux indemnitaire.


Publications
Proposition de citation : CE, 07 fév. 2017, n° 391912
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alain Seban
Rapporteur public ?: Mme Laurence Marion
Avocat(s) : SCP SEVAUX, MATHONNET ; SCP DIDIER, PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 23/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:391912.20170207
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