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20/10/2016 | FRANCE | N°401990

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre jugeant seule, 20 octobre 2016, 401990


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 29 juillet et 1er septembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Distritoys demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'instruction administrative référencée BOI-IS-DEF-10-30-20130410 du 10 avril 2013 en tant qu'elle réitère les dispositions du 3e alinéa du I de l'article 209 du code général des impôts ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice admini

strative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son a...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 29 juillet et 1er septembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Distritoys demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'instruction administrative référencée BOI-IS-DEF-10-30-20130410 du 10 avril 2013 en tant qu'elle réitère les dispositions du 3e alinéa du I de l'article 209 du code général des impôts ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son article 61-1 ;

- le code général des impôts ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- la décision du Conseil constitutionnel n° 2012-662 DC du 29 décembre 2012 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Matias de Sainte Lorette, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du 3e alinéa du I de l'article 209 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 : " Sous réserve de l'option prévue à l'article 220 quinquies, en cas de déficit subi pendant un exercice, ce déficit est considéré comme une charge de l'exercice suivant et déduit du bénéfice réalisé pendant ledit exercice dans la limite d'un montant de 1 000 000 € majoré de 50 % du montant correspondant au bénéfice imposable dudit exercice excédant ce premier montant. Si ce bénéfice n'est pas suffisant pour que la déduction puisse être intégralement opérée, l'excédent du déficit est reporté dans les mêmes conditions sur les exercices suivants. Il en est de même de la fraction de déficit non admise en déduction en application de la première phrase du présent alinéa. "

2. Il ressort des pièces du dossier que la société Distritoys, société mère d'un groupe fiscalement intégré qui exerce une activité de vente de jouets, disposait au 30 juin 2015 de déficits reportables en application de ces dispositions. Elle a décidé de fixer la date de clôture de ses exercices, jusqu'alors clos le 30 juin, au 31 décembre de l'année. Du fait de la saisonnalité de l'activité du groupe, dont les revenus d'exploitation sont concentrés lors des derniers mois de l'année civile, elle a réalisé au titre de l'exercice ouvert le 1er juillet 2015 et clos le 31 décembre de la même année un bénéfice fiscal d'un montant de 11 613 106 euros, nettement supérieur à son bénéfice annuel moyen. Du fait de la limite apportée au report en avant des déficits par les dispositions précitées de l'article 209 du code général des impôts, elle n'a pu imputer que partiellement sur ce bénéfice ses déficits reportables, dont le montant était supérieur. La société demande l'annulation pour excès de pouvoir de l'instruction administrative référencée BOI-IS-DEF-10-30-20130410 du 10 avril 2013 en tant qu'elle réitère les dispositions du 3e alinéa du I de l'article 209 du code général des impôts.

3. Au soutien de sa requête, la société soulève un moyen unique tiré de l'absence de conformité de ces dispositions aux droits et libertés garantis par la Constitution. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de cet article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

4. La société soutient que les dispositions du 3e alinéa du I de l'article 209 du code général des impôts font peser sur les contribuables dont les revenus d'exploitation sont, du fait de la saisonnalité de leur activité, concentrés sur quelques mois de l'année, une charge sans rapport avec leurs facultés contributives et méconnaissent par suite le principe d'égalité devant les charges publiques. Elle fait valoir qu'en l'absence de la limite au report en avant prévue par ces dispositions, elle aurait pu réduire davantage son résultat imposable au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2015 par l'imputation des déficits auparavant générés par son activité et que, à défaut, la cotisation d'impôt sur les sociétés due au titre de cet exercice a présenté pour elle un montant excessif.

5. Néanmoins, les écarts importants constatés par la société entre le résultat de l'exercice clos le 31 décembre 2015 et celui des exercices antérieurs résultent non pas de la limitation du report en avant des déficits que la société conteste, mais de sa décision de modifier la date de clôture de ses exercices, qui a fait apparaître un bénéfice élevé pour cet exercice de six mois. Cette limite, qui au demeurant a pour seul effet de repousser la date à laquelle la société aura pu imputer complètement ses déficits reportables sur ses bénéfices futurs et n'induit ainsi pas de charge fiscale définitive plus élevée, n'est donc pas à l'origine de la charge d'impôt sur les sociétés supportée par la requérante au titre de cet exercice.

6. Il résulte de ce qui précède que la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux. Par suite, il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée. La requête doit donc être rejetée.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la société Distritoys.

Article 2 : La requête de la société Distritoys est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Distritoys et au ministre de l'économie et des finances. Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 9ème chambre jugeant seule
Numéro d'arrêt : 401990
Date de la décision : 20/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 oct. 2016, n° 401990
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Matias de Sainte Lorette
Rapporteur public ?: Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:401990.20161020
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