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18/01/2017 | FRANCE | N°394562

France | France, Conseil d'État, 4ème - 5ème chambres réunies, 18 janvier 2017, 394562


Vu la procédure suivante :

Le conseil départemental de la Ville de Paris de l'ordre des médecins a porté plainte contre M. B...A...devant la chambre disciplinaire de première instance d'Ile-de-France de l'ordre des médecins. Par une décision du 14 janvier 2014, la chambre disciplinaire de première instance a infligé à M. A...la sanction de la radiation du tableau de l'ordre.

Par une décision n° 12269 du 15 juillet 2015, la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a rejeté l'appel formé par M. A...contre cette décision.

Par un pourvoi sommai

re et un mémoire complémentaire, enregistrés les 13 novembre 2015 et 15 février 2...

Vu la procédure suivante :

Le conseil départemental de la Ville de Paris de l'ordre des médecins a porté plainte contre M. B...A...devant la chambre disciplinaire de première instance d'Ile-de-France de l'ordre des médecins. Par une décision du 14 janvier 2014, la chambre disciplinaire de première instance a infligé à M. A...la sanction de la radiation du tableau de l'ordre.

Par une décision n° 12269 du 15 juillet 2015, la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a rejeté l'appel formé par M. A...contre cette décision.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 13 novembre 2015 et 15 février 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit son appel ;

3°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins et du conseil départemental de la Ville de Paris de l'ordre des médecins la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie Baron, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Occhipinti, avocat de M. A...;

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le conseil départemental de la Ville de Paris de l'ordre des médecins a porté plainte contre M. A..., médecin spécialiste en médecine générale, devant la chambre disciplinaire de première instance d'Ile-de-France de l'ordre des médecins au motif qu'il avait un comportement de nature à déconsidérer la profession de médecin, méconnaissant ainsi les obligations déontologiques qui lui incombent en vertu de l'article R. 4127-31 du code de la santé publique ; que cette plainte était fondée sur des faits, mentionnés dans un courrier envoyé le 29 juin 2012 au Conseil national de l'ordre des médecins par le service des impôts des particuliers de Suresnes de la direction générale des finances publiques, faisant état de ce que M. A... ne s'était pas acquitté des sommes mises à sa charge au titre de plusieurs exercices par l'administration fiscale au titre de la taxe d'habitation et de l'impôt sur le revenu dû à raison des vacations qu'il accomplissait en médecine générale dans différents établissements hospitaliers ; que, par une décision du 14 janvier 2014, la chambre disciplinaire de première instance a prononcé à l'encontre de M. A... la sanction de la radiation du tableau de l'ordre ; que saisie de l'appel de M.A..., la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins a, par une décision du 15 juillet 2015, confirmé cette sanction ; que M. A... se pourvoit en cassation contre cette décision ;

2. Considérant que la circonstance qu'une sanction disciplinaire prononcée à l'encontre d'un praticien serait fondée sur des pièces dont la production aurait été faite de sa propre initiative, par un tiers, en méconnaissance d'une obligation de secret propre à ce dernier, n'est pas par elle-même de nature à entacher la régularité ou le bien-fondé de la décision du juge disciplinaire ; qu'il incombe seulement à celui-ci, après avoir soumis de telles pièces au débat contradictoire, de tenir compte de leur origine et des conditions dans lesquelles elles sont produites pour en apprécier, au terme de la discussion contradictoire devant lui, le caractère probant ;

3. Considérant, par suite, que si M. A...soutient que les pièces produites devant la chambre disciplinaire nationale par le conseil départemental de la Ville de Paris de l'ordre des médecins ont été transmises à ce conseil en méconnaissance du secret professionnel qui s'impose aux agents de l'administration fiscale en vertu de l'article L. 103 du livre des procédures fiscales, cette circonstance est par elle-même sans incidence sur la régularité ou le bien-fondé de la décision rendue par la chambre disciplinaire nationale ; que M. A...n'est, par conséquent, pas fondé à soutenir que la décision qu'il attaque serait, pour ce motif, entachée d'irrégularité ou d'erreur de droit ;

4. Considérant toutefois qu'en retenant, pour sanctionner le fait que M. A...était redevable depuis plusieurs années de sommes réclamées par le service des impôts des particuliers de son ancien lieu de résidence, au titre de l'impôt sur le revenu et de la taxe d'habitation, la peine de la radiation du tableau de l'ordre des médecins, la chambre disciplinaire nationale a prononcé une sanction hors de proportion avec la faute qui lui était reprochée ; que M. A...est, par suite, fondé à demander pour ce motif l'annulation de la décision qu'il attaque ;

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du conseil départemental de la Ville de Paris de l'ordre des médecins la somme de 3 500 euros que demande M. A...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins, lequel n'est pas partie à la présente instance ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision de la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins du 15 juillet 2015 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins.

Article 3 : Le conseil départemental de la Ville de Paris de l'ordre des médecins versera à M. A... une somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. A...tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge du Conseil national de l'ordre des médecins au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. B... A...et au conseil départemental de la Ville de Paris de l'ordre des médecins.

Copie en sera adressée au Conseil national de l'ordre des médecins.


Synthèse
Formation : 4ème - 5ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 394562
Date de la décision : 18/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

55-04-02-01-01 PROFESSIONS, CHARGES ET OFFICES. DISCIPLINE PROFESSIONNELLE. SANCTIONS. FAITS DE NATURE À JUSTIFIER UNE SANCTION. MÉDECINS. - NON PAIEMENT D'IMPÔTS PAR UN MÉDECIN - FAITS DE NATURE À DÉCONSIDÉRER LA PROFESSION - EXISTENCE - CARACTÈRE HORS DE PROPORTION DE LA RADIATION [RJ1].

55-04-02-01-01 Si le fait, pour un médecin, de n'avoir pas payé des sommes dues au titre de la taxe d'habitation et de l'impôt sur le revenu est constitutif d'un comportement de nature à déconsidérer la profession, qui peut justifier une sanction, la peine de la radiation du tableau de l'ordre des médecins prononcée par la chambre disciplinaire nationale de l'ordre des médecins est hors de proportion avec cette faute.


Références :

[RJ1]

Cf., sur le degré de contrôle, CE, Assemblée, 30 décembre 2014, M.,, n° 381245, p. 443.


Publications
Proposition de citation : CE, 18 jan. 2017, n° 394562
Mentionné aux tables du recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie Baron
Rapporteur public ?: M. Frédéric Dieu
Avocat(s) : SCP MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE ; OCCHIPINTI

Origine de la décision
Date de l'import : 07/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2017:394562.20170118
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