La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/07/2016 | FRANCE | N°397239

France | France, Conseil d'État, 2ème - 7ème chambres réunies, 22 juillet 2016, 397239


Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 29 février et 14 avril 2016, M. B...A...demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret en date du 19 janvier 2016 par lequel le Premier ministre a accordé son extradition aux autorités macédoniennes.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrati

ve ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, co...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 29 février et 14 avril 2016, M. B...A...demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret en date du 19 janvier 2016 par lequel le Premier ministre a accordé son extradition aux autorités macédoniennes.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957 ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Béatrice Bourgeois-Machureau, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP de Nervo, Poupet, avocat de M. A...;

1. Considérant que, par le décret attaqué, le Premier ministre a accordé aux autorités macédoniennes l'extradition de M. A...pour l'exécution d'un arrêt de la cour d'appel de Gostivar du 16 avril 2014 le condamnant à la peine de trois ans d'emprisonnement pour des faits de production non autorisée et distribution de stupéfiants, de substances psychotropes et de précurseurs, ainsi que pour l'exécution d'un jugement du tribunal d'instance de Skopje du 4 septembre 2014 le condamnant à la peine de quatre ans d'emprisonnement pour des faits de production non autorisée et distribution de stupéfiants, de substances psychotropes et de précurseurs ;

2. Considérant, en premier lieu, que le décret attaqué comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; qu'il satisfait ainsi à l'exigence de motivation prévue par la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ; que, s'il précise que la remise de M. A...sera ajournée, en application des stipulations de l'article 19 de la convention européenne d'extradition, jusqu'à ce que la poursuite engagée en France à son encontre, à raison d'une infraction différente, soit terminée et, en cas de condamnation, jusqu'à ce que la peine correspondante ait été exécutée, la faculté d'ajournement ouverte par l'article 19 concerne les modalités d'exécution matérielle de la décision d'extradition et n'a pas d'incidence sur la légalité de cette décision ; que ces stipulations ne sauraient, par suite et en tout état de cause, être utilement invoquées à l'appui d'un moyen tiré de ce que le décret attaqué serait insuffisamment motivé faute d'avoir indiqué l'infraction pour laquelle M. A...était poursuivi en France ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'en vertu des stipulations du c) du 2 de l'article 12 de la convention européenne d'extradition du 13 décembre 1957, seule applicable à la date du décret attaqué et qui régit les conditions, la procédure et les effets de l'extradition dans les relations entre les autorités françaises et les autorités macédoniennes, la demande d'extradition doit être accompagnée d'une copie des dispositions légales applicables ou d'une déclaration sur le droit applicable ; qu'il ressort des pièces du dossier que la demande d'extradition transmise par les autorités macédoniennes à l'encontre de M. A...comportait la copie des dispositions légales applicables ; qu'ainsi, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le décret accordant son extradition aux autorités macédoniennes a été rendu en violation des stipulations de cette convention ;

4. Considérant, en troisième lieu, que si le requérant ne peut pas utilement se prévaloir des stipulations de l'article 7 de la convention d'extradition entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République socialiste fédérative de Yougoslavie du 23 septembre 1970, relatif à l'extradition d'une personne ayant fait l'objet d'une décision rendue par défaut, cette convention n'étant plus applicable à la date du décret attaqué, il résulte tant des principes de l'ordre public français que des conventions internationales signées par la France, qu'en matière pénale, une personne condamnée par défaut doit pouvoir obtenir d'être rejugée en sa présence, sauf s'il est établi d'une manière non équivoque qu'elle a renoncé à son droit à comparaître et à se défendre ; qu'en l'espèce, les autorités macédoniennes ont donné l'assurance que M. A...pourra être rejugé pour les faits ayant donné lieu à la condamnation prononcée en son absence le 4 septembre 2014 ;

5. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 1er des réserves émises par la France lors de la ratification de la convention européenne d'extradition : " L'extradition ne sera pas accordée lorsque la personne réclamée serait jugée dans l'Etat requérant par un tribunal n'assurant pas les garanties fondamentales de procédure et de protection des droits de la défense ou par un tribunal institué pour son cas particulier, ou lorsque l'extradition est demandée pour l'exécution d'une peine ou d'une mesure de sûreté infligée par un tel tribunal " ;

6. Considérant, d'une part, que les articles 279 et suivants du code macédonien de procédure pénale organisent la publicité des audiences ; qu'il n'est pas établi que les jugements pour l'exécution desquels l'extradition de M. A...est demandée n'auraient pas été rendus après une audience publique ; que si le requérant relève que la traduction de ces jugements ne comporte pas la mention de ce qu'ils auraient été rendus après une audience publique, il n'appartient pas à l'administration française non plus qu'au Conseil d'Etat statuant au contentieux de vérifier la régularité des actes d'une autorité judiciaire de l'Etat requérant au regard de la législation de ce dernier ; que, d'autre part, il ne ressort pas des mentions de l'arrêt de la cour d'appel de Gostivar du 16 avril 2014 que cette juridiction aurait procédé à une requalification criminelle des faits, alors qu'elle a fait application du code pénal macédonien réprimant la commission d'une infraction réalisée en coaction ; que le requérant a été défendu par un avocat lors des jugements en cause ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la violation des garanties fondamentales de la procédure ne peut qu'être écarté ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation du décret attaqué ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B...A...et au garde des sceaux, ministre de la justice.


Synthèse
Formation : 2ème - 7ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 397239
Date de la décision : 22/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 22 jui. 2016, n° 397239
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie-Caroline de Margerie
Rapporteur public ?: Mme Béatrice Bourgeois-Machureau
Avocat(s) : SCP DE NERVO, POUPET

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:397239.20160722
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award