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14/09/2016 | FRANCE | N°389127

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 14 septembre 2016, 389127


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire réplique enregistrés les 31 mars et 22 juin 2015 et le 4 juillet 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Confédération générale du travail demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2015-87 du 28 janvier 2015 relatif au financement mutualisé des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution ;

- la convention

européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code du t...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire réplique enregistrés les 31 mars et 22 juin 2015 et le 4 juillet 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Confédération générale du travail demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2015-87 du 28 janvier 2015 relatif au financement mutualisé des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code du travail ;

- la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 ;

- la décision du Conseil d'Etat n° 389127 du 14 septembre 2015 par laquelle le Conseil d'Etat statuant au contentieux a renvoyé au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la Confédération générale du travail ;

- la décision du Conseil constitutionnel n° 2015-502 QPC du 27 novembre 2015 statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la Confédération générale du travail ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-François de Montgolfier, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Maud Vialettes, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez avocat de la Confédération générale du travail ;

1. Considérant que l'article 31 de la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale a inséré dans le code du travail les articles L. 2135-9 à L. 2135-18 qui déterminent le régime du " financement mutualisé des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs " ; que l'article L. 2135-9 institue un fonds paritaire, chargé d'une mission de service public, destiné à apporter une contribution au financement des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs dans le cadre de leur participation aux missions d'intérêt général de conception, gestion, animation et évaluation des politiques menées paritairement et dans le cadre des organismes gérés majoritairement par les organisations syndicales de salariés et les organisations professionnelles d'employeurs ;

2. Considérant que, pour l'application de ces dispositions, le II de l'article premier du décret attaqué du 28 janvier 2015 insère dans le code du travail les articles R. 2135-10 à D. 2135-31, afin de préciser les règles d'organisation et de fonctionnement du fonds paritaire ainsi que les règles de répartition de ses crédits ; qu'eu égard aux moyens de sa requête, la Confédération générale du travail doit être regardée comme demandant l'annulation des dispositions introduites par le décret aux articles R. 2135-15 et R. 2135-28 du code du travail ;

Sur la légalité externe :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 22 de la Constitution : " Les actes du Premier ministre sont contresignés, le cas échéant, par les ministres chargés de leur exécution " ; que les ministres chargés de l'exécution sont ceux qui ont compétence pour signer ou contresigner les mesures réglementaires ou individuelles que comporte nécessairement l'exécution des actes en cause ; qu'aucune disposition du décret attaqué n'appelle de mesure d'exécution que le ministre chargé de la sécurité sociale serait compétent pour signer ou contresigner ; qu'il suit de là que le moyen tiré du défaut de contreseing de ce ministre doit être écarté ;

Sur la légalité interne :

En ce qui concerne l'article R. 2135-15 du code du travail :

4. Considérant que l'article L. 2135-15 du code du travail prévoit que le fonds est géré par une association paritaire, administrée par un conseil d'administration composé de représentants des organisations syndicales de salariés et des organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel ; que les dispositions attaquées de l'article R. 2135-15 prévoient qu'au sein du conseil d'administration de l'association paritaire, d'une part, le total des voix des organisations professionnelles d'employeurs est égal au nombre total des voix des organisations syndicales de salariés et, d'autre part, que chaque organisation syndicale de salariés dispose de deux voix alors que chaque organisation professionnelle d'employeurs dispose d'un nombre de voix proportionnel à son audience au niveau national et interprofessionnel ;

5. Considérant, en premier lieu, que la détermination du nombre des voix dont disposent les organisations membres du conseil d'administration de l'association paritaire chargée de gérer le fonds institué par l'article L. 2135-9 du code du travail ne saurait sérieusement être regardée comme portant atteinte à la liberté d'adhérer au syndicat de son choix ou au principe de participation des travailleurs à la détermination collective des conditions de travail et à la gestion des entreprises ;

6. Considérant, en second lieu, que ni le principe d'égalité ni aucune disposition législative propre au fonds institué par l'article L. 2135-9 du code du travail n'imposent que les organisations syndicales représentatives disposent, au sein du conseil d'administration de l'association chargée de le gérer, d'un nombre de voix proportionnel à leur audience ; que le principe d'égalité n'impose pas davantage que les modalités de répartition des voix au sein de ce conseil d'administration soient identiques pour la répartition opérée entre les organisations syndicales de salariés et pour celle qui concerne les organisations professionnelles d'employeurs ;

7. Considérant, enfin, que les dispositions de l'article R. 2135-15 n'introduisent pas de discrimination dans l'exercice de la liberté syndicale qui serait incompatible avec les stipulations combinées des articles 11 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la confédération requérante n'est pas fondée à demander l'annulation des dispositions de l'article R. 2135-15 du code du travail introduites par le décret attaqué ;

En ce qui concerne l'article R. 2135-28 du code du travail :

9. Considérant que le 1° de l'article L. 2135-13 du code du travail dispose que : " Les modalités de répartition des crédits entre organisations syndicales de salariés, d'une part, et entre organisations professionnelles d'employeurs, d'autre part, sont déterminées, par voie réglementaire, de façon uniforme pour les organisations syndicales de salariés et en fonction de l'audience ou du nombre des mandats paritaires exercés pour les organisations professionnelles d'employeurs " ; que par sa décision 2015-502 QPC du 27 novembre 2015, le Conseil constitutionnel a déclaré ces dispositions conformes à la Constitution ; que, par suite, la confédération requérante n'est pas fondée à soutenir que l'article R. 2135-28 du code du travail introduit par le décret attaqué, qui se borne à reprendre la règle fixée par ces dispositions législatives, serait entaché d'illégalité ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de la Confédération générale du travail doit être rejetée ;

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la Confédération générale du travail est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Confédération générale du travail, au Premier ministre et à la ministre du travail, de l'emploi de la formation professionnelle et du dialogue social.


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 389127
Date de la décision : 14/09/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 14 sep. 2016, n° 389127
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-François de Montgolfier
Rapporteur public ?: Mme Maud Vialettes
Avocat(s) : SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:389127.20160914
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