La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/01/2017 | FRANCE | N°396343

France | France, Conseil d'État, 4ème - 5ème chambres réunies, 18 janvier 2017, 396343


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 janvier et 3 juin 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association En toute franchise région PACA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le Premier ministre sur sa demande du 28 octobre 2015 tendant à ce que soit pris le décret d'application prévu par l'article L. 752-23 du code de commerce ;

2°) d'enjoindre au Premier ministre d'édicter ce décret dans un délai de deux mois à compter de la

notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de re...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 janvier et 3 juin 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association En toute franchise région PACA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le Premier ministre sur sa demande du 28 octobre 2015 tendant à ce que soit pris le décret d'application prévu par l'article L. 752-23 du code de commerce ;

2°) d'enjoindre au Premier ministre d'édicter ce décret dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 21 ;

- le code de commerce, notamment son article L. 752-23 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Laurent Huet, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

1. Considérant qu'en vertu de l'article 21 de la Constitution, le Premier ministre " assure l'exécution des lois " et, sous réserve de la compétence conférée au Président de la République pour les décrets délibérés en Conseil des ministres par l'article 13 de la Constitution, " exerce le pouvoir réglementaire " ; que l'exercice du pouvoir réglementaire comporte non seulement le droit, mais aussi l'obligation de prendre dans un délai raisonnable les mesures qu'implique nécessairement l'application de la loi, hors le cas où le respect des engagements européens et internationaux de la France y ferait obstacle ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 752-23 du code de commerce : " Les agents habilités à rechercher et constater les infractions aux articles L. 752-1 à L. 752-3 en vertu de l'article 9 de la loi n° 89-1008 du 31 décembre 1989 relative au développement des entreprises commerciales et artisanales et à l'amélioration de leur environnement économique, juridique et social, constatant l'exploitation illicite d'une surface de vente, au regard du présent titre, établissent un rapport qu'ils transmettent au préfet du département d'implantation du magasin. / Il en est de même en ce qui concerne les points permanents de retrait par la clientèle d'achats au détail mentionnés à l'article L. 752-3 lorsque les agents habilités constatent l'exploitation d'une surface d'emprise au sol ou d'un nombre de pistes de ravitaillement non autorisé. / Le préfet peut mettre en demeure l'exploitant concerné soit de fermer au public les surfaces de vente exploitées illégalement en cas de création, soit de ramener sa surface commerciale à l'autorisation d'exploitation commerciale accordée par la commission d'aménagement commercial compétente, dans un délai d'un mois. Sans préjudice de l'application de sanctions pénales, il peut, à défaut, prendre un arrêté ordonnant, dans le délai de quinze jours, la fermeture au public des surfaces de vente exploitées illicitement, jusqu'à régularisation effective. Ces mesures sont assorties d'une astreinte journalière de 150 euros par mètre carré exploité illicitement. / En ce qui concerne les points permanents de retrait par la clientèle d'achats au détail, la surface mentionnée au troisième alinéa du présent article est égale à la somme des surfaces énoncées à l'article L. 752-16. / Est puni d'une amende de 15 000 euros le fait de ne pas exécuter les mesures prises par le préfet et prévues au troisième alinéa. / Les modalités d'application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d'Etat. " ;

3. Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 752-23 du code de commerce, introduites par la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, permettent au préfet, saisi d'un rapport établi par des agents habilités à rechercher et constater les infractions aux règles de l'aménagement commercial, de mettre en demeure l'exploitant d'une surface de vente exploitée illégalement de régulariser sa situation et à défaut d'une telle régularisation, d'ordonner la fermeture de celle-ci sous astreinte, jusqu'à ce que l'exploitant ait remédié aux illégalités relevées ; qu'il en va de même en ce qui concerne les points permanents de retrait par la clientèle d'achats au détail mentionnés à l'article L. 752-3 du même code ; que si l'article L. 752-23 du code de commerce renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de définir les modalités de sa mise en oeuvre, l'application de ses dispositions conférant au préfet de telles prérogatives de police administrative, à l'encontre des exploitants de surface de vente et de points permanents de retrait par la clientèle d'achats au détail, n'est pas manifestement impossible en l'absence de mesures réglementaires ;

4. Considérant, en second lieu, que contrairement à ce que soutient l'association requérante qui fait valoir que jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi du 4 avril 2008, les dispositions réglementaires du code de commerce réprimaient, par des peines contraventionnelles, l'exploitation illégale des surfaces de vente, le pouvoir réglementaire ne saurait être tenu, pour assurer l'exécution de la loi, d'édicter des sanctions pénales ; qu'au demeurant, l'article L. 752-23 du code de commerce institue lui-même une sanction pénale, en ce qu'il prévoit que le non-respect des mesures susceptibles d'être prises par le préfet au titre de ses dispositions constitue un délit réprimé par une peine d'amende de 15 000 euros ; que, par ailleurs, il réserve expressément la mise en oeuvre d'autres sanctions pénales, telles que les sanctions pénales réprimant la méconnaissance d'autres législations ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Premier ministre n'était pas tenu de prendre le décret d'application dont la requérante demandait l'édiction ; que, par suite, le refus de prendre ce décret n'est pas illégal ; que, partant, les conclusions aux fins d'annulation présentées par l'association En toute franchise région PACA ne peuvent qu'être rejetées, de même que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ;

6. Considérant, enfin, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de l'association En toute franchise région PACA est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association En toute franchise région PACA, au Premier ministre et au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 4ème - 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 396343
Date de la décision : 18/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 18 jan. 2017, n° 396343
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Laurent Huet
Rapporteur public ?: M. Frédéric Dieu

Origine de la décision
Date de l'import : 31/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:396343.20170118
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award