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15/12/2016 | FRANCE | N°395991

France | France, Conseil d'État, 8ème - 3ème chambres réunies, 15 décembre 2016, 395991


Vu la procédure suivante :

1° Sous le n° 395991, par une ordonnance ns° 1510783, 1510786 du 5 janvier 2016, enregistrée le 8 janvier 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président du tribunal administratif de Montreuil a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 311-1 du code de justice administrative, la requête présentée à ce tribunal par le Groupement des exploitants de parachutisme professionnel.

Par cette requête, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Montreuil le 23 décembre 2015, un nouveau mémoire et un mém

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Vu la procédure suivante :

1° Sous le n° 395991, par une ordonnance ns° 1510783, 1510786 du 5 janvier 2016, enregistrée le 8 janvier 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président du tribunal administratif de Montreuil a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 311-1 du code de justice administrative, la requête présentée à ce tribunal par le Groupement des exploitants de parachutisme professionnel.

Par cette requête, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Montreuil le 23 décembre 2015, un nouveau mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 février et 13 juillet 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Groupement des exploitants de parachutisme professionnel demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite, née le 21 octobre 2015, par laquelle le ministre des finances et des comptes publics a refusé de faire droit à sa demande d'abrogation de la note du 1er décembre 2014 de la direction générale des douanes et des droits indirects relative au régime d'exonération de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques pour les associations à but non lucratif et d'enjoindre à la direction générale des douanes et des droits indirects d'abroger cette note ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 395992, par une ordonnance ns° 1510783, 1510786 du 5 janvier 2016, enregistrée le 8 janvier 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le président du tribunal administratif de Montreuil a transmis au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 311-1 du code de justice administrative, la requête présentée à ce tribunal par le Syndicat national des parachutistes professionnels.

Par cette requête, enregistrée au greffe du tribunal administratif de Montreuil le 23 décembre 2015, un nouveau mémoire et un mémoire en réplique, enregistrés les 19 février et 13 juillet 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat national des parachutistes professionnels demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite, née le 21 octobre 2015, par laquelle le ministre des finances et des comptes publics a refusé de faire droit à sa demande d'abrogation de la note du 1er décembre 2014 de la direction générale des douanes et des droits indirects relative au régime d'exonération de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques pour les associations à but non lucratif et d'enjoindre à la direction générale des douanes et des droits indirects d'abroger cette note ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

3° Sous le n° 397147, par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 19 février et 13 juillet 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat national des parachutistes professionnels demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la note du 1er décembre 2014 de la direction générale des douanes et des droits indirects relative au régime d'exonération de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques pour les associations à but non lucratif ainsi que la décision du 22 décembre 2015 par laquelle le ministre des finances et des comptes publics a refusé de faire droit à sa demande d'abrogation de cette note ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

4° Sous le n° 397148, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 19 février et 13 juillet 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Groupement des exploitants de parachutisme professionnel demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la note du 1er décembre 2014 de la direction générale des douanes et des droits indirects relative au régime d'exonération de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques pour les associations à but non lucratif ainsi que la décision du 22 décembre 2015 par laquelle le ministre des finances et des comptes publics a refusé de faire droit à sa demande d'abrogation de cette note ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- la directive 2003/96/CE du 27 octobre 2003 ;

- le code des douanes ;

- le décret n° 2009-805 du 26 juin 2009 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Manon Perrière, auditeur,

- les conclusions de M. Benoît Bohnert, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boutet-Hourdeaux, avocat du Groupement des exploitants de parachutisme professionnel et du Syndicat national des parachutistes professionnels.

1. Considérant qu'il ressort des pièces des dossiers que, par un courrier du 13 août 2015, le Syndicat national des parachutistes professionnels (SNPP) et le Groupement des exploitants de parachutisme professionnel (GEPP) ont demandé à la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) l'abrogation de la note interne du 1er décembre 2014, relative aux modalités d'exonération de taxe intérieure de consommation pour les produits énergétiques (TICPE) utilisés comme carburant à bord des aéronefs, pour les associations à but non lucratif ; que, n'ayant pas reçu de réponse de l'administration à l'issue d'un délai de deux mois, le SNPP et le GEPP demandent, sous les n°s 395991 et 395992, l'annulation pour excès de pouvoir de la décision implicite de rejet née le 21 octobre 2015 et à ce qu'il soit enjoint à la DGDDI d'abroger la note du 1er décembre 2014, ainsi que, sous les n°s 397147 et 397148, l'annulation pour excès de pouvoir de cette note et de la décision du 22 décembre 2015 par laquelle la DGDDI a explicitement refusé de faire droit à leur demande d'abrogation de cette note ;

2. Considérant que ces quatre requêtes présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 14 de la directive 2003/96/CE du Conseil, du 27 octobre 2003, restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité : " 1. Outre les dispositions générales de la directive 92/12/CEE concernant les utilisations exonérées de produits imposables, et sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent les produits suivants de la taxation, selon les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et claire de ces exonérations et d'empêcher la fraude, l'évasion ou les abus : (...) / b) les produits énergétiques fournis en vue d'une utilisation comme carburant ou combustible pour la navigation aérienne autre que l'aviation de tourisme privée. / Aux fins de la présente directive, on entend par "aviation de tourisme privée" l'utilisation d'un aéronef par son propriétaire ou la personne physique ou morale qui peut l'utiliser à la suite d'une location ou à un autre titre, à des fins autres que commerciales et, en particulier, autres que le transport de personnes ou de marchandises ou la prestation de services à titre onéreux ou pour les besoins des autorités publiques./ (...) " ; qu'aux termes de l'article 265 bis du code des douanes, qui assure la transposition de l'article 14 de la directive: " 1. Les produits énergétiques mentionnés à l'article 265 sont admis en exonération des taxes intérieures de consommation lorsqu'ils sont destinés à être utilisés : / (...) b) Comme carburant ou combustible à bord des aéronefs utilisés par leur propriétaire ou la personne qui en a la disposition à la suite d'une location, d'un affrètement ou à tout autre titre à des fins commerciales, notamment pour les besoins d'opérations de transport de personnes, de transport de marchandises ainsi que pour la réalisation de prestations de services à titre onéreux (...) " ; qu'aux termes du 1er article du décret du 26 juin 2009 fixant les modalités d'application du b du 1 de l'article 265 bis du code des douanes relatif à l'exonération de taxe intérieure de consommation pour les produits énergétiques utilisés comme carburant ou combustible à bord des aéronefs : " Pour justifier de l'exonération prévue au b du 1 de l'article 265 bis du code des douanes, les fournisseurs de carburants et combustibles destinés aux aéronefs autres que de tourisme privé doivent détenir une attestation dont le contenu est défini par l'administration, établie par le destinataire des produits. Cette attestation certifie que ces produits sont destinés à être utilisés à bord des aéronefs autres que de tourisme privé au sens de l'article 2. L'attestation peut être annuelle. / La facture ou bon de livraison doit porter une mention relative aux restrictions d'utilisation ainsi que la référence aux textes applicables " ; qu'aux termes de l'article 2 de ce même décret : " Les aéronefs autres que de tourisme privé s'entendent des aéronefs exploités par : / Les autorités publiques ; les personnes titulaires d'une licence d'exploitation mentionnée à l'article L. 330-1 du code de l'aviation civile ; les personnes titulaires d'une autorisation, valable cinq ans, délivrée par l'administration sur la base d'un dossier justifiant du caractère commercial de l'activité. Le renouvellement de cette autorisation donne lieu au dépôt d'un nouveau dossier " ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre des finances et des comptes publics :

4. Considérant, en premier lieu, qu'en ce qui concerne les requêtes enregistrées sous les ns° 395991 et 395992, il ressort des pièces des dossiers que les requérants ont demandé l'abrogation de la note de service du 1er décembre 2014 par un courrier reçu et enregistré le 21 août 2015 par la DGDDI ; que, toutefois, l'absence de transmission à ces requérants de l'accusé de réception de leur demande d'abrogation de la note a eu pour effet de leur rendre inopposables les délais de recours contre la décision implicite de rejet résultant du silence gardé par l'administration ; que, par suite, contrairement à ce que soutient le ministre, ces deux requêtes sont recevables ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces des dossiers que la note du 1er décembre 2014 adressée aux directeurs régionaux des douanes abroge deux précédentes notes de la DGDDI, qui exigeaient des associations à but non lucratif souhaitant bénéficier de l'exonération prévue à l'article 265 bis du code des douanes précité la présentation de documents attestant de leur assujettissement aux impôts commerciaux ; qu'elle précise notamment que " les services déconcentrés ne doivent plus lors de l'instruction d'une demande d'autorisation d'approvisionnement en exonération de TICPE ou de remboursement d'une association type loi 1901 demander de tels documents " ; qu'elle a ainsi pour objet et pour effet de supprimer les conditions et les formalités d'octroi qui existaient antérieurement pour ces associations et présente un caractère impératif pour les services déconcentrés chargés de l'instruction de ces dossiers ; qu'il en résulte que la fin de non-recevoir tirée de ce que cette note ne présenterait pas le caractère d'un acte faisant grief doit être écartée ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'en supprimant les conditions et les formalités d'octroi de l'exonération prévue à l'article 265 bis du code des douanes qui existaient au préalable pour les associations à but non lucratif, la note du 1er décembre 2014 accorde à ces associations, qui exercent une activité concurrente de celle des personnes morales adhérentes au SNPP et au GEPP, le bénéfice systématique d'une exonération fiscale en lien direct avec leur activité économique ; que, dès lors que ce nouveau régime favorise l'activité économique des associations à but non lucratif pratiquant le parachutisme, il est susceptible de léser l'activité économique des organismes qui pratiquent cette activité de manière professionnelle et que représentent les requérants ; qu'ainsi, ces derniers ont intérêt à agir ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la note du 1er décembre 2014 et des décisions rejetant la demande d'abrogation de cette note :

7. Considérant que les dispositions de l'article 265 bis du code des douanes, prises pour l'adaptation de la législation nationale à la directive 2003/96/CE, doivent être interprétées en ce sens que le bénéfice de l'exonération de TICPE qu'elles prévoient pour la navigation aérienne autre que l'aviation de tourisme privée porte sur les activités réalisées à bord des aéronefs à des fins commerciales, pour lesquelles le prestataire de services est assujetti aux impôts commerciaux ; que, par suite, l'article 2 du décret du 26 juin 2009 pris pour l'application de l'article 265 bis pouvait imposer aux utilisateurs d'aéronefs autres que de tourisme privé d'établir une attestation spécifique quant à l'utilisation du carburant ; qu'en conséquence, si les organismes à but non lucratif visés par la note du 1er décembre 2014 peuvent exercer des activités à titre onéreux, le bénéfice de cette exonération ne peut leur être octroyé que s'ils sont également assujettis, à ce titre, aux impôts commerciaux ; qu'ainsi, en estimant que les organismes à but non lucratif ne devaient pas apporter la preuve d'une activité commerciale et de leur assujettissement aux impôts commerciaux afin de bénéficier du régime institué par l'article 265 bis du code des douanes, la DGDDI a commis une erreur de droit ; qu'il en résulte que les requérants sont fondés à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la note du 1er décembre 2014 et des décisions implicite puis explicite par lesquelles la DGDDI a refusé de faire droit à leur demande d'abrogation de cette note ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros, d'une part, au Syndicat national des parachutistes professionnels et, d'autre part, au Groupement des exploitants de parachutisme professionnel au titre de ces dispositions ;

D E C I D E :

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Article 1er : La note du 1er décembre 2014 et les décisions des 21 octobre et 22 décembre 2015 de la direction générale des douanes et des droits indirects sont annulées.

Article 2 : L'Etat versera au Syndicat national des parachutistes professionnels, d'une part, et au Groupement des exploitants de parachutisme professionnel, d'autre part, la somme de 3 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au Syndicat national des parachutistes professionnels, au Groupement des exploitants de parachutisme professionnel ainsi qu'au ministre de l'économie et des finances.


Synthèse
Formation : 8ème - 3ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 395991
Date de la décision : 15/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 15 déc. 2016, n° 395991
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Manon Perrière
Rapporteur public ?: M. Benoît Bohnert
Avocat(s) : SCP BOUTET-HOURDEAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:395991.20161215
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