Vu la procédure suivante :
Par un arrêt n° 70527 du 27 octobre 2014, la Cour des comptes a constitué Mme B...A..., comptable du service des impôts des entreprises de Pornic, débitrice envers l'Etat, au titre de l'exercice 2007, d'une somme de 20 383,99 euros, augmentée des intérêts de droit à compter du 24 septembre 2013.
Par un pourvoi, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés le 19 décembre 2014, le 3 août 2015 et le 14 juin 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre des finances et des comptes publics demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt de la Cour des comptes ;
2°) réglant l'affaire au fond, de constater que la mise en jeu juridictionnelle de la responsabilité du comptable est devenue sans objet.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts ;
- la loi n° 63-156 du 23 février 1963, notamment son article 60 ;
- la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011, notamment son article 90 ;
- le décret n° 77-1017 du 1er septembre 1977 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Clémence Olsina, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public.
1. Considérant, d'une part, qu'en vertu des dispositions de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 de finances pour 1963, qui n'ont pas été modifiées sur ce point par l'article 90 de la loi du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011, la responsabilité personnelle et pécuniaire du comptable public peut être mise en jeu par le ministre dont il relève, le ministre chargé du budget ou le juge des comptes dans les conditions précisées, pour chaque catégorie de comptable public, par les textes réglementaires qui leur sont applicables ; qu'aux termes du II de l'article 90 de la loi du 28 décembre 2011, qui modifie les dispositions du même article 60 : " Le présent article entre en vigueur le 1er juillet 2012. Les déficits ayant fait l'objet d'un premier acte de mise en jeu de la responsabilité d'un comptable public ou d'un régisseur avant cette date demeurent régis par les dispositions antérieures" ; qu'il résulte de ces dispositions que l'article 60 de la loi du 23 février 1963, dans sa version issue de l'article 90 de la loi du 28 décembre 2011, n'est applicable qu'aux manquements ayant fait l'objet d'un premier acte de mise en jeu de la responsabilité du comptable par le ministre dont il relève, le ministre chargé du budget ou par le juge des comptes, à compter du 1er juillet 2012 ;
2. Considérant, d'autre part, qu'en vertu de l'article 429 du code général des impôts, les comptables publics secondaires de la direction générale des finances publiques doivent justifier auprès du comptable principal dont ils relèvent du recouvrement des créances fiscales qu'ils ont prises en charge au plus tard le 31 décembre de la quatrième année suivant celle de leur mise en recouvrement, faute de quoi leur responsabilité est engagée dans les conditions prévues à l'article 60 de la loi du 23 février 1963 ; que le décret du 1er septembre 1977 relatif à la responsabilité des receveurs des administrations financières définit les conditions dans lesquelles leur responsabilité personnelle et pécuniaire est engagée au titre des droits dont ils assurent la perception ;
3. Considérant que l'arrêt attaqué statue, notamment, sur la responsabilité personnelle et pécuniaire de MmeA..., comptable du service des impôts des entreprises de Pornic, à raison du défaut de recouvrement d'une créance de taxe sur la valeur ajoutée de 127 133 euros au titre de l'exercice 2007 ; qu'il résulte des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'en application des articles 429 et suivants du code général des impôts, le directeur régional des finances publiques des Pays de la Loire a, par une décision du 2 avril 2012, soit antérieurement au 1er juillet 2012, mis en jeu la responsabilité de Mme A...au titre, notamment, de cette créance d'impôt non recouvrée ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 2 que, par suite, les dispositions de l'article 60 de la loi du 23 février 1963 issues de l'article 90 de la loi du 28 décembre 2011 n'étaient pas applicables à ce manquement, alors même que la responsabilité de Mme A...a été mise en jeu devant la Cour des comptes, dans les conditions définies par le décret du 1er septembre 1977 précité, après le 1er juillet 2012 ; qu'il suit de là qu'en faisant application des dispositions de l'article 60 dans leur rédaction issue de l'article 90 de la loi du 28 décembre 2011, la Cour des comptes a méconnu leur champ d'application dans le temps ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du pourvoi, l'arrêt attaqué doit être annulé ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la Cour des comptes du 27 octobre 2014 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour des comptes.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie et des finances, à Mme B... A...et au parquet général près la Cour des comptes.